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Journée mondiale de la liberté de la presse 2012 : des couacs en Océanie


Journée mondiale de la liberté de la presse 2012 : des couacs en Océanie
SUVA, jeudi 3 mai 2012 (Flash d’Océanie) – La Journée mondiale de la liberté de la presse, placée cette année sous le thème du pouvoir des médias de « transformer les sociétés », selon l’UNESCO, a été l’occasion de dresser un bilan en demi-teinte dans la région du Pacifique insulaire, avec de nombreux points noirs en Papouasie-Nouvelle-Guinée, à Fidji, à Vanuatu ou encore en territoire indonésien de Papouasie occidentale.
Cet événement a notamment été marqué à Fidji, où se trouve le siège régional de plusieurs organisations liées aux médias, comme l’association des médias océaniens (Pacific Islands News Association, PINA) ou encore l’école de journalisme de l’Université du Pacifique Sud (USP).
D’autres organisations à vocation océanienne, comme le centre des médias du Pacifique (Pacific Media Centre et son programme de vigilance, Pacific Media Watch, rattachés à l’Université de Technologie d’Auckland), ont tenté elles aussi, en cette journée mondiale, de dresser un bilan des atteintes diverses à la liberté de la presse.
Elles concernent notamment des agressions, parfois de la part de membres de gouvernements ou de la police, sur des journalistes ou des directeurs de rédactions, comme ce fut le cas à Port-Vila (Vanuatu), des répressions policières ou militaires musclées, comme en Papouasie occidentale, également connue sous le nom d’Irian Jaya) contre des journalistes couvrant des manifestations du mouvement indépendantiste OPM ou, plus subtilement, ce qui est décrit comme de l’autocensure de la part des journalistes des îles Fidji, malgré la levée (début janvier 2012) de mesures restrictives et de censure.
L’une des conclusions de cet état des lieux : la notion de liberté de la presse dans cette région insulaire et disparate et souvent caractérisée par la proximité de petites communautés, demeure, bien qu’elle existe, fragile.


Dur constat de Fidji à la Papouasie

Journée mondiale de la liberté de la presse 2012 : des couacs en Océanie
« Les médias dans le Pacifique restent fragile, avec des revers à travers la région, malgré une brève lueur d’espoir à Fidji, et la levée des règles d’urgence en début d’année. La censure officielle a bien été levée, mail elle a été remplacée par un décret relatif aux médias, imposé par le régime soutenu par les militaires. Cela a toujours un effet très dissuasif sur les organes de presse, qu’ils soient locaux ou étrangers, ce qui favorise l’autocensure et même la suspicion au sein même de la profession, avec en plus un phénomène de rivalité dans une sorte de course pour de la part de ceux de ces médias qui cherchent à se faire une place de choix dans un paysage médiatique de type autoritaire. Évidemment, ce n’est pas un environnement encourageant pour la liberté d’expression dans ce pays, alors que Fidji attend ces élections promises pour 2014 », estime le Professeur David Robie, qui dirige Pacific Media Watch et le centre des médias du Pacifique.
Un autre décret, récemment introduit à Fidji, a aussi jeté la confusion, en ce qu’il affirme que les médias reproduisant des propos éventuellement calomnieux de la part du pouvoir actuel seraient exempts de toute poursuite judiciaire.
La règle ne s’appliquerait pas aux autres composantes du paysage politico-socio-économique.
La situation fidjienne a aussi eu des répercussions, ces dernières, au sein des organisations régionales de presse, dont la Pacific Islands News Association (PINA), qui a été l’objet de nombreuses critiques de la part de certains de ses membres, dont de nombreux émanant de la région polynésienne (Samoa, îles Cook), estimant que le siège de cette ONG devrait être déplacé de Suva.
Lors de sa toute récente conférence, la PINA (sous Présidence actuelle de Vanuatu) a décidé une fois de plus de maintenir son siège à Suva, en prônant dans le même temps une politique de dialogue avec le gouvernement local.
En Papouasie-Nouvelle-Guinée, sur fonds de tensions crées par une intense lutte pour le pouvoir entre deux dirigeants (Sir Michael Somare et Peter O’Neill) qui s’estiment tous les deux le Premier ministre légitime de ce pays de sept millions d’habitants, les pressions se sont non seulement faites sentir sur l’appareil judiciaire, mais aussi sur les journalistes, accusés de prendre parti pou un camp ou l’autre.
Plusieurs journalistes ont été agressés, dont l’un, travaillant pour la radiotélévision nationale publique, tout récemment.
En Papouasie occidentale, au moins deux journalistes ont trouvé la mort au cours des douze derniers mois.
Cinq autres ont été enlevés et dix huit autres agressés, selon les décomptes de Pacific Media Watch.
Ces décès et agressions ont aussi suscité un tollé de la part d’organisations non gouvernementales internationales, dont Reporters sans Frontières.


Une « fleur fragile », selon l’ONU

Journée mondiale de la liberté de la presse 2012 : des couacs en Océanie
Ce constat est également en partie repris à son compte par la représentante régionale du Haut-commissariat pour les Droits Humains, basée en Nouvelle-Zélande, Matilda Bogner.
« La situation, pour certains journalistes dans le Pacifique, est particulièrement ténue et dans certains pays, on a observé un déclin (de la liberté de la presse) ces dernières années. Cela montre que la liberté de la presse est résolument une fleur fragile (…) qui a besoin d’être cultivée pour pouvoir se développer dans le Pacifique », a-t-elle estimé en début de semaine dans un communiqué pour marquer cette journée mondiale.
Selon Mme Bogner, les gouvernements peuvent jouer un rôle énorme pour favoriser un environnement dans lequel ils seraient capables d’accepter les critiques et verraient cela comme faisant partie intégrante d’un processus légitime de gouvernement ».


Passage à tabac à Port-Moresby

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Dans un communiqué publié le 25 avril 2012, Reporters sans frontières dénonçait tout dernièrement encore l’agression du journaliste Mark Kayok, de la station de radio National Broadcasting Corporation (NBC), par des policiers en uniforme, le 20 avril 2012, à Port Moresby.
« Depuis le début de l’année, c’est la deuxième agression sur des médias qui implique des forces de l’ordre. À chaque fois, les agresseurs s’en prennent sciemment à des professionnels des médias. La répétition d’attaques de ce type pourrait avoir des conséquences graves en terme d’autocensure des médias’, estimait alors Reporters sans frontières, qui rappelait aussi que le 9 mars 2012, cette ONG avait aussi condamné les menaces de mort proférées par des agents de police à l’encontre du journaliste du quotidien Post Courier, Patrick Talu, le 7 mars 2012, à Port Moresby, alors que ce dernier réalisait un reportage sur la construction d’un gazoduc.

pad

Rédigé par PAD le Jeudi 3 Mai 2012 à 05:45 | Lu 588 fois