Les chercheurs Jean-Marc Regnault et Jean-François Sabouret ont animé ce colloque donné au CNRS en début de semaine à Paris
PARIS, 15 septembre 2015 - Le CNRS à Paris a accueilli durant deux jours un colloque sur le thème de "L’Océanie convoitée" pour décortiquer les enjeux et la nouvelle place de la région dans la géopolitique mondiale.
Avec le basculement de la stratégie américaine vers le Pacifique, l’influence grandissante de la Chine et la perspective future de l’exploitation des ressources minérales sous-marines, l’Océanie a de quoi attirer toutes les convoitises. Alors, le thème du colloque organisé lundi et mardi au CNRS (Centre national de recherche scientifique) par les chercheurs Jean-Marc Regnault et Jean-François Sabouret, est tombé comme une évidence. "C’est presque quotidiennement qu’on apprend que tel ou tel pays d’Asie, d’Europe ou d’Amérique a une visée quelconque sur la région… ou qu’on apprend que tel ou tel gouvernement d’Océanie souhaite des investissements étrangers", constate le premier. Le géographe Fabrice Argounès rappelle que l’océan est souvent perçu comme "l’Amazonie des cinquante prochaines années", pour ses promesses en matière de découvertes scientifiques. Car c’est bien en raison du réchauffement climatique mais aussi de leurs ressources naturelles, que les Etats insulaires du Pacifique se retrouvent au centre d’un jeu diplomatique complexe.
L’Union européenne a développé le Deep sea mineral project pour aider quinze Etats insulaire du Pacifique à élaborer une législation relative à l’exploitation de leurs ressources sous-marines qui soit conforme aux normes internationales et respectueuses de l’environnement. L’Europe dépend de l’extérieure pour son approvisionnement en ressources minérales. Il s’agit là d’un exemple de "soft power" qui pourrait lui permettre, selon la chercheuse Sabine Lavorel, "d’acquérir une influence dans la région et du coup de nouer des contacts pour, par la suite, envisager des liens commerciaux".
A l’inverse les Etats insulaires doivent convaincre d’autres grandes puissances pour assurer leur propre survie face au réchauffement climatique. Nathalie Mrgudovic souligne "l’attitude arrogante" du Premier ministre australien lors du dernier Forum des îles du Pacifique qui a refusé d’approuver un objectif ambitieux de limiter la réchauffement de la planète à 1,5 degré, comme le souhaitaient les petits Etats insulaires. Christian Lechervy, ambassadeur et représentant permanent de la France auprès de la communauté du Pacifique, s’interroge sur l’attitude à adopter vis-à-vis de l’Australie et de la Novuelle-Zélande, "alors qu’ils sont contestés dans leur océanité", mais tout en rappelant que ces deux pays apportent une part écrasante du financement des institutions régionales.
Comme l’écrivait déjà le penseur tongien Epeli Hau’ofa il y a une vingtaine d’années, et abondamment cité par Jean-Marc Regnault, l’Océanie devra s’unir pour faire face au défi de la montée des eaux. Nathalie Mrgudovic rappelle d’ailleurs que le Pacific Islands Development Forum a été créé pour contredire "la domination des grandes puissances" au sein du FIP et pour développer une économique durable et promouvoir le leadership insulaire. La conférence mondiale sur le climat en décembre à Paris sera un test d’envergure pour savoir si la voix des Océaniens porte suffisamment loin pour être entendue sur la scène internationale.
Avec le basculement de la stratégie américaine vers le Pacifique, l’influence grandissante de la Chine et la perspective future de l’exploitation des ressources minérales sous-marines, l’Océanie a de quoi attirer toutes les convoitises. Alors, le thème du colloque organisé lundi et mardi au CNRS (Centre national de recherche scientifique) par les chercheurs Jean-Marc Regnault et Jean-François Sabouret, est tombé comme une évidence. "C’est presque quotidiennement qu’on apprend que tel ou tel pays d’Asie, d’Europe ou d’Amérique a une visée quelconque sur la région… ou qu’on apprend que tel ou tel gouvernement d’Océanie souhaite des investissements étrangers", constate le premier. Le géographe Fabrice Argounès rappelle que l’océan est souvent perçu comme "l’Amazonie des cinquante prochaines années", pour ses promesses en matière de découvertes scientifiques. Car c’est bien en raison du réchauffement climatique mais aussi de leurs ressources naturelles, que les Etats insulaires du Pacifique se retrouvent au centre d’un jeu diplomatique complexe.
L’Union européenne a développé le Deep sea mineral project pour aider quinze Etats insulaire du Pacifique à élaborer une législation relative à l’exploitation de leurs ressources sous-marines qui soit conforme aux normes internationales et respectueuses de l’environnement. L’Europe dépend de l’extérieure pour son approvisionnement en ressources minérales. Il s’agit là d’un exemple de "soft power" qui pourrait lui permettre, selon la chercheuse Sabine Lavorel, "d’acquérir une influence dans la région et du coup de nouer des contacts pour, par la suite, envisager des liens commerciaux".
A l’inverse les Etats insulaires doivent convaincre d’autres grandes puissances pour assurer leur propre survie face au réchauffement climatique. Nathalie Mrgudovic souligne "l’attitude arrogante" du Premier ministre australien lors du dernier Forum des îles du Pacifique qui a refusé d’approuver un objectif ambitieux de limiter la réchauffement de la planète à 1,5 degré, comme le souhaitaient les petits Etats insulaires. Christian Lechervy, ambassadeur et représentant permanent de la France auprès de la communauté du Pacifique, s’interroge sur l’attitude à adopter vis-à-vis de l’Australie et de la Novuelle-Zélande, "alors qu’ils sont contestés dans leur océanité", mais tout en rappelant que ces deux pays apportent une part écrasante du financement des institutions régionales.
Comme l’écrivait déjà le penseur tongien Epeli Hau’ofa il y a une vingtaine d’années, et abondamment cité par Jean-Marc Regnault, l’Océanie devra s’unir pour faire face au défi de la montée des eaux. Nathalie Mrgudovic rappelle d’ailleurs que le Pacific Islands Development Forum a été créé pour contredire "la domination des grandes puissances" au sein du FIP et pour développer une économique durable et promouvoir le leadership insulaire. La conférence mondiale sur le climat en décembre à Paris sera un test d’envergure pour savoir si la voix des Océaniens porte suffisamment loin pour être entendue sur la scène internationale.
Quand l’indépendance réveille la salle
Pour réveiller un débat un peu trop calme et policé, rien de tel que d’aborder la question institutionnelle. Un brin provocateur, c’est l’historien Jean-Marc Regnault qui a posé la question qui fâche : "La présence française dans le Pacifique est-elle, pour les trois collectivités, une chance, un handicap ou un boulet ?".
Dans la salle, Jean Montpezat, haut-commissaire en Polynésie de 1987 à 1992 et déjà chef de cabinet du ministre des départements et territoires d’outre-mer sous De Gaulle, s’amuse de ce débat qui revient sans cesse depuis le début de sa carrière. "On ne peut pas mettre à la porte des Français qui veulent rester Français", répond-il. Puis, il vante les avantages du "passeport français" et ajoute un argument qui pourrait expliquer le revirement de François Hollande vis-à-vis de son partenariat avec le Tavini depuis qu’il est entré à l’Elysée : puisque les citoyens d’outre-mer ont participé, comme les autres, à l’élection du président de la République, ce dernier leur doit "aide et protection". Entre statu quo et indépendance, Sémir al Wardi précise que "ce que veulent les élus polynésiens, c‘est l’élection du président au suffrage universel". Jean Montpezat en rajoute : "Si les Polynésiens veulent un président élu au suffrage universel, ils auront Gaston Flosse. Eh bien, bon courage !"
Un participant suggère qu’il aurait été plus pertinent de confier les relations extérieures à la Polynésie et de conserver les compétences intérieures comme la santé ou l’éducation. Pour élargir l’éternel débat, Nathalie Mrgudovic, maître de conférences en sciences politiques, aimerait savoir "ce qu’en penserait l’Océanie". Présence française ou non, Arnaud Busseuil, doctorant en sciences politiques, considère que les trois collectivités françaises du Pacifiques resteront "un point d’entrée pour la France dans la région". Pour ce jeune chercheur, "il est temps de clore ce chapitre et de se concentrer sur les enjeux de notre siècle".
Pour réveiller un débat un peu trop calme et policé, rien de tel que d’aborder la question institutionnelle. Un brin provocateur, c’est l’historien Jean-Marc Regnault qui a posé la question qui fâche : "La présence française dans le Pacifique est-elle, pour les trois collectivités, une chance, un handicap ou un boulet ?".
Dans la salle, Jean Montpezat, haut-commissaire en Polynésie de 1987 à 1992 et déjà chef de cabinet du ministre des départements et territoires d’outre-mer sous De Gaulle, s’amuse de ce débat qui revient sans cesse depuis le début de sa carrière. "On ne peut pas mettre à la porte des Français qui veulent rester Français", répond-il. Puis, il vante les avantages du "passeport français" et ajoute un argument qui pourrait expliquer le revirement de François Hollande vis-à-vis de son partenariat avec le Tavini depuis qu’il est entré à l’Elysée : puisque les citoyens d’outre-mer ont participé, comme les autres, à l’élection du président de la République, ce dernier leur doit "aide et protection". Entre statu quo et indépendance, Sémir al Wardi précise que "ce que veulent les élus polynésiens, c‘est l’élection du président au suffrage universel". Jean Montpezat en rajoute : "Si les Polynésiens veulent un président élu au suffrage universel, ils auront Gaston Flosse. Eh bien, bon courage !"
Un participant suggère qu’il aurait été plus pertinent de confier les relations extérieures à la Polynésie et de conserver les compétences intérieures comme la santé ou l’éducation. Pour élargir l’éternel débat, Nathalie Mrgudovic, maître de conférences en sciences politiques, aimerait savoir "ce qu’en penserait l’Océanie". Présence française ou non, Arnaud Busseuil, doctorant en sciences politiques, considère que les trois collectivités françaises du Pacifiques resteront "un point d’entrée pour la France dans la région". Pour ce jeune chercheur, "il est temps de clore ce chapitre et de se concentrer sur les enjeux de notre siècle".