Tahiti Infos

Les Fidjiens ont voté pour la première fois depuis huit ans


Franck Bainimarama, confiant, glisse son bulletin dans l’urne transparente.
Franck Bainimarama, confiant, glisse son bulletin dans l’urne transparente.
SUVA, mercredi 17 septembre 2014 (Flash d’Océanie) – Les quelque 520.000 électeurs des îles Fidji ont voté mercredi pour la première fois depuis 2006, année où un coup d’État avait renversé le gouvernement démocratiquement élu du Premier ministre Laisenia Qarase.

Au cours d’un scrutin qui n’a été marqué par aucun incident majeur, les électeurs avaient à faire leur choix entre sept partis politique, dans les rangs desquels, dans un système à la proportionnelle, devraient se trouver les députés du prochain Parlement de 50 sièges.
Toutefois, entres ces partis, deux sont pressentis comme étant les dominants : le Fiji First, créé par l’ancien chef des armées et dirigeant du gouvernement post-putsch, Franck Bainimarama (qui brigue un mandat électif et par conséquent une légitimité démocratique en misant sur les réalisations de son gouvernement entre 2007 et 2014) et le SODELPA de l’ancienne ministre Ro Temumu Kepa, émanation de l’ancien SDL renversé par le coup d’État.

Au cours de la campagne électorale, M. Bainimarama a notamment expliqué qu’il n’envisageait pas d’autre scénario que celui de sa victoire, ni même la nécessité éventuelle d’une alliance avec un autre parti pour constituer une majorité parlementaire forte.
Selon les derniers sondages d’opinion, il était crédité de près de cinquante pour cent d’intentions de vote.
M. Bainimarama, 60 ans, a axé sa campagne autour de thèmes fédérateurs et sur son bilan de gouvernance de ces huit dernières années, au cours desquelles il a abrogé la précédente constitution de 1997 et mis en place un nouveau texte mettant l’accent sur l’abolition des anciennes dispositions discriminatoires entre Fidjiens de souche et l’autre principal groupe ethnique d e l’archipel : les descendants des travailleurs indiens, amenés à Fidji à la fin du 19ème siècle pour travailler dans les plantations de canne à sucre.


Ro Temumu Kepa, principale challenger de Franck Bainimarama, au sortir du bureau de vote.   [101 Kb]
Ro Temumu Kepa, principale challenger de Franck Bainimarama, au sortir du bureau de vote. [101 Kb]
Le principe martelé au cours de ces dernières années par celui qui a justifié son putsch par la nécessité de « nettoyer » l’archipel : « un homme, une voix », par opposition aux anciennes circonscriptions réservées aux Fidjiens indigènes ou aux Indiens, avec, entre les deux, des sièges parlementaires dits « ouverts ».
Le SODELPA de Mme Kepa s’appuie surtout sur l’électorat fidjien indigène et, au cours de la campagne, a fait allusion de manière persistante à un danger d’érosion des pouvoirs et prérogatives des indigènes.
La dirigeante est créditée de vingt pour cent avec une base électorale chez les Fidjiens indigènes et avec des thèmes de campagne axés autour de la souveraineté et l’identité des Fidjiens de souche.
Ce parti conteste aussi, entre autres, la décision d’ouvrir l’appellation de Fidjien (qu’il considère comme seule applicable pour les Fidjiens indigènes) à tous les citoyens de cet archipel, y compris ceux issus d’autres ethnies.

Les autres figures politiques en lice dans l’archipel arrivent loin derrière.
Les autres partis (National Federation Party, People’s Democratic Party, les travaillistes ou encore OneFiji) sont à la traîne avec des scores d’intention oscillant entre trois et un pour cent.
Toutefois, dans ce dernier sondage, le camp des indécis représente une quinzaine de pour cent des personnes interrogées.

L’âge légal de vote a été rabaissé de 21 à 18 ans, ouvrant ainsi ce scrutin à pas moins de vingt pour cent de l’électorat.


Insularité oblige : déplacements hauts en couleurs pour les officiels du bureau des élections   [90 Kb]
Insularité oblige : déplacements hauts en couleurs pour les officiels du bureau des élections [90 Kb]
Ambiance bon enfant

Sur place, tout au long de la journée de mercredi, l’ambiance a été qualifiée de festive et bon enfant, malgré parfois de longue files d’attente sous un soleil brûlant.
Aux fins de ces élections, plus de 1.400 bureaux de vote, le plus souvent hébergés par des écoles ou des administrations, ont été ouverts.

des élections sous haute surveillance

Ces élections se sont déroulées sous la surveillance d’un groupe d’observateurs internationaux, coprésidé par l’Australie, l’Indonésie et l’Inde.
Ce groupe est constitué d’un total de plus de 90 observateurs représentants onze pays, dont la Nouvelle-Zélande, le Royaume-Uni, les États-Unis, ainsi que des experts de l’Union Européenne.

Au plan du maintien de l’ordre, la police a mobilisé quelque 3.200 agents à travers le pays pour veiller au bon déroulement du scrutin.

À 18h00 locales (GMT+12), les bureaux de vote ont fermé, laissant la place aux premières opérations de dépouillement et à l’annonce des premières tendances dans la soirée.

Au cours d’une première conférence de presse postélectorale, au centre d’analyse des résultats, dans une grande salle omnisports de la capitale, Mohammed Saneem, superviseur des élections, a tenu en début de soirée à remercier les électeurs de leur participation, qu’il estime aux alentours de soixante dix pour cent à travers l’archipel.

Aux termes de la nouvelle Constitution, promulguée en septembre 2013 par le Président de la république Ratu Epeli Nailatikau, un gouvernement doit être formé dans les 17 jours suivant les législatives.
L’ancien Parlement national, longtemps désaffecté et qui fut aussi le théâtre du premier putsch de l’histoire de Fidji, en mai 1987, sous la houlette du Colonel Sitiveni Rabuka, va aussi reprendre du service.
Plus petit, il a été préféré au complexe parlementaire utilisé jusqu’en 2006 et qui devrait être reconverti en centre de conférences.
Après le putsch de 2006, Fidji a été suspendu du Commonwealth (en septembre 2009) et du Forum des Îles du Pacifique (en mai 2009).
De nombreux programmes d’aide au développement, dont ceux de l’Union Européenne, ont aussi été gelés, à l’exception de volets strictement humanitaires.

Ces élections, censées marquer le retour de Fidji dans le giron des démocraties, sont aussi perçues comme hautement stratégiques au plan des équilibres régionaux.
Elles devraient sceller le réchauffement entre Fidji, puissance incontournable dans la géopolitique régionale, et le bloc occidental.
Durant les années post-putsch, marquées par les sanctions imposées par les grands voisins occidentaux (Australie et Nouvelle-Zélande), Fidji a joué à fond la carte de la diversification géostratégique.
L’archipel, sous la férule de Franck Bainimarama, a multiplié les alliances et coopérations diplomatiques, économiques et militaires avec d’autres pays, à commencer par la Chine, très présente en Océanie, ou encore des pays comme l’Indonésie, Cuba ou la Russie.

Les résultats officiels ne sont pas attendus avant sept jours mais des résultats préliminaires pourraient être rendus publics jeudi à 02H00 (14H00 GMT mercredi)
pad

« Merci d’avoir voté » : le dépouillement a commencé mercredi soir dans une grande salle omnisports de Suva   [188 Kb]
« Merci d’avoir voté » : le dépouillement a commencé mercredi soir dans une grande salle omnisports de Suva [188 Kb]

Rédigé par PAD le Mercredi 17 Septembre 2014 à 06:00 | Lu 4684 fois