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La demande de 2,5 milliards d'EDT au Pays retoquée


Tahiti, le 11 mars 2020 - Le tribunal administratif a retoqué mardi la demande de la société EDT-Engie visant à condamner le Pays au versement de 2,5 milliards de Fcfp pour un manque à gagner entre 2016 et août 2019 dû à la fluctuation du prix des hydrocarbures.

Le tribunal administratif de Papeete a rejeté mardi le recours d'EDT-Engie datant de 2017 qui demandait au Pays de l'indemniser pour son manque à gagner sur la concession Tahiti-Nord ces quatre dernières années. Malgré la signature d'un accord EDT-Pays début 2019 sur une dette du Pays de 1,85 milliard de Fcfp, la société chargée de la fourniture d’énergie sur Tahiti-Nord demandait toujours la condamnation du Pays à lui verser au total 2,5 milliards de Fcfp pour ce manque à gagner constaté entre mars 2016 et août 2019. Une situation comptable qu’elle attribue à un "bouleversement de l’économie du contrat", lié à la fluctuation de sa charge hydrocarbure. Le tribunal administratif a pourtant rejeté cette requête en estimant que la "société requérante, qui ne soutient pas avoir subi un déficit d’exploitation, ne justifie pas d’un bouleversement de l’économie du contrat tel qu’il permette l’octroi d’une indemnisation de la part de l’administration cocontractante".

Le rééquilibrage de l’économie du contrat de concession que tente d’obtenir EDT-Engie se trouve en fait empêché par les propres termes de son contrat de concession pour le tribunal administratif. Cet accord prévoit depuis 2015 la création d’un "fonds de péréquation et de solidarité tarifaire de l’électricité sur tout le territoire de la Polynésie française" et en attendant l'application d'"une grille tarifaire temporaire", fixée par le Pays pour établir le prix de l’électricité payé par le consommateur.

Car le modèle économique de la concession de fourniture de l’électricité sur Tahiti-Nord, exploitée par la société Electricité de Tahiti (aujourd’hui EDT-Engie) depuis 1960 a profondément été modifié en décembre 2015 avec l'avenant 17. Un avenant qui avait notamment redéfini la formule de calcul du tarif de l’électricité, fixé par le Pays, en fixant un "revenu autorisé" pour le concessionnaire, calculé en tenant compte d’un "revenu d’exploitation" et des "coûts d’énergie", c'est-à-dire les dépenses réelles engagées par le concessionnaire pour sa fourniture en hydrocarbures.

Consécutivement, EDT-Engie était sortie, le 1er mars 2016, du Fonds de péréquation du prix des hydrocarbures (FRPH) qui lui garantissait jusqu’alors une fourniture en énergie fossile à prix stable. Le même jour, avec l’avenant 17b, une nouvelle grille tarifaire de l’électricité était entrée en vigueur. Le problème pour EDT-Engie réside dans l’article 1er de cet avenant qui stipulait que cette "grille tarifaire temporaire" serait la référence "de sorte à couvrir le revenu autorisé du Concessionnaire sur l’ensemble de ses concessions actuelles" et "jusqu’à l’entrée en vigueur d’un dispositif réglementaire de péréquation et de solidarité tarifaire de l’électricité sur tout le territoire de la Polynésie française, tel que visé en préambule (…)".

Or ce dispositif de péréquation n’a toujours pas vu le jour en 2020. Et "à supposer que la société EDT ait entendu se prévaloir de la responsabilité de la puissance publique à raison de promesses non tenues, elle ne peut utilement invoquer un tel terrain de responsabilité extracontractuelle dès lors qu’elle est liée à la Polynésie française par un contrat", a conclu mardi le tribunal administratif en douchant les espoirs d’EDT-Engie.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 11 Mars 2020 à 14:36 | Lu 2414 fois