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Le gouvernement fidjien encourage ses journalistes à cesser de « s’autocensurer »


Le gouvernement fidjien encourage ses journalistes à cesser de « s’autocensurer »
SUVA, mercredi 5 septembre 2012 (Flash d’Océanie) – Le gouvernement fidjien a appelé les journalistes de cet archipel à cesser de « s’autocensurer » et à « faire leur travail », huit mois après le levée des dispositions d’urgence qui avaient, entre avril 2009 et janvier 2012, vu la mise en place d’un contrôle stricte et systématique sur la presse locale.

S’exprimant à l’occasion d’un colloque régional autour du thème « Médias et Démocratie » qui se tient les 5 et 6 septembre 2012 à l’Université du Pacifique Sud (USP), c’est la directrice de cabinet au ministère de l’information, Sharon Smith Johns, qui a porté la voix de son gouvernement au cours d’une intervention en début de séminaire et en présence de nombreux journalistes, analystes et enseignants régionaux.
Cette série de réflexions intervient sr fond de levée des mesures d’urgences à Fidji, début 2012, mais aussi d’un exercice de consultations publiques auprès de la population en vue de recueillir les avis concernant ce qui devrait être le contenu d’une nouvelle Constitution, appelée à voir le jour courant 2013, avant des élections annoncées pour le dernier trimestre 2014.

« Le gouvernement fidjien copte sur les journalistes pour relever le défi en fournissant aux gens ordinaires l’information dont ils ont besoin (…) Les journalistes devraient profiter de la levée de la censure pour commencer à vraiment informer, de manière complète, les consommateurs de médias », a lancé la responsable qui est aussi porte-parole du gouvernement.
« On entend beaucoup parler de censure et de l’idée selon laquelle les journalistes de Fidji ont trop peur pour rendre compte complètement (…) De telles peurs sont compréhensibles dans un processus de transition de la censure vers la liberté. Mais je demande aux journalistes de ne pas s’en servir d’excuse pour ne pas faire leur travail », a-t-elle poursuivi en appelant de ses vœux des médias « vigoureux ».
« Des médias vigoureux, mais à certaines conditions, qui sont une précondition dans la plupart des pays : pas d’incitation à la division raciale, pas de menace à la paix et l’ordre public, pas d’atteinte à l’économie et aux emplois des personnes ».
Reprenant un point de vue exprimé à plusieurs reprises par le Contre-amiral Franck Bainimarama, Premier ministre du gouvernement issu de son putsch du 5 décembre 2006, Mme Smith Johns s’est aussi fait l’avocate d’un journalisme à vocation « responsable » et « éducative » en vue de « créer la stabilité propice aux investissements et à la création des emplois dont les gens ont cruellement besoin ».
Évoquant « l’intérêt de la stabilité nationale », elle a ensuite justifié la période de censure (2009-2012) par une « obligation d’imposer (cette période) (…) En tant que pays, nous sommes encore, en quelque sorte, en travaux ».
Plusieurs missions internationales, notamment des Nations-Unies, du Commonwealth du Forum des Îles du Pacifique (Fidji ayant été suspendu de son statut de membre plein de ces deux dernières organisations, respectivement en septembre et en mai 2009) ou encore de l’Union Européenne et du groupe des pays ACP (Afrique, Caraïbe, Pacifique) se sont tenues à Fidji depuis le début de l’année 2012.
À plusieurs reprises, l’une des impressions exprimées par les membres de ces missions a été une inquiétude quant à la capacité des médias locaux à s’exprimer librement.
L’Université du Pacifique Sud et son école de journalisme, depuis plusieurs années, poursuivent une réflexion autour du concept de « Journalisme de Paix » pour la région Pacifique.
Une nouvelle fois, cette semaine, une large part est accordée à cette notion au cours des débats.
D’une manière plus générale, les thématiques abordées se concentrent sur les interactions sensibles entre journalisme, médias et pratique de la démocratie et leur spécificité dans un environnement insulaire océanien.
Le colloque réunit des chercheurs locaux et internationaux, des représentants des différents médias et les enseignants et étudiants de journalisme dans le Pacifique.

Soutien français

Dans la perspective de ce symposium, fin mai 2012, le gouvernement français, via son ambassade à Suva, a apporté un appui financier de près de quatre mille euros.
« C’est un sujet important dans la zone et surtout à Fidji en ce moment, avec d’une part la préparation des élections (législatives) et la consultation sur la Constitution pour 2014 et d’autre part la levée de l’état d’urgence (en janvier 2012) qui limitait la place des médias à Fidji. Donc on est à un moment important pour les médias et surtout la question du rapport avec la démocratie à Fidji », avait alors déclaré Antoine Esteban, attaché culturel à l’ambassade de France à Suva, qui estime que ces thématiques ont été rarement traitées d’un point de vue spécifiquement océanien.
Il y a une vingtaine d’années, l’école de journalisme de l’USP, à vocation régionale, avait été créée à Suva sur financement français, dans une dynamique de montée en puissance de la France dans cet archipel.
Le premier directeur de cette structure avait été François Turmel, alors transfuge du service français de la radio mondiale britannique BBC.
Cette structure avait ensuite été dirigée par des enseignants anglophones (notamment australiens ou néo-zélandais).
La France (y compris via son fonds de coopération éducative, scientifique et culturelle, le « Fonds Pacifique ») soutient actuellement des programmes d’enseignement du Français au sein de cette université anglophone, ainsi que des actions dans le domaine artistique et des spectacles, et de la promotion des énergies renouvelables.


pad

Rédigé par PAD le Mardi 4 Septembre 2012 à 22:08 | Lu 532 fois