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La réduction d'un abattement fiscal en Outre-mer enflamme les débats à l'Assemblée


Paris, France | AFP | jeudi 18/10/2018 - L'Assemblée nationale a voté jeudi la réduction d'un abattement fiscal général en Outre-mer datant de 1960, qui ne profite qu'aux contribuables "les plus aisés" selon le gouvernement, non sans provoquer des débats enflammés dans l'hémicycle.

Cet abattement permet aux ultramarins de réduire leur impôt sur le revenu de 30% dans la limite de 5.100 euros en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion et de 40% en Guyane et à Mayotte dans la limite de 6.700 euros. La mesure adoptée jeudi abaissera ce plafond à 2.450 euros dans le premier cas et à 4.050 euros dans le second pour "davantage de justice fiscale", selon la ministre des Outre-mer Annick Girardin.
Cet avantage avait été créé à l'origine "non pas pour lutter contre la vie chère", mais pour habituer progressivement les populations des DOM à l'impôt, selon Mme Girardin.
La réforme concernera uniquement "50.000 foyers fiscaux, les plus aisés (...) soit 4,34% des foyers fiscaux" dans les collectivités concernées. Les 70 millions d'euros d'économie générés en moyenne par an serviront à alimenter "un fonds d'investissement exceptionnel" utilisé pour la construction notamment "d'écoles et de crèches" sur place, a-t-elle expliqué.
"C'est une petite aventure Robin des Bois puisque nous prenons aux moins modestes pour redistribuer aux plus modestes", a commenté le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin, après avoir essuyé les critiques d'élus d'opposition de gauche comme de droite qui ont demandé en vain la suppression de cette mesure perçue comme "injuste".
C'est "une humiliation", ont dénoncé des élus ultra-marins, dont les députés MoDem Justine Benin et Max Mathiasin ainsi que le président de la délégation aux Outre-mer à l'Assemblée Olivier Serva (LREM).
"Ne jouez pas aux apprentis sorciers avec cette réforme", a lancé ce dernier. "Nous ne sommes nullement des enfants gâtés de la République", a renchéri Mme Benin, "choquée par la brutalité" de la réforme.
François Ruffin (LFI) a trouvé "choquant" que la mesure ne soit "applaudie que par des élus métropolitains" qui veulent "faire le bonheur des citoyens ultra-marins malgré eux."
"M. Ruffin, c'est votre anniversaire. Je vais vous faire un cadeau, une phrase d'un grand poète français (Charles Péguy):+Le triomphe des démagogies est éphémère mais les ruines sont éternelles+", a répliqué Gérald Darmanin.
Dans la foulée, les députés ont voté la suppression de la "TVA non perçue récupérable" (TVA-NPR), qui s’applique en Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion. Mme Girardin a expliqué que ce dispositif, destiné à compenser le coût du transport occasionné par l'éloignement insulaire, n'était "pas lisible, pas transparent". Un délai sera néanmoins accordé pour les opérations déjà engagées.
En Martinique, les 34 maires ont rendu publique jeudi une motion contre ces mesures "qui vont impacter le pouvoir d'achat des ménages", jugeant "parfaitement injuste et scélérat que l'on demande à des populations d'autofinancer par leurs propres moyens les infrastructures dues par l'Etat à des populations qui mesurent encore les écarts énormes de développement avec l'ensemble du territoire".

le Vendredi 19 Octobre 2018 à 06:18 | Lu 737 fois