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La Punaru'u est "l'exemple de ce qu'il ne faut plus faire"


Le lit de la Punaruu, à sec. Grâce à la thèse de doctorat de Matthieu Aureau, la Punaru'u est aujourd'hui la rivière la plus équipée de Tahiti  pour suivre l'hydrologie du cours d'eau avec des appareils de mesure placés en divers sites de la vallée, particulièrement des sondes sur les forages (Photo Céline Advocat prise en décembre 2013).
Le lit de la Punaruu, à sec. Grâce à la thèse de doctorat de Matthieu Aureau, la Punaru'u est aujourd'hui la rivière la plus équipée de Tahiti pour suivre l'hydrologie du cours d'eau avec des appareils de mesure placés en divers sites de la vallée, particulièrement des sondes sur les forages (Photo Céline Advocat prise en décembre 2013).
PAPEETE, 13 octobre 2014 - La rivière Punaru'u n'a jamais été autant sous les feux de l'actualité : après les travaux pour le livre blanc de la rivière Punaru'u l'an dernier, la création d'un comité de gestion il y 15 jours au sein de la commune, une thèse de doctorat a été publiée sur la modélisation numérique des écoulements des eaux souterraines. On y parle aussi des extractions abusives dans le lit de la rivière.

On ne retrouvera plus la Punaru'u dans son état naturel. Quoi que l'on pourra envisager à présent pour sauvegarder ce qui peut l'être dans ce bassin naturel, la pression des activités humaines a été bien trop importante au cours des 45 dernières années pour prétendre à autre chose désormais que des actions à la marge. Pour autant, la Punaru'u doit servir de prise de conscience pour toutes les autres rivières de Tahiti. "C'est l'exemple de ce qu'il ne faut plus faire" témoigne Matthieu Aureau, l'auteur de la thèse de doctorat sur la modélisation des écoulements des eaux souterraines. L'exploitation des graviers de la rivière démarre de façon excessive au début des années 1960 : il faut construire l'aéroport, les routes : à la Punaru'u les cailloux sont à proximité, la surexploitation commence. "Dans les années 1980, il y a eu des études très bien documentées expliquant qu'on peut exploiter la rivière mais sous certaines contraintes" mais elles ne seront pas suivies, pas plus d'ailleurs que ne sont respectés les débits réservés des captages en amont, fixés par le Code de l'environnement.

Au bout du compte, en aval la Punaru'u n'a plus rien à voir avec une rivière. Avec ses berges bétonnées on pourrait croire à un canal à ciel ouvert ; vers l'embouchure, le lit est quasiment toujours à sec, sauf lors des gros épisodes pluvieux. "La rivière est très dégradée en surface et sur les 15 premiers mètres du sous le sol. La rivière n'existe plus en écoulement de surface, mais à 20 mètres de profondeur on trouve des nappes phréatiques bien protégées" poursuit Matthieu Aureau. L'eau se cache désormais dans les profondeurs et a trouvé d'autres cheminements moins exposés aux pressions des hommes.

Faute d'avoir été protégée durant des décennies, la Punaru'u peut aujourd'hui de contre exemple presque parfait. Alors que l'on reparle très régulièrement des extractions de matériaux en rivières pour les grands chantiers à venir, Mathhieu Aureau estime que "la discussion doit être globale et à l'échelle de l'île de Tahiti". L'exploitation des agrégats des rivières pourrait être envisagée d'abord dans les zones où la pression anthropique a déjà exécuté son œuvre destructrice "pour préserver à la fois les enjeux environnementaux, sociétaux et économiques avec des contraintes à respecter très fortes". Reste à ouvrir publiquement ce débat.


Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 13 Octobre 2014 à 17:01 | Lu 3283 fois