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L'océanographie du futur? Des "citoyens bleus" au service de la planète


L'océanographie du futur? Des "citoyens bleus" avides de contribuer à une meilleure connaissance des océans, sillonnant les mers à bord de leurs voiliers et réalisant au passage observations, mesures et collectes pour le plus grand bonheur des chercheurs. 

"On va vraiment vers une océanographie citoyenne, j'en suis persuadé", assure à l'AFP Colomban de Vargas, directeur de recherche au CNRS et à l'origine du premier programme d'océanographie biologique citoyenne au monde baptisé Plankton Planet.

Les opérations de sciences participatives, qui visent à inciter le public à collecter des données dans le cadre d'une démarche scientifique, se développent depuis quelques années.

Actuellement, il existe en France près de 200 projets, aux échelles nationales et locales pour la faune et la flore, les espèces terrestres et marines, selon le Collectif national sciences participatives (CNSP).

Cependant, en mer les observations sont plus difficiles à obtenir, notamment loin des côtes, d'où, désormais, les appels à la population.

"Le mouvement est assez récent, mais il s'intensifie", assure à l'AFP Patrick Poupon, directeur du Pôle mer Bretagne Atlantique, qui fédère un réseau de plus de 300 membres, entre grands groupes, PME et centres de recherche et de formation. 

Parmi ceux-ci, l'entreprise SailingOne a développé le programme OceanoScientific, labellisé par le pôle dans le cadre d'un consortium privé-public pour répondre aux besoins de la communauté scientifique internationale dans le domaine du changement climatique.

Il s'agit de lui fournir, à titre gratuit, des données nécessaires à l'étude des propriétés physiques et biochimiques de l'interface océan-atmosphère, dans les zones maritimes peu ou pas explorées. Comment? En mettant à disposition des coureurs au large et des plaisanciers au long cours un matériel d'acquisition et de transmission automatiques --par satellite-- d'une douzaine de paramètres, un développement sans équivalent au niveau mondial.

 

-"démultiplication de l'effort" -

 

"Il y a un effet de ciseau redoutable: d'un côté les instituts scientifiques ont de moins en moins de moyens et de l'autre le phénomène du changement climatique prend une telle ampleur et fait peser de tels risques sur l'humanité qu'il est primordial de mieux le comprendre, voire de l'anticiper", explique le Normand Yvon Griboval, à la tête de SailingOne.

Les océans, considérés comme le thermostat de la planète, jouent un rôle central dans la régulation et le contrôle des grands équilibres naturels du globe. "Les sciences participatives sur les océans vont se développer, c'est une évidence", conclut-il.

La première campagne OceanoScientific devrait démarrer à l'automne autour de l’Antarctique avec l'installation de ce matériel unique à bord d'un voilier de course de 16 mètres, avant un déploiement sur d'autres bateaux de course au large, mais également, dès 2017, sur des voiliers de simples plaisanciers.

"Ce qui est incroyable avec les sciences participatives, c'est la démultiplication de l'effort d’échantillonnage et là ça peut être vraiment exceptionnel parce qu'on peut faire des choses qu'on ne pourra jamais faire en restant dans nos laboratoires", s'enthousiasme Colomban de Vargas, soulignant le faible coût de ces opérations par rapport à l'exploitation d'un navire océanographique pouvant avoisiner les 30.000 euros par jour, parfois même davantage. 

Un grand pas en avant dans la connaissance des océans a été réalisé entre 2009 et 2013 avec l'expédition Tara Océans, plus grand programme d'océanographie à la voile. Cependant, les échantillons de plancton récupérés lors des deux tours du monde effectués par la goélette proviennent de "seulement" 220 sites, note Colomban de Vargas, estimant que "c'est extrêmement peu pour la taille des océans" et disant compter sur les "citoyens bleus" pour faire significativement avancer l'océanographie.

"On s'intéresse à ce qui se passe dans un univers qu'on aime beaucoup et qu'on essaie de préserver et c'est toujours sympa de se dire qu'on met une petite pierre à l'édifice de l'océanographie", confirme Nicolas Fabbri, parti l'été dernier trois mois au-delà du cercle polaire arctique avec son épouse et ses quatre jeunes enfants sur un voilier de moins 10 mètres équipé d'un kit pour récolter du plancton.

Avec AFP


Rédigé par RB le Lundi 29 Février 2016 à 04:22 | Lu 232 fois