Tahiti Infos

La colère sur le paraquat, un pesticide, cristallise la crise agricole


Selon un rapport de 2011 du département de la protection des végétaux (issu du Ministère de l'économie rurale), la Polynésie française a importé cette année-là 156 tonnes de différentes substances de pesticides. Le paraquat était en tête avec 54 tonnes. Les herbicides représentaient alors 48% des pesticides importés sur le territoire.
Selon un rapport de 2011 du département de la protection des végétaux (issu du Ministère de l'économie rurale), la Polynésie française a importé cette année-là 156 tonnes de différentes substances de pesticides. Le paraquat était en tête avec 54 tonnes. Les herbicides représentaient alors 48% des pesticides importés sur le territoire.
PAPEETE, le 24 février 2015. Le ministre de l'agriculture est sous la pression depuis une dizaine de jours des agriculteurs. En cause, la question du possible retrait d'un herbicide (le paraquat) très largement utilisé sur le territoire. Un conflit qui traduit un manque de communication. Vendredi dernier, le ministre de l'agriculture a adressé aux rédactions locales le texte d'un droit de réponse. Frédéric Riveta tentait d'éteindre l'incendie allumé par la proposition de la commission des pesticides de retirer l'autorisation concernant le paraquat (ou Gramoxone, sous son nom commercial). Le 12 février, la commission des pesticides-à laquelle participent des représentants des agriculteurs- a rendu "à la majorité de ses membres, un avis favorable au retrait de cette substance active de la liste des pesticides autorisés en Polynésie française" précise le texte du communiqué officiel.

En raison de la colère du monde agricole qui s'est exprimée largement depuis sur les plateaux de télévision, le ministère parait tenté de ne pas aller au bout de sa démarche. Le texte du droit de réponse ministériel rappelle que la commission des pesticides émet seulement un avis "et que la décision de retrait appartient au gouvernement de la Polynésie française. A ce jour, aucune décision n'a été prise dans un sens ou un autre".
Cette crise agricole sur fond de paraquat semble démontrer un malaise plus profond. Après deux ministres successifs directement concernés par les problématiques agricoles, le dialogue a plus de mal à s'instaurer entre les professionnels et Frédéric Riveta nommé en septembre. Aussi la crise du paraquat (qui n'est pas terminée) aura eu au moins le mérite de renouer le dialogue.


Questions à Abel Iorss, président de la fédération des syndicats agricoles Te Rima Hotu Rau

Abel Iorss, président de la Fédération Te Rima Hotu Rau.
Abel Iorss, président de la Fédération Te Rima Hotu Rau.
Depuis quarante ans qu'il est agriculteur, Abel Iorss utilise le paraquat (ou Gramoxone, qui est le nom commercial) comme produit désherbant. Pour lui, cet herbicide a toujours été utilisé en Polynésie française. L'avantage réside dans son coût modeste comparé à d'autres produits, et au fait qu'il est non systémique. Il détruit l'herbe qu'il faut enlever par contact et se dissipe immédiatement. Il ne se transmet pas ensuite à la plante cultivée ni à ses fruits.
Les agriculteurs polynésiens préfèrent donc ce type de produits –bien adapté au climat tropical- à d'autres, dont l'action serait moins sélective. Si le paraquat a été retiré du marché européen depuis 2007, il est encore vendu dans plusieurs dizaines de pays.

Tahiti Infos : pourquoi vous mobilisez-vous autant pour conserver ce produit dans la liste des substances autorisées en Polynésie française ?

Abel Iorss : Pour le moment nous n'avons que ce produit comme herbicide efficace. On ne connaît pas d'alternative. Le problème surtout c'est la méthode. On n'a pas été informé au préalable, avant cette commission des pesticides qu'il y avait une volonté de retrait de ce produit. Ce qu'on dénonce avant tout c'est un manque d'information, de communication du ministère de l'agriculture avec les producteurs directement concernés. Et puis, il faut arrêter de diaboliser ce produit : il y a eu quelques accidents par ingestion volontaire il y a une dizaine d'années. Mais, il n'a pas d'effet secondaire pour les consommateurs car il ne se transmet pas à la plante. Enfin, de nombreux pays l'utilisent encore, il n'est pas du tout interdit dans le monde entier.

Vous connaissez néanmoins la dangerosité du produit pour celui qui pulvérise le produit et il y a une étude mettant en relation ce produit et la maladie de Parkinson chez les agriculteurs…

Bien sûr nous le savons. C'est pourquoi l'utilisation de ce produit est réservée uniquement aux professionnels. Pour acheter le produit qui est soumis à une réglementation, il faut avoir une carte professionnelle d'agriculteur délivrée par le SDR (service de développement rural). On sait que c'est très dangereux et qu'il faut manipuler ces produits avec précaution. Nous ce que nous disons c'est que les agriculteurs doivent réellement être formés à l'utilisation des produits, rappeler qu'il faut se protéger avec des combinaisons spéciales, savoir précisément comment le diluer avant de pulvériser. C'est sur ces choses-là que nous voudrions travailler avec le ministère, sur l'information et la formation.

Pesticides : quelles précautions en Polynésie française ?

La loi du Pays sur les pesticides adoptée en juillet 2011 a institutionnalisé certaines réglementations préexistantes sur l'utilisation des ces produits sur le territoire. Répertoriés en différentes catégories (extrêmement dangereux, très dangereux, modérément dangereux, peu dangereux), les produits pesticides autorisés sont tous nommés (via la substance active ou la préparation commerciale) avec parfois des restrictions d'utilisation. Certaines préparations sont réservées à l'agriculture –ou au contraire exclues d'un usage agricole-, d'autres sont réservés à certaines étapes de la vie d'une culture ; d'autres encore ne sont autorisées que pour lutter contre la lutte aviaire. L'utilisation de certains produits est réservée au SDR (service du développement rural).

La dernière actualisation complète de cette liste date du 27 juin 2014. Il est à noter que dans la catégorie des produits extrêmement dangereux, le paraquat n'y figurait pas ! Un correctif est publié début juillet pour le faire figurer à nouveau, alors que l'importation de cette substance –dont l'utilisation est réservée aux professionnels – avait été jusque-là systématiquement renouvelée. Même après 2007, et l'interdiction de commercialisation de ce produit en Europe, le paraquat a continué d'être vendu sur le territoire. Dans son "droit de réponse", le ministre de l'agriculture rajoute les résultats d'une étude de l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) de 2013 démontrant "un lien entre l'usage du paraquat et la maladie de Parkinson chez les agriculteurs" qui justifie sans doute de se poser à nouveau la question de son autorisation en Polynésie.

Le ministre de l'agriculture se veut toutefois rassurant à l'égard des consommateurs. Selon la dernière campagne d’analyse de résidus de pesticides, réalisée entre septembre et octobre 2014, 97% des échantillons testés étaient conformes à la réglementation polynésienne. Au total les analyses de recherche de résidus de pesticides ont été menées sur 66 produits locaux et 14 produits importés.

Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 24 Février 2015 à 15:41 | Lu 2981 fois
           



Commentaires

1.Posté par Lou le 24/02/2015 17:19 | Alerter
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Lorsqu'on lit ça, on n'a plus envie d'acheter local. Quand les agriculteurs et les pouvoirs publics comprendront-ils que l'avenir appartient aux produits bio. Aussi bien pour vendre aux résidents que pour les touristes. Imaginez l'effet du slogan "Tahiti destination verte". Agriculteurs, regroupez-vous pour fabriquer des produits de traitement inoffensifs, il vous reviendront moins cher.
Supplique aux producteurs bio: s'il vous plait, organisez des marchés dans toutes les communes, et faites-le savoir. Merci.

2.Posté par d''''''''''''''''ou vient le vent???? le 24/02/2015 18:05 | Alerter
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Riveta ou la girouette qui anticipe le changement du vent!!!!!! tdc va!!!

3.Posté par Kobe le 24/02/2015 18:34 | Alerter
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Le paraquat n'est pas un herbicide mais un défoliant... Les agriculteurs locaux l'adore parce que tout est jaune le lendemain de la pulvérisation mais les bulbes ou les rhizomes des mauvais herbes ne sont pas atteints et très vite çà repousse. Des herbicide plus efficaces et moins dangereux existent. Les agriculteurs locaux ne les aiment pas parce qu'il faut attendre une semaine parfois avant de constater l'efficacité.

4.Posté par Noel Flantier le 24/02/2015 19:32 | Alerter
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L'avenir est dans le bio, pas dans le paraquat.
Vous faites fausse route, les gars, et vous risquez de vous retrouver sur le bord du chemin, car vous êtes en décalage avec un nombre croissant de conssomateurs.
.


5.Posté par beaulieu le 25/02/2015 07:17 | Alerter
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Le manque d'information et de formation au nouveaux produits, beaucoup plus efficaces et moins dangereux pour la santé que le Paraquat est à l'origine de la grogne.
Les agriculteurs devraient pourtant savoir que l'avenir n'est pas aux pesticides et défoliants. Difficile en Polynésie d'amener tout le monde à réfléchir, les esprits sont souvent bornés.

6.Posté par claudius le 25/02/2015 08:23 | Alerter
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Il existe des désherbeurs thermiques qui, en chauffant les plantes les font mourir, et ce n'est pas toxique

7.Posté par Piripirifaufau le 25/02/2015 08:31 | Alerter
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C'est vrai que ça repousse deux fois plus vite après, d'où le nombre de pulvérisations (et pas valable si petite flotte juste après, on en remet), tout ça par flemme d'utiliser des méthodes "manuelles" désherbage genre débroussailleuse ou à la main. En plus cela fait bien les affaires du seul vendeur de la place qui se remplis les poches sans états d'âme et sans chercher des solutions alternatives dont il se fiche.

8.Posté par ROD le 25/02/2015 08:40 | Alerter
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une poignet de cultivateur veulent continuer à nous empoisonner avec des produits hyper nocifs,
alors lâchée les importations et on verra bien ce que les consommateurs choisirons,
une grosse et belle salade bio en métropole vaut 100 f et ici les salades moche, petites et pas bio valent plus du triple alors arrête de prendre les clients pour des idiots.
mais le gouvernement ne doit pas lâchée sur cette affaire, qu'ils fassent grève s'il veulent, nous on aura des bons produits importés, moins chères et en plus qui paye de la TVA et des droits d'importations ce qui rapporte au pays au moins !!!

9.Posté par simone grand le 25/02/2015 10:01 | Alerter
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Traitons autrement notre agriculture
Promouvons le bio

10.Posté par Popoti le 25/02/2015 12:36 | Alerter
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On veux bien consommer local à condition de ne pas être empoisonné par toutes ses saloperies : défoliant, herbicide, ect...

D'autre part, tous ses produits finissent dans les lagons par ruissellement ou dans les nappes phréatiques.

L'écologie ne doit rester un vain mot. Alors interdisez l'importation de ce produit et de tous ses dérivés.

Et vive le bio.

11.Posté par happy feet le 25/02/2015 12:52 | Alerter
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Que l'on m'explique comment un pesticide qui va forcément rentrer en contact avec le sol ( même s'il se dissipe très vite ! ) n'atteindra pas la plante qui développe pourtant ses racines dans ce même sol ?
Ah , peut-être que les racines ont développé une forme d'auto-défense pour se prémunir des produits toxiques ou alors peut-être que les troncs ou les tiges sont dotés d'une grande intelligence pour stopper les attaquants afin de protéger fruits et légumes ?
Ce doit être quelque chose comme ça ?
Il faut arrêter de prendre les consommateurs pour des c...!
Notre avenir est dans le bio .

12.Posté par honugirl le 25/02/2015 13:35 | Alerter
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"le gramoxone se dissipe immédiatement..." Ah! Oui! Et où? dans la riviere qui va vers la mer...
C'est pas dangereux mais il faut mettre des combinaisons étanches pour le déverser...
Monsieur le ministre, ne cédez pas! L'avenir est sans gramoxone.
Les agriculteurs doivent le comprendre, ne sont-ils pas les gardiens de la nature? J'ai quand même pas tout faux avec cette idée-là!
S'il vous plait, produisez-nous des salades bio, des choux bio, des concombres bio!

13.Posté par therese DELFEL le 26/02/2015 00:40 | Alerter
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Je vois avec un certain soulagement de nombreux commentaires s'alarmant de l'usage du paraquat, très toxique, interdit dans l'UE depuis ... 2007 (!?) et des appels à cultiver en bio et à organiser des marchés bio. Oui, dès 2006, je me suis évertuée à le faire comprendre (à travers l'association Les Iles De Nos Enfants notamment), la Polynésie se détruit elle-même en copiant ce qui est déjà dépassé en Europe et pire, en le transposant à des milieux aussi vulnérables que les îles. Ces pesticides-herbicides et autres "ICIDES" = QUI TUENT, poursuivront leur travail de sape du vivant sur des décennies. Par pitié les agriculteurs et les particuliers, arrêtez de vous saboter vous-mêmes en détruisant même l'avenir des enfants qui ne pourront bientôt plus trouver un seul endroit non pollué, pour cultiver en bio justement. Respectez votre Fenua dont vous n'êtes que locataire et dont il y a lieu d'être vraiment fier !

14.Posté par Nicolas le 26/02/2015 11:14 | Alerter
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Cela fait plaisir de voir autant de commentaire en faveur d'une agriculture responsable.
Les agriculteurs constatent un problème de communication entre le gouvernement et le secteur, ce que je vois c'est un manque de communication entre les agriculteurs et les consommateurs !
Sans être des experts nous sommes de plus en plus sensibles aux danger de l’agriculture intensive et l'usage des pesticides, or les agriculteurs industriels et leurs représentants ne montrent quasi aucun attrait pour ce type d’agriculture le balayant de la main sous prétexte que ce n'est pas possible dans notre contexte. Cela est vrai si on conserve les pratiques actuelles. Il faut amorcer un changement plus profond. Continuons à faire connaître nos exigences, nous avons le pouvoir de faire changer les choses progressivement en sélectionnant ce que nous choisissons d'acheter, ou pas !
Les organismes qui font bouger le fenua, et dans le bon sens :
* www.colibris-tahiti.org > Devenez vous aussi un Colibri pour « faire sa part » !
* www.alternatiba-tahiti.org > Le Village des Acteurs du changement et des solutions alternatives
* www.2dattitude.org > L'association polynésienne du développement soutenable
* www.fedescol.org > Le réseau fédératif des initiatives scolaires en matière de développement durable

15.Posté par emere cunning le 27/02/2015 21:25 | Alerter
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J'espère aussi que notre ministre tiendra bon.
Mais j'aimerais surtout comprendre comment on peut encore vendre à nos agriculteurs ce produit alors qu'il est interdit sur les marchés de France et d'Europe. J'ai bien l'impression qu'ils nous refile toutes leurs saloperies (comme celles qui ont pollué les bananeraies des Antilles pour quelques décennies) dont ils n'en veulent plus chez eux.

16.Posté par Popoti le 02/03/2015 12:10 | Alerter
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@ Emere,

Renseigne toi sur les membres qui compose le comité bien local qui permet l'importation de ses saletés.
Oui, renseigne toi, tu auras des surprises .