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Île y a




Île y a l’océan.
Et Poema. Qui court vers le quai, les savates à la main, le sac aux bretelles roses soudain léger sur son dos. Poema qui s’essouffle et qui rit, criant aux autres de l’attendre.
Île y a le flanc des montagnes au vert profond de feuilles épaisses et le creux de la rivière où se baigner, la lave noire et les rochers.
Île y a la route étroite et lente, bordée de hochement de tête, de sourires et de signes de la main, il y a la brouette grinçante emplie de cocos et Maui tout fier qui pédale sur son vélo neuf et Poema assise sur le guidon, une main dans sa chevelure envolée.
Île y a la goélette, le lien ombilical toujours renouvelé, les pickups chargeant et déchargeant des passagers et des valises, des cartons pleins, des caisses, des ballots, des sacs de riz ou de coprah dans la lumière orange des réverbères, il y a les curieux.
Île y les chants du dimanche, les robes les dentelles les cravates et les chapeaux et Poema qui chante en chaloupant, deux petites mains tenant les siennes.
Île y a la pluie de passage, le grain qu’on voit venir et qui s’en va, laissant traîner sur la terre un nuage de vapeur, il y a la pluie qui s’installe, brouillant le paysage, noyant les contours, qui ralentit le temps et les gens.
Île y a les horizons vides et sans retour dans les yeux mouillés de Poema qui n’attend plus mais qui attend.
Île y a le soleil et les nuages, il y a la sueur, il ya la mer et les poissons, il y a les femmes et les étoiles, il y a les hommes, il ya le sable et le corail, il y a les cocotiers échevelés, il y a les oiseaux, le cri des sternes fendant l’air du soir.
Île y a l’aérodrome et ses rituels et les parfums, ceux qui partent et ceux qui restent , ceux qui arrivent et Poema toute apprêtée, tendant le cou, ses couronnes de fleurs à la main.
Ont-ils encore grandi ? Sont-ils en bonne santé ? Aiment-ils toujours le poisson frit ?
Île y a des nuits de tempête où la mer à l’air mêlée gifle la tôle et soulève, il y a des matins calmes et la lumière, les pirogues qui taillent comme des lames silencieuses la toile d’argent du lagon.
Île y a le paquebot dans la baie, sa blancheur trompeuse venue de loin, il y a Poema derrière sa table couverte de bracelets et de colliers de coquillages, souriantes et accueillante dans son anglais de collégienne.
Île y a le ciel au-dessus, infiniment scruté par les voyageurs avides de ses bleus et de ses ors, de ses blancs, de ses gris, qui font un décor à leurs selfies.
Île y a Poema parmi les siens, au centre du cercle, ses cheveux blancs soigneusement coiffés, il y a les rires et la musique, il y a les générations.
Île y a les vieux. Leurs mains qui savent, leurs yeux qui taisent.
Île y a les liens invisibles tissés d’une île à l’autre.
Île y a les langues des peuples enracinés dans le vent et dans le sel.
Île y a la vie simple comme l’espoir d’une renaissance, loin des villes qui se meurent.
Île y a la lune à son lever.
Île y a le temps retrouvé.
Île y a demain.
Île y a la paix.
 
Soko

le Mercredi 6 Novembre 2019 à 17:08 | Lu 707 fois


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