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Le CESC adopte son rapport d'autosaisine sur l'emploi des jeunes en Polynésie française

Le CESC regrette qu’aucune instance administrative n’ait été chargée d’assurer la mise en cohérence de l’action de formation avec les besoins de l’économie et les moyens du dispositif de formation professionnelle


Le Président Jean Tama a réuni les membres du Conseil économique, social et culturel de la Polynésie française (CESC) en séance plénière ce matin, mardi 29 octobre 2013, pour adopter le rapport de l’autosaisine de l’institution intitulée « L’emploi des jeunes en Polynésie française : quelle adéquation entre les formations diplômantes et les besoins réels du marché de l’emploi polynésien ».

Extraits du rapport

Liminaire
« Depuis une dizaine d’années, la Polynésie française est plongée dans une crise profonde et durable, à la fois économique, sociale et de confiance. Une tension croissante se fait ressentir sur le marché de l’emploi et le chômage est devenu une préoccupation majeure.
Aussi, la relance de l’activité et la création d’emplois sont rapidement devenues les priorités affichées des politiques publiques de ces dernières années.

La formation est censée constituer un levier d’action privilégié des politiques de l’emploi pour favoriser l’employabilité des individus et les protéger durablement contre le chômage. Les jeunes ne sont pas épargnés, ils constituent le public le plus exposé au risque du chômage.

Le rôle du système éducatif est de former des individus capables de s’insérer et d’évoluer dans ce contexte socio-économique incertain et en évolution perpétuelle.

S’intéresser à l’adéquation entre la formation et l’emploi, c’est « jeter un pont », c’est étudier le lien entre deux extrémités qui vont des parcours de formation jusqu’aux conditions d’insertion professionnelle et sociale. C’est aussi vouloir interroger les finalités du système de formation dans un contexte marqué par une insécurité économique et sociale grandissante.

Peu d’études officielles en Polynésie française nous éclairent véritablement sur le sujet, pourtant au cœur de nombreux enjeux socio-économiques. »

Conclusion

« Le CESC rappelle que la Polynésie française a subi des changements rapides et profonds ces 50 dernières années. L’arrivée du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) a définitivement bouleversé les équilibres économiques et l’organisation sociale.

L’expansion du secteur tertiaire et le développement du salariat ont modifié profondément les perspectives du travail et son organisation. Le diplôme qui n’était d’aucune utilité dans un mode de vie traditionnel, est devenu presque indispensable pour obtenir un emploi.

En 50 ans, la Polynésie est entrée de plein pied dans l’ère de la modernité et de la mondialisation. Exposée à une crise économique sans précédent, qui touche en particulier les jeunes, elle est amenée à repenser son modèle de développement dans un environnement ouvert et en constante mutation.

La promotion de l’emploi et l’amélioration de la formation représentent un enjeu majeur et doivent constituer un des axes de développement stratégique de premier rang.

La charte de l’éducation fixe 2 objectifs : tous les élèves d’une classe d’âge doivent au moins atteindre une certification de niveau 5 (CAP/BEP) et 70% doivent arriver au niveau du baccalauréat (niveau 4) en Polynésie française.

Le CESC déplore avant tout qu’un trop grand nombre de jeunes reste aujourd’hui sans qualification. Ces jeunes suivent des parcours précaires et erratiques, et de ce fait sont plus exposés aux aléas de la conjoncture économique et à l’insécurité sociale. Ce phénomène se traduit par une perte de confiance de notre jeunesse.

La question de l’adéquation entre les formations diplômantes et les besoins du marché de l’emploi n’est qu’une facette du processus d’ajustement sur le marché du travail entre l’offre et la demande. L’adéquation s’opère dans un jeu complexe entre dimension économique et sociodémographique, où interagissent à la fois des facteurs structurels et conjoncturels, des choix individuels et des exigences de régulation publique.

L’insertion professionnelle à l’issue d’un parcours de formation est un enjeu capital. Même si l’adéquation pure et simple n’est pas de mise, le souci d’adapter l’appareil éducatif et le système de formation aux besoins du marché de l’emploi et à ses réalités doit être constant.

A ce jour, la Polynésie n’ouvre pas suffisamment les voies de la réussite aux Polynésiens. En Polynésie française en 2007, 40% des cadres étaient des natifs, contre 28% en 1983. L’ « océanisation » des cadres a donc progressé mais elle se heurte encore au manque de qualifications.

Une partie des étudiants quitte la Polynésie afin de poursuivre leurs études en France ou à l’étranger et ne revient pas, en particulier en raison du manque d’emplois.

L’amélioration des conditions d’insertion professionnelle, la flexibilité et le renforcement de la sécurité des parcours sont des objectifs à atteindre.

Le CESC souhaite que les autorités publiques du pays mobilisent les informations de ce rapport comme moyen d’arbitrage pour éclairer davantage leur politique de l’éducation, de l’emploi et de l’insertion professionnelle.

Le défi consiste à mobiliser et rapprocher l’ensemble des acteurs concernés autour d’objectifs communs dans la perspective d’améliorer et de fluidifier les parcours de formation. L’action publique doit être plus cohérente et s’assurer de l’adéquation entre les moyens donnés et les objectifs assignés.

Le CESC insiste pour que les pouvoirs publics renforcent les actions visant à favoriser l’acquisition des apprentissages fondamentaux dès l’école primaire. La politique éducative doit être cohérente et coordonnée à tous les échelons de la « chaîne » de formation afin de lutter contre l’échec scolaire.

Le Pays doit offrir à chacun la possibilité de nouvelles chances au risque de voir les jeunes décrocheurs ou en échec scolaire s’enfermer dans le renoncement.

Le CESC considère qu’il est temps de redonner confiance et de renouveler le pacte de solidarité avec la jeunesse polynésienne. L’investissement dans l’éducation et la formation est indispensable.

La relance de l’activité économique constitue sans aucun doute la clé qui permettra de redonner de l’emploi à notre jeunesse et un nouveau souffle à notre développement. »

Présenté par mesdames Terainui Hamblin-Ellacott et Raymonde Raoulx en leur qualité de rapporteures, le rapport d’autosaisine a été adopté par 28 voix Pour et 2 Abstentions.

Rédigé par CESC le Mardi 29 Octobre 2013 à 15:56 | Lu 835 fois