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Le Gayic veut supprimer la prime d'éloignement des fonctionnaires d'État


Tahiti, le 29 janvier 2024 - Lors de sa conférence de presse de ce lundi matin, le député Tematai Le Gayic a annoncé déposer une proposition de loi à l'Assemblée nationale visant à supprimer la prime d'éloignement octroyée aux fonctionnaires d'État affectés en Polynésie française. Une prime qui, si elle a eu un sens à l'époque de sa mise en place, n'est plus “nécessaire aujourd'hui”. Lana Tetuanui avait déposé le même texte en 2022... sans succès.
 
“Le peuple mā’ohi est engagé dans un processus de décolonisation et d'accession à l'indépendance et à la pleine souveraineté. Ce processus doit se conjuguer avec une politique d'arrêt progressif du peuplement par la France hexagonale, puissance administrante.” C'est par ces mots que commence l'exposé des motifs du projet de loi que compte déposer, ce lundi soir (mardi matin à Paris) le député Tematai Le Gayic. Le ton est donné.
 
Pourtant, ce texte vise en fait à recontextualiser la pertinence de l'instauration d'une prime pour les fonctionnaires d'État dans un monde qui a changé. En effet, il s'agit ici de supprimer l'indemnité d'éloignement octroyée aux fonctionnaires d'État en Polynésie française, “les expats”, depuis 1950.
 
Une indemnité qui pouvait se justifier à l'époque puisque les déplacements se faisaient “en bateau”, que le coût de la vie était bien plus élevé qu'en métropole et que la Polynésie sortait alors d'une période de “colonie” avec le “début de l'administration d'État en Polynésie”. Il fallait donc rendre cette destination (comme d'autres territoires d'outre-mer d'ailleurs) attractive pour les fonctionnaires d'État qui pouvaient ainsi bénéficier d'une prime correspondant à “cinq mois de traitement brut annuel” à chaque séjour administratif.
 
Mais en 2024, “il n'y a plus de problème de transport, il n'y a plus de problème d'attractivité et l'indexation est l'outil qui répond à la lutte contre la vie chère”, a expliqué ce lundi matin Tematai Le Gayic en conférence de presse. Il veut donc que la Polynésie française sorte de ce dispositif qui peut en revanche toujours convenir selon lui à d'autres collectivités d'outre-mer comme Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon ou Wallis-et-Futuna.
 
Un texte déjà déposé... par Lana Tetuanui en 2022
 
Non seulement le jeune député estime que cette prime n'est “plus nécessaire” aujourd'hui, mais elle crée “un effet d'aubaine" et que la réciprocité n'existe pas. Les fonctionnaires d'État polynésiens ne touchent pas de prime lorsqu'ils exercent en métropole. “Pour Bercy, ce n'est pas le fonctionnaire qui est concerné par la prime, mais le territoire”, a expliqué Tematai Le Gayic.
Le jeune député n'invente rien puisque cette problématique avait déjà été soulevée en 2022 par la sénatrice Lana Tetuanui qui avait alors déposé la même proposition de loi au Sénat.

Mais elle s'était heurtée aux syndicats locaux qui s'y étaient fermement opposés craignant notamment de devoir faire face à une éventuelle pénurie de personnels qualifiés. Ce n'est pas un souci pour Tematai Le Gayic qui en a discuté avec sa collègue députée et fonctionnaire d'État, Mereana Reid Arbelot. Laquelle lui a donné l'exemple des aiguilleurs du ciel (sa profession) pour lesquels il y avait “50 candidats pour un poste avec la prime” et qu'il y en a “10 pour un poste sans la prime”. Les syndicats préféraient que les parlementaires se battent pour trouver une solution afin de faciliter leur mobilité en mettant en place cette fameuse réciprocité. D'autant qu'aujourd'hui, 85% des fonctionnaires d'État travaillant ici sont des Polynésiens.

Il y a donc fort à parier que Tematai Le Gayic se heurte lui aussi à une levée de boucliers des syndicats du Pays qui ne verraient pas d'un très bon œil que l'on touche à leurs acquis. D'autant que les députés de l'Assemblée nationale viennent d'augmenter l'avance des frais de mandat (AFM) des députés de 300 euros par mois...

Rédigé par Stéphanie Delorme le Lundi 29 Janvier 2024 à 16:43 | Lu 5451 fois