Paris, France | AFP | mercredi 20/02/2019 - Comment enseigner le réchauffement climatique, sujet fondamental mais "compliqué", voire anxiogène? L'école tente, cahin-caha, de s'adapter, avec l'aide de scientifiques et grâce aux bonnes volontés.
"Les jeunes vivront les conséquences de ces dérèglements, c'est notre responsabilité de les y préparer", souligne l'astrophysicien et académicien Pierre Léna, dont c'est un cheval de bataille.
"D'abord ils doivent comprendre ce qui se passe, que c'est compliqué, mais pas incompréhensible: les relations de causalité - entre émissions de CO2 et réchauffement - et la responsabilité humaine. Ensuite on doit dire à ces citoyens du monde qu'on peut agir: depuis le local - éteindre les lumières, par exemple - jusqu'au global - avec des politiques de solidarité internationale".
Prof de sciences de la vie et de la Terre (SVT) dans un collège de Tours, Sylvain Caberty constate que les élèves sont souvent "au courant, même s'ils ne relient pas tout".
"Notre rôle est d'apporter des faits scientifiques, pour montrer que ça existe et les impacts auxquels se préparer", explique-t-il, d'autant que "fake news" et théories du complot peuvent s'exprimer, notamment au lycée.
"Entre les tenants de la Terre plate et ceux qui pensent que le réchauffement n'est pas d'origine humaine, parfois, pour réussir à faire admettre les choses, c'est compliqué", dit ce responsable de l'Association des professeurs de biologie et géologie (APBG).
L'enjeu éducatif est tel que l'accord climat de Paris fait dans son article 12 obligation aux Etats signataires d'améliorer l'accès à la formation. Le défi relève tant des SVT que de la physique, l'économie, l'histoire-géo, voire la philosophie...
En France, le climat est présent dans la réforme du lycée, souligne le ministère de l'Education. Mais quand des experts regardent les programmes, l'inquiétude se fait sentir.
"A ce stade, la place accordée au changement climatique apparaît dérisoire: à peu près rien avant la terminale!", se sont insurgés plusieurs centaines de scientifiques tels la climatologue Valérie Masson-Delmotte, dans une lettre publiée par Mediapart.
Un espoir repose sur le cours scientifique commun de terminale (deux heures par semaine), dont le contenu n'est pas tranché.
"On va vers quelque chose comme cela: entre un tiers et une moitié d'année de l'enseignement scientifique de tronc commun en terminale consacrée au changement climatique et les énergies qui y sont liées", indique Pierre Léna, membre du groupe de travail installé par le Conseil supérieur des programmes. "Nous devons remettre notre copie dans quelques semaines. Mais le Conseil devra approuver, et le dernier mot sera au ministère".
Jusqu'ici l'enseignement du climat relève plutôt de bonnes volontés, dit David Wilgenbus, directeur de l'Office for climate education (OCE) qui, installé avec des climatologues à Jussieu, concocte pour les profs des séquences clé en main et des versions vulgarisées des rapports du Giec.
S'il souligne des "initiatives super et isolées d'enseignants", avec des outils de Météo France, du Museum d'histoire naturelle ou de fondations, "du côté de l'institution, le compte n'y est pas", estime ce médiateur scientifique, qui forme des profs depuis 10 ans.
Sylvain Caberty décrit un projet mené avec ses collègues d'histoire, de technologie, de physique: "On part du quartier HLM voisin, avec l'idée d'en faire un écoquartier à la fin de l'année".
Avec ses classes, ils étudient les effets de la fonte de la banquise, travaillent sur les risques propres à leur région (quel impact sur la Loire?): "partir du réel est important".
Pour les spécialistes, il faut s'y mettre dès la primaire.
"Nous avons alors des jeunes très sensibles à ces questions", argue M. Léna. "Comme ils sont souvent dans l'émotion, l'école doit leur donner des éléments d'analyse rationnelle".
Autre écueil en effet pour les profs: "le catastrophisme".
"J'ai entendu des exposés de collégiens qui disaient +il est urgent de quitter la Terre, elle est foutue!+", raconte l'académicien. Il faut "favoriser un esprit critique mais un cœur plein d'espoir", insiste-t-il, évoquant "les forces de la jeunesse et sa capacité d'inventer" des réponses.
"Les jeunes vivront les conséquences de ces dérèglements, c'est notre responsabilité de les y préparer", souligne l'astrophysicien et académicien Pierre Léna, dont c'est un cheval de bataille.
"D'abord ils doivent comprendre ce qui se passe, que c'est compliqué, mais pas incompréhensible: les relations de causalité - entre émissions de CO2 et réchauffement - et la responsabilité humaine. Ensuite on doit dire à ces citoyens du monde qu'on peut agir: depuis le local - éteindre les lumières, par exemple - jusqu'au global - avec des politiques de solidarité internationale".
- A l'heure des "fake" -
Prof de sciences de la vie et de la Terre (SVT) dans un collège de Tours, Sylvain Caberty constate que les élèves sont souvent "au courant, même s'ils ne relient pas tout".
"Notre rôle est d'apporter des faits scientifiques, pour montrer que ça existe et les impacts auxquels se préparer", explique-t-il, d'autant que "fake news" et théories du complot peuvent s'exprimer, notamment au lycée.
"Entre les tenants de la Terre plate et ceux qui pensent que le réchauffement n'est pas d'origine humaine, parfois, pour réussir à faire admettre les choses, c'est compliqué", dit ce responsable de l'Association des professeurs de biologie et géologie (APBG).
L'enjeu éducatif est tel que l'accord climat de Paris fait dans son article 12 obligation aux Etats signataires d'améliorer l'accès à la formation. Le défi relève tant des SVT que de la physique, l'économie, l'histoire-géo, voire la philosophie...
En France, le climat est présent dans la réforme du lycée, souligne le ministère de l'Education. Mais quand des experts regardent les programmes, l'inquiétude se fait sentir.
"A ce stade, la place accordée au changement climatique apparaît dérisoire: à peu près rien avant la terminale!", se sont insurgés plusieurs centaines de scientifiques tels la climatologue Valérie Masson-Delmotte, dans une lettre publiée par Mediapart.
Un espoir repose sur le cours scientifique commun de terminale (deux heures par semaine), dont le contenu n'est pas tranché.
"On va vers quelque chose comme cela: entre un tiers et une moitié d'année de l'enseignement scientifique de tronc commun en terminale consacrée au changement climatique et les énergies qui y sont liées", indique Pierre Léna, membre du groupe de travail installé par le Conseil supérieur des programmes. "Nous devons remettre notre copie dans quelques semaines. Mais le Conseil devra approuver, et le dernier mot sera au ministère".
- Gare au "catastrophisme" -
Jusqu'ici l'enseignement du climat relève plutôt de bonnes volontés, dit David Wilgenbus, directeur de l'Office for climate education (OCE) qui, installé avec des climatologues à Jussieu, concocte pour les profs des séquences clé en main et des versions vulgarisées des rapports du Giec.
S'il souligne des "initiatives super et isolées d'enseignants", avec des outils de Météo France, du Museum d'histoire naturelle ou de fondations, "du côté de l'institution, le compte n'y est pas", estime ce médiateur scientifique, qui forme des profs depuis 10 ans.
Sylvain Caberty décrit un projet mené avec ses collègues d'histoire, de technologie, de physique: "On part du quartier HLM voisin, avec l'idée d'en faire un écoquartier à la fin de l'année".
Avec ses classes, ils étudient les effets de la fonte de la banquise, travaillent sur les risques propres à leur région (quel impact sur la Loire?): "partir du réel est important".
Pour les spécialistes, il faut s'y mettre dès la primaire.
"Nous avons alors des jeunes très sensibles à ces questions", argue M. Léna. "Comme ils sont souvent dans l'émotion, l'école doit leur donner des éléments d'analyse rationnelle".
Autre écueil en effet pour les profs: "le catastrophisme".
"J'ai entendu des exposés de collégiens qui disaient +il est urgent de quitter la Terre, elle est foutue!+", raconte l'académicien. Il faut "favoriser un esprit critique mais un cœur plein d'espoir", insiste-t-il, évoquant "les forces de la jeunesse et sa capacité d'inventer" des réponses.