Tahiti Infos

La production de crédit locale continue sa chute libre


Tahiti, le 5 décembre 2024 - La machine à crédit polynésienne continue de patiner : entre des entreprises qui hésitent à investir et des ménages toujours plus prudents avec leurs économies, la production de crédits a chuté de 23,3% au troisième trimestre 2024.

 
L'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) a dévoilé ce mercredi, les chiffres de la production de crédits au Fenua, pour le troisième semestre de cette année. Une production qui a plongé de 23,3% par rapport à la même période l’an dernier, pour s’établir à un maigre 41,3 milliards de francs. En cumul sur les neuf derniers mois, le tableau n’est guère plus reluisant avec une contraction de 19,2% par rapport à 2023, culminant ainsi seulement à 113,4 milliards francs. Les chiffres du deuxième trimestre, qui étaient déjà inquiétants, demeurent donc en perte de vitesse.

Particuliers : des crédits au régime minceur

Côté ménages, les crédits résistent tant bien que mal avec une baisse contenue à 4,8% sur le trimestre, atteignant 18,1 milliards de francs. Mais derrière cette “résilience”, des tendances divergentes se dessinent. Les crédits à l’habitat, généralement stars du segment, accusent un recul de 7,9%. Les ménages polynésiens hésiteraient-ils à poser la première pierre de leur futur palace face à une conjoncture qui leur donne envie de rester locataires ?
 
À l’inverse, les prêts à la consommation progressent de 4,6%, signe que les besoins immédiats, pour boucler les fins de mois, mobilisent les finances des foyers. Reflet d’un quotidien qui devient toujours plus coûteux. Apparemment, il semble plus fréquent d’emprunter pour son caddie que pour sa maison.
 
Aussi, les “autres crédits” – fourretout désignant l'ensemble des types de crédit restant pouvant être attribué aux particuliers – accusent un recul spectaculaire de 36,3%. En somme, les ménages jouent l'extrême prudence.

Sociétés non financières : la descente aux enfers

Le vrai drame se joue cependant chez les sociétés non financières (SNF). Avec une production de crédit en chute libre (-34,5% sur un an, soit 22,23 milliards de francs), le constat est implacable. Les crédits d’équipement, vitaux pour les investissements structurants, s’effondrent de 53,5%. Autrement dit, les entreprises préfèrent remettre à plus tard leurs projets de développement et de modernisation. Même les crédits immobiliers (-6,7%) et les financements de trésorerie (-4,4%) peinent à remonter la pente, bien que ces derniers aient eu un sursaut au trimestre précédent (+22,6%). Ce ralentissement généralisé traduit, comme pour les ménages, une extrême prudence des entreprises.
 
Heureusement, une éclaircie existe dans ce marasme : les crédits accordés aux petits entrepreneurs polynésiens augmentent, avec une progression de 5,7% (1,03 milliard de francs).

Des taux directeurs à la rescousse ?

Face à cette panne sèche, l’IEOM avait annoncé, fin septembre, jouer les chevaliers blancs en baissant ses taux directeurs de 0,25 % fin septembre, à l’instar de la Banque centrale européenne. L’objectif : rendre le crédit plus accessible et, espérons-le, donner un petit coup de fouet à l’investissement et à la consommation. Cependant, si cette mesure est susceptible d’encourager certains acteurs à repartir à l’assaut du crédit et à investir, elle n’effacera pas d’un coup de baguette magique les incertitudes qui semblent plomber l’économie polynésienne. Le prochain trimestre nous le dira, avec ou sans fanfare.

Rédigé par Thibault Segalard le Jeudi 5 Décembre 2024 à 17:19 | Lu 1689 fois