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Humanitaires tués à Gaza: l'armée israélienne reconnaît une "grave erreur"


Crédit WORLD CENTRAL KITCHEN / AFP
Crédit WORLD CENTRAL KITCHEN / AFP
Territoires palestiniens | AFP | mercredi 03/04/2024 - L'armée israélienne a reconnu mercredi une "grave erreur" après la frappe qui a tué dans la bande de Gaza sept membres d'une ONG humanitaire, parmi lesquels six étrangers dont les corps devaient quitter le territoire palestinien pour être rapatriés.

La frappe, qui a suscité une vague de critiques internationales, survient après près de six mois d'une guerre dévastatrice dans le territoire palestinien entre Israël et le Hamas, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste en Israël le 7 octobre.

De retour d'une mission à Gaza, Dominic Allen, représentant du Fond des Nations unies pour la population (UNFPA), a jugé la situation dans le territoire palestinien assiégé, au bord de la famine, "pire que catastrophique".

La frappe israélienne lundi à Deir al-Balah (centre) a tué sept membres de World Central Kitchen (WCK, basée aux Etats-Unis) qui venaient de décharger "plus de 100 tonnes de nourriture amenées à Gaza par voie maritime", selon l'ONG.

C'est "une grave erreur" qui "n'aurait pas dû se produire", a déclaré le chef de l'état-major israélien Herzi Halevi, évoquant "une mauvaise identification" dans des "conditions très complexes".

- "Excuses" -
Le président d'Israël Isaac Herzog avait présenté ses "excuses" la veille, le Premier ministre Benjamin Netanyahu évoquant une frappe "tragique". 

WCK, qui s'est dit "dévastée" par la mort de ses collaborateurs, a publié sur X les noms, photos et nationalités des victimes: un Palestinien, une Australienne, un Polonais, un Américano-canadien et trois Britanniques.

Les dépouilles des six Occidentaux sont arrivées mercredi à la mi-journée au point de passage de Rafah (sud), à la frontière avec l'Egypte, en vue de leur rapatriement.

WCK a annoncé suspendre ses opérations dans la région après la frappe.

Depuis le 7 octobre, l'ONG avait fourni des repas dans le territoire palestinien, où la majorité des quelque 2,4 millions d'habitants sont menacés de famine selon l'ONU. Elle avait participé mi-mars à l'envoi à Gaza d'un premier bateau d'aide depuis Chypre.

Ce couloir maritime, ainsi que des parachutages d'aide, ont été mis en place en raison de la difficulté de faire entrer des vivres par voie terrestre dans le territoire sous blocus israélien, mais de nombreux pays et organisations humanitaires jugent que la voie terrestre est la plus à même de permettre l'acheminement de l'énorme aide dont la population a besoin.

Réagissant à la frappe lundi, l'ONU a dénoncé un "mépris du droit humanitaire international" et le président américain Joe Biden s'est dit "indigné", estimant qu'Israël ne protège "pas assez" les personnes venant en aide à la population palestinienne "affamée".

Alliés historiques d'Israël, les Etats-Unis ont aussi réclamé une enquête "rapide" sur le drame. 

- "Enfants terrifiés" -
"C'est inadmissible. Mais c'est le résultat inévitable de la façon dont la guerre est menée", a relevé le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, répétant son appel à un cessez-le-feu immédiat.

Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque dans le sud d'Israël qui a entraîné la mort d'au moins 1.160 personnes, essentiellement des civils, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles. D'après Israël, environ 250 personnes ont été enlevées et 130 d'entre elles sont toujours otages dont 34 sont mortes, à Gaza.

En représailles, Israël s'est fixé comme objectif de détruire le Hamas et a lancé une campagne de bombardements aériens intenses sur la bande de Gaza, suivie d'une offensive terrestre qui a permis à ses soldats de progresser du nord au sud de la petite bande de terre.

Au moins 32.975 personnes, la plupart des civils, ont été tuées dans les opérations israéliennes, a indiqué mercredi le ministère de la Santé du Hamas. En 24 heures, 59 morts supplémentaires ont été recensés, selon un communiqué du ministère, qui fait état de 75.577 blessés.

Un panache de fumée s'élevait dans le ciel mardi matin au-dessus d'un amas de gravats après une frappe israélienne dans le nord de la bande de Gaza.

Depuis que sa maison a été bombardée, Maï Morchid dit déménager chaque jour avec ses quatre enfants dans la ville de Gaza (nord).

"J'espère me réveiller un jour dans la paix (…) sans entendre le bruit des bombardements (…) Mes enfants se réveillent terrifiés" la nuit, dit-elle, inquiète par ailleurs qu'ils aient "manqué plus de la moitié de leur semestre" à l'école.

- "Risque plausible d'un génocide" -
Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU va examiner vendredi un projet de résolution condamnant "le recours par Israël à des armes explosives à large rayon d'action" dans des zones peuplées de Gaza et appelant à un embargo sur les armes pour Israël. Le texte évoque "le risque plausible d'un génocide à Gaza".

Après une vaste opération de deux semaines dans le complexe hospitalier al-Chifa, dans la ville de Gaza, l'armée israélienne a indiqué mardi continuer ses opérations dans la ville de Khan Younès (sud), notamment dans le secteur de l'hôpital Al-Amal, qui avait dû cesser ses activités il y a une semaine en raison des opérations israéliennes. 

Elle accuse des hôpitaux d'abriter des bases du Hamas, considéré comme un groupe terroriste par Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne.

A Al-Amal, elle a dit notamment avoir "tué et arrêté un certain nombre de terroristes". De "nombreuses armes" ont été aussi découvertes.

A Jérusalem, pour le quatrième soir consécutif, des familles d'otages et des opposants au gouvernement de M. Netanyahu se sont rassemblés mardi devant le Parlement pour crier leur colère et réclamer la démission du Premier ministre.

"Vous menez une campagne contre moi, contre les familles d'otages, vous vous êtes retournés contre nous. Vous nous appelez +traîtres+ quand VOUS êtes le traître, un traître à votre peuple, à vos électeurs, à l'Etat d'Israël", a crié au micro Einav Zangauker, dont le fils est retenu en otage à Gaza.

le Mercredi 3 Avril 2024 à 07:29 | Lu 1585 fois