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Jugé pour avoir massacré sa compagne


Tahiti, le 17 mai 2022 – La deuxième session de la cour d'assises de 2022 s'est ouverte mardi avec le procès d'un sans domicile fixe de 35 ans poursuivi pour des coups mortels. Le 5 février 2019, l'accusé avait violemment frappé sa compagne à coups de pied, de poing et lui avait ensuite marché dessus à plusieurs reprises. Alors que la victime était dans le coma, il avait attendu deux jours avant de prévenir les secours. L'homme, dont le procès doit s'achever mercredi soir, encourt 30 ans de prison. 

Trois mois de violences quotidiennes qui se sont terminés par un traumatisme crânien mortel : la cour d'assises s'est penchée mardi sur le calvaire vécu par une femme de 41 ans, morte sous les coups de son compagnon le 22 février 2019. Le procès de ce dernier, un sans domicile fixe de 35 ans, est prévu sur deux jours. 

Cette affaire particulièrement sordide avait été mise au jour le 7 février 2019 lorsqu'un jeune sans domicile fixe s'était rendu chez un infirmier travaillant avec le père Christophe pour lui expliquer que sa compagne, également sans-abri, gisait inconsciente sur un parking non loin de la clinique Paofai, depuis deux jours. Appelés par l'infirmier pour porter assistance à la victime, les pompiers s'étaient rendus sur place où ils l'avaient trouvée le visage et le corps tuméfiés, allongée sur des cartons au milieu de bouteilles en verre, pour certaines remplies de komo. Immédiatement transportée au Taaone, la victime et mère de cinq enfants, était décédée le 22 février des suites d'une défaillance cardio-respiratoire consécutive à un violent traumatisme crânien. 

Aveux immédiats

S'étant dénoncé auprès de l'infirmier puis du père Christophe, le compagnon de la victime avait été placé en garde à vue à la Direction territoriale de la police nationale – ex DSP – pour s'expliquer sur l'état de sa compagne. Face aux enquêteurs, l'homme avait immédiatement reconnu les faits en expliquant qu'il avait pris l'habitude de frapper sa compagne dès le début de leur relation, soit trois mois avant les faits. Dans la soirée du 5 février, l'accusé, énervé par l'attitude de sa compagne à laquelle il reprochait d'avoir embrassé un autre homme, avait attendu de se retrouver seul avec elle afin de “régler ses comptes”. Selon ses déclarations, il lui avait ensuite donné des “baffes”, des coups de poing et de pied avant de lui marcher sur la tête à trois reprises. Alors que la victime était tombée dans un profond coma, l'homme n'avait pourtant pas osé appeler immédiatement les secours. Et ce n'est que deux jours plus tard qu'il avait contacté l'infirmier. 

En ce premier jour de procès devant la cour d'assises – et comme il en est d'usage – c'est la personnalité de l'accusé qui s'est retrouvée au cœur des débats. Agité et volubile, le trentenaire a d'abord évoqué ses trois années passées en détention provisoire en expliquant qu'il n'avait aucune visite, pas de travail en prison et donc pas d'argent pour s'acheter du tabac ou des vêtements. Semblant déconnecté de la réalité des faits qui lui sont reprochés, l'homme s'est plaint à plusieurs reprises de ne manger que du "riz" et des "pâtes" alors que les autres détenus ont droit à du poisson cru apporté par leurs familles. 

Formation de paysagiste

Après cette parenthèse quelque peu surréaliste, la présidente de la cour d'assises a interrogé l'accusé sur son enfance passée à Napuka puis à Papeete chez ses parents adoptifs. N'évoquant pas de traumatisme particulier, le trentenaire a indiqué qu'il avait arrêté l'école à l'âge de 16 ans et qu'il avait suivi une formation de paysagiste. Tel que l'a rappelé l'enquêteur de personnalité, l'accusé avait sombré dans la précarité après avoir été plus ou moins rejeté par sa famille en raison de son rapport à l'alcool et aux stupéfiants. Vivant à la rue, il avait eu plusieurs relations sentimentales avec des femmes qui avaient, elles-aussi, étaient victimes de sa violence. 

Entendu en qualité de témoin, c'est ensuite le médecin réanimateur qui avait pris la victime en charge lors de son arrivée au centre hospitalier du Taaone, qui est venu à la barre. Tel que l'on pouvait s'y attendre au regard des aveux de l'accusé, le praticien a expliqué que la victime était arrivée aux urgences alors qu'elle souffrait d'un "traumatisme crânien très sévère" et que son état était désespéré. Voulant éviter un "acharnement déraisonnable", le corps médical avait alors décidé d'"arrêter les machines" qui reliaient encore la victime à la vie. 

Le procès doit s'achever mercredi avec les réquisitions de l'avocat général et la plaidoirie de l'avocat de l'accusé, Me Vincent Dubois, qui s'attardera certainement sur le contexte d'extrême précarité dans laquelle vivait le couple. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 17 Mai 2022 à 19:27 | Lu 3447 fois