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Les Ailes des îles : 1936, l’aube de l’aéronautique tahitienne


Le bimoteur CAMS 55 l’un des deux types d’appareils de l’escadrille, avec le CAMS 37, monomoteur. Crédit Jean-Louis Saquet.
Le bimoteur CAMS 55 l’un des deux types d’appareils de l’escadrille, avec le CAMS 37, monomoteur. Crédit Jean-Louis Saquet.
Papeete, le 17 janvier 2018 - Le Musée de Tahiti et des îles – Te Fare Manaha accueille jusqu'au 18 mars l'exposition Les Ailes des îles. Cette exposition, organisée par l'association Mémoire polynésienne à l'occasion des 60 ans de la compagnie Air Tahiti et en partenariat avec Aéroport de Tahiti, retrace l'histoire du transport aérien inter-insulaire en Polynésie française. Tahiti infos vous propose de revenir chaque jour pendant une dizaine de jours sur les grandes périodes de cette épopée aérienne.



Papeete, une petite bourgade clairsemée sur tout son long d’une plage grise, est alors protégée de la houle océanique par un récif-barrière qui se ferme sur une petite rade presque toujours sans ride.
Quelques bâtiments clairs se distinguent par leurs étages supérieurs couverts de tôles qui dépassent parfois la canopée dense des gros acacias. Le reste est peu visible depuis la passe qui ouvre le bassin vers la mer. En fond, les douces collines, les fortes pentes et les sommets sont vierges de toutes traces humaines. Peu de mouvement perceptible non plus aux pieds des arbres. En approchant, des silhouettes blanches se précisent entre les basses branches. Quelques automobiles roulent mollement devant la Poste western. En apparence, la colonie sommeille. Loin des grognements inquiétants de la vielle Europe, les marchands perpétuent leur activité, somme toute assez simple et lucrative, tandis que les fonctionnaires tuent le temps sous un ventilateur de plafond en attendant les apéritifs du soir. Des voiles s’éloignent vers le large et si les yeux se portent jusque là, ce n’est pas un avion qui est attendu. À Papeete, on connaît l’avion, on en a même vu un se poser dans le port, il y a déjà plusieurs années 1. On espère plutôt voir les goélettes parties très loin depuis des semaines revenir enfin, chargées de nacre et de coprah. Un retour des marins pour les uns, de bonnes affaires pour les autres..


La base aéronavale de Fare Ute

Vue générale de la base dont les infrastructures seront utilisées par le Grumann d’Air Tahiti. Crédit photo : Jean-Louis Saquet.
Vue générale de la base dont les infrastructures seront utilisées par le Grumann d’Air Tahiti. Crédit photo : Jean-Louis Saquet.
Le fonctionnement de cette aviation maritime est complètement dépendant de la goélette Zélée de la Marine. À partir d’elle ont lieu toutes les transmissions radio éloignées, notamment avec Saïgon qui fait le relais avec la France, mais surtout, la goélette est chargée de déposer sur les îles où les appareils doivent se rendre, les stocks d’huile et d’essence. Tout au long de leur présence, les avions auront des missions diverses, vols de nuit, photos, transport du courrier ou de malades et transport d’administrateurs dans les îles. À partir de la déclaration de guerre, s’ajoutent les reconnaissances de bateaux signalés par la vigie ou la station de radio civile. L’Unité sera dissoute en 1940.

A Paris, plusieurs intervenants plaident auprès de l’État pour l’installation d’une base aéronavale à Papeete depuis quelques années. Le lieutenant de vaisseau Hourcade, commandant de la Zélée en 1934, introduit ainsi son dossier : " La création d’une aviation maritime est une question d’actualité (…) Mis en présence du fait colonial, nous devons l’exploiter. "
Suivent d’autres rapports arguant, outre les utiles services qu’elle rendrait dans les archipels, de " l’indispensable mission de prestige et de défense nationale dans un secteur où les autres puissances entretiennent une aviation moderne et particulièrement active. "2
Ainsi, une instruction de 1935 établit une base de l’Aéronavale à Papeete. Les terrains domaniaux de Fare Ute, parfaitement situés, sont retenus et les soldats de la garnison, commencent immédiatement les constructions en maçonnerie, dont les murs de base du grand hangar et la rampe d’accès à la mer.
Pendant ce temps toute la base en " kit " est rassemblée et embarquée à bord de l’Éridan, le cargo mixte des Messageries Maritimes qui déposera à Papeete les personnels, les caisses et les hydravions le 6 janvier 1936.
Ces appareils, malgré leur vétusté, rempliront un grand nombre de missions d’utilité publique avant que l’unité, l’Escadrille E8, dont la majorité du personnel est partie se battre en Europe dès 1941, ne soit dissoute en 1942.

Notes
1 - Entre 1925 et 1929 en effet, divers bateaux militaires américains, français et Néo-zélandais firent escale dans les EFO en multipliant les survols des îles, au moyen des hydravions dont ils étaient dotés.
2 : René Narbonne, Flammarion.

Infos pratiques :
Musée de Tahiti et des Iles - Te Fare Manaha
Pointe des Pêcheurs à Punaauia
Jusqu'au dimanche 18 mars 2018
Ouvert du mardi au dimanche de 9 à 17 heures
Tél : 40 548 435
www.museetahiti.pf



le Mercredi 17 Janvier 2018 à 08:07 | Lu 1201 fois