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Le virus Zika qui circule en Amérique du sud est à plus de 99% le même qu'à Tahiti


Des chercheurs du Centre national de référence de surveillance des arbovirus de l'Institut Pasteur de Guyane ont réussi à séquencer complètement le génome du virus qui circule en ce moment en Amérique du Sud (Photo : Institut Pasteur de Cayenne).
Des chercheurs du Centre national de référence de surveillance des arbovirus de l'Institut Pasteur de Guyane ont réussi à séquencer complètement le génome du virus qui circule en ce moment en Amérique du Sud (Photo : Institut Pasteur de Cayenne).
PAPEETE, le 8 janvier 2016. La revue scientifique et médicale The Lancet a publié ce jeudi (7 janvier) un article indiquant que les chercheurs français de l'Institut Pasteur de Guyane ont séquencé intégralement le génome du Zika qui circule actuellement activement en Amérique du sud et plus récemment aux Antilles. Ce virus correspond entre 99,7 à 99,9% à la souche responsable de l’épidémie en Polynésie française en 2013-2014.

Depuis mai 2015, une épidémie de Zika fait rage au Brésil. Et elle inquiète fortement les autorités sanitaires de ce pays en raison des malformations congénitales cérébrales constatées déjà sur plusieurs milliers de nourrissons. En raison d'une infection de la mère par le virus Zika pendant sa grossesse, transmise au fœtus par le placenta, de nombreux bébés sont nés microcéphales. Avec une tête nettement plus petite que la normale et un développement du cerveau atrophié. Depuis mai dernier, le Brésil aurait enregistré 20 fois plus de cas de microcéphalies qu'à l'accoutumée, au point que les autorités sanitaires brésiliennes ont désormais lancé un état d'urgence national fin décembre. Il est recommandé aux femmes, d'éviter de tomber enceintes, tant qu'on en sait pas davantage sur les tous les dangers existants d'une infection par le Zika durant la grossesse !

Connaître toutes les particularités de ce virus Zika est donc désormais une course contre-la-montre lancée par tous les chercheurs qui s'intéressent à ces arbovirus émergents. Depuis l'épidémie de Zika en Polynésie française, entre octobre 2013 et avril 2014, on en sait un peu plus sur ce virus décrit depuis 1947 en Afrique mais peu répandu et donc analysé depuis, à part une épidémie sur l'île de Yap (Micronésie) en 2007.

Ce virus présenté à l'origine comme bénin –et il l'est dans une grande majorité des cas- est bien plus dangereux qu'on ne le croyait. Il y a eu les cas de complications neurologiques sur les adultes avec les syndromes de Guillain-Barré notamment. Désormais, ces complications cérébrales du nourrisson infecté in utéro affolent les pays qui craignent d'être touchés par le virus prochainement. Après le Brésil, le Zika apparait désormais au Surinam, pays frontalier avec la Guyane, où les premiers cas viennent d'être confirmés. Dans la foulée, les îles de la Caraïbe sont en placées en vigilance sanitaire par rapport à ce risque épidémique.

LA SOUCHE POLYNESIENNE CONFIRMEE

Ce sont avec les échantillons provenant de trois des premiers cas autochtones de Zika déclarés au Suriname que des chercheurs du Centre national de référence de surveillance des arbovirus de l'Institut Pasteur de Guyane ont réussi à séquencer complètement le génome du virus qui circule en ce moment en Amérique du Sud. Il en ressort que "les souches du Suriname appartiennent au génotype asiatique et semblent être très proches de la souche qui circulait en Polynésie française en 2013, avec laquelle elles partagent plus de 99,7 % à 99,9% des nucléotides et des acides aminés" détaille la revue The Lancet.

Les chercheurs insistent : "la situation évolue rapidement avec de plus en plus de pays d'Amérique du sud et centrale déclarant des cas. Cette propagation des souches de Zika étroitement liées aux souches de Polynésie française soulève une préoccupation croissante pour la santé publique. De plus, l'augmentation de la fréquence des syndromes de Guillain-Barré et des anomalies neurologiques congénitales notifiées par le ministère de la santé du Brésil, devrait donner un nouvel élan pour que des programmes de recherche collaborative soient menées afin d'évaluer les effets entre le Zika, ces complications neurologiques et ces réactions auto-immunes". Si les chercheurs polynésiens de l'Institut Louis Malardé s'étaient retrouvés un peu seuls face à l'émergence de cet arbovirus méconnu en octobre 2013, désormais le Zika déclenche un intérêt quasi mondial.


Pour aller plus loin, l'article paru dans la revue The Lancet peut être consulté en CLIQUANT ICI

ou consulter le site Internet de l'Institut Pasteur de Cayenne en CLIQUANT ICI

Comment le Zika a gagné le Brésil ?

Si la souche polynésienne du Zika qui touche actuellement l'Amérique du Sud vient effectivement d'être confirmée scientifiquement on ne sait pas bien entendu précisément comment le virus est passé du Pacifique à l'Amérique du Sud. Après l'épidémie qui a touché la Polynésie française jusqu'en avril 2014, d'autres pays du Pacifique ont été touchés. Un autre article scientifique publiant notamment les résultats de recherche menés par des spécialistes de l'Institut Malardé de Papeete démontre que le Zika a rapidement gagné d'autres îles et pays du Pacifique après son "apparition" en Polynésie française : la Nouvelle-Calédonie, les îles Cook, l'île de Pâques ont été touchées dans les mois suivants. Ces scientifiques précisent que le virus a très certainement atteint d'autres pays sans être officiellement déclaré en raison des symptômes cliniques très proches du Zika avec la dengue et le chikungunya qui circulaient également au même moment dans le Pacifique et par manque de moyens d'analyses.

On ne peut donc pas affirmer avec certitude que c'est un résident de Polynésie française ou un touriste venu à Tahiti qui aurait ensuite voyagé en Amérique du sud qui est la cause de l'épidémie en cours au Brésil. Plus probable et régulièrement avancée comme origine de l'épidémie de Zika en cours au Brésil : la coupe du monde de football en juillet 2014. Cet événement sportif mondial a fait déplacer des millions de personnes vers le Brésil et aussi des dirigeants de la Fifa en provenance des pays du Pacifique. Mais les dates de cette compétition en juillet 2014 avec celle des premiers cas suspects de Zika détectés par les autorités sanitaires brésiliennes au début de l'année 2015 sont plutôt éloignées. De même, l'équipe tahitienne de va'a est effectivement allée participer à Rio de Janeiro au 16e championnat du monde de va'a de vitesse du 12 au 18 août 201.

Nos confrères du magazine Pacifique Hebdo s'interrogent donc dans le numéro paru cette semaine (N°308 daté de ce vendredi 8 janvier) sur une possible responsabilité des piroguiers polynésiens dans l'introduction du Zika au Brésil. Sauf que l'épidémie tahitienne de Zika était officiellement terminée depuis plus de trois mois au moment de cette compétition et que les premiers cas brésiliens de Zika sont apparus près de cinq mois après ce championnat. En clair, le cas originel du virus Zika au Brésil reste inconnu. Tout comme celui qui l'avait introduit en octobre 2013 à Tahiti.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 8 Janvier 2016 à 11:24 | Lu 1849 fois