Tahiti Infos

Foncier: le gouvernement accusé de vouloir spolier les terres des polynésiens, la Vice-présidence réagit.


Foncier: le gouvernement accusé de vouloir spolier les terres des polynésiens, la Vice-présidence réagit.
La vice-présidence, en charge du budget, du développement des collectivités, de l’économie numérique, de la communication, des relations avec les institutions de la Polynésie française, porte-parole du gouvernement réagit de façon virulente aux accusations qui ont été portées à l'encontre du gouvernement, accusé dans certains articles de vouloir spolier les terres des polynésiens.
Nos lecteurs trouveront ci-dessous le communiqué de la vice-présidence ainsi que le communiqué du Te Mana Toa, ainsi qu'en en pièce jointe les textes de la loi de Pays citée en objet.

Communiqué de la Vice-présidence

"Les apprentis sorciers se trompent de Bastille
Le sport favori de certains semble être le dénigrement gratuit, sans réelle analyse, et avec d’autant plus d’aplomb qu’ils ne connaissent pas grand-chose aux sujets qu’ils abordent. A vrai dire, le but premier est de faire parler d’eux.
Ainsi, ces derniers jours, un sujet relevant de la vice-présidence fait l’objet des feux nourris de ces apprentis sorciers, juristes du dimanche, pseudo-journalistes et autres « sages » prétendus , mais surtout autoproclamés.
Qu’il nous soit permis ici de rétablir la réalité des faits.
FONCIER : Projet de Loi de Pays portant code de la Propriété publique
Chacun y est allé de son fantasme, ou de sa petite démagogie ; la ritournelle centrale voulant prétendre que le gouvernement, à travers ce projet de Loi de Pays, veut spolier les « terres autochtones »…
Quelle est la situation, aujourd’hui, avant le projet de loi ?
1. De manière simple, l’article 539 du code civil stipule d’ores et déjà que :
« Les biens des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées appartiennent à l’Etat »
2. Aucune disposition règlementaire ou d’organisation propre à la Polynésie ne prévoit de modalités de restitutions éventuelles de ces biens en déshérence,
« tombés » de facto dans le domaine public.
C’est donc bien la situation actuelle qui, en ne proposant pas de sortie de la déshérence, enferme ces fameuses « terres autochtones » dans un syndrome de spoliation que le gouvernement actuel combat, depuis bien avant 2004 et le TAUI.

Que propose le projet de loi, sur ce point précis ?
1. Ici encore, de manière pourtant simple à comprendre, l’article 171 du projet de loi de Pays stipule que : « Lorsque la propriété d'un immeuble a été attribuée à la Polynésie française, dans les conditions fixées aux articles LP 11 à LP 12, le propriétaire ou ses ayants droit sont en droit d'en exige la restitution. Toutefois, il ne peut être fait droit à cette demande si le bien a été aliéné ou utilisé d'une manière s'opposant à cette restitution. Ils ne peuvent, dans ce cas, obtenir que le paiement d'une indemnité représentant la valeur de l'immeuble au jour de l'acte d'aliénation ou, le cas échéant, du procès-verbal constatant la remise effective de l'immeuble au service ou à l'établissement public utilisateur. A défaut d'accord amiable, l'indemnité est fixée par le juge compétent en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. La restitution de l'immeuble, ou à défaut, le paiement de l'indemnité, est subordonné au paiement par le propriétaire ou ses ayants droit du montant des charges et impositions qui ont été éludées, ainsi que du montant des dépenses nécessaires à la conservation du bien engagées par la Polynésie française. »
En français dans le texte et pour sortir du jargon juridique, il est écrit que :
1) Si quelqu’un conteste la déshérence d’un bien public, il peut, en présentant des preuves de propriété en exiger la restitution.
2) Si cette restitution n’est pas possible du fait de l’utilisation faite par la collectivité ( ex : un bâtiment administratif construit dessus), il peut alors demander à obtenir une indemnité.
3) Si aucun accord ne peut être trouvé entre le Pays et le requérant, c’est au final le juge qui tranche.
TOUT A L’OPPOSE DES SUPPOSEES VELLEITES DE SPOLIATION, ce projet de Loi de Pays vient donc, au contraire, permettre et encadrer la restitution de biens « tombés » dans le domaine public du fait d’une déshérence constatée, mais contestable avec preuves à l’appui par un propriétaire ou ses ayants droit.
Pour ce qui concerne le respect des Traités du 9 septembre 1842 et du 29 décembre 1880, et à la veille du 14 juillet, nous ne pouvons qu’inviter les uns et les autres à ne pas se tromper de Bastille : c’est au fond de l’avenue Dupetit-Thouars qu’ils trouveront le représentant de l’Etat !
Te aroha ia rahi."

Le communiqué évoqué ( émanant du Te Mana Toa, L’esprit du Guerrier)

Spoliation de terre par la Polynésie française

"La réforme foncière tant attendue est en marche à travers cette codification des textes existants unifiés, modifiés et complétés, dans cette Loi du Pays transmise par le Président Oscar TEMARU.
Quand bien même on ne peut que saluer le travail réalisé par les services du Pays, la lecture de certains articles de la loi du pays portant codification de la propriété publique en Polynésie française, soulève une grande inquiétude.
Ma mission en tant qu’élue c’est de voter un texte pour faciliter la sortie de l’indivision et permettre à chaque propriétaire de jouir de sa terre.
Or, telle que rédigée cette loi du pays présente le risque d’une confiscation des terres indivises par le gouvernement et de fait le risque d’une spoliation des terres des polynésiens.

1. Une loi pour spolier les terres indivises ?

LP 10 alinéa 1 vise à intégrer dans le domaine privé de la Polynésie française les terres dont les polynésiens ont hérité sous le prétexte que ces derniers n’auraient pas accompli les formalités auprès du notaire. C’est une situation très fréquente en Polynésie française car beaucoup de polynésiens n’ont pas les moyens de payer les frais de notaire.
Par cette loi du Pays, ces héritiers se font spoliés leurs terres par le gouvernement.

LP 10 alinéa 2 peut entrainer la spoliation des terres indivises en cas de non-paiement de l’impôt foncier lorsque la propriété de la terre est incertaine. Et ce alors même qu’il n’y a pas d’impôt foncier sur les terrains non bâtis en PF… à moins que le gouvernement envisage d’en créer un.

LP 11 et LP 12 semblent indiquer que les modalités de confiscation seront fixées par un arrêté pris en Conseil des Ministres sans garantir que le juge du foncier ne soit saisi.
Cela est contraire aux principes énoncés dans le bloc de constitutionnalité (Articles 2 et 17 de la DDHC de 1789). « La propriété est un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ».

Est-ce à dire que LE GOUVERNEMENT VEUT REMPLACER LE TRIBUNAL FONCIER par le Conseil des Ministres?

2. Une loi qui dépossède les habitants des îles ?

La LP 17 dispose que toutes les terres qui n’ont pas été attribuées à une personne privée au terme des procédures légalement instituées en matière de déclaration de terre, sont la propriété du pays.
Or il n’existe aucun certificat de propriété dans les îles suivantes : aux Gambier, à Napuka, Rimatara, Rurutu. A Fangatau de nombreuses revendications sont restées dans les puta mataeeina, sans publication au JOEFO. Dans d’autres îles, les revendications ont bien fait l’objet d’une publication, mais, les propriétaires ne disposent pas du titre de propriété (Raroia, Nukutavake, …).
Ce qui reviendrait à dire qu’après publication de cette loi, toutes ces îles deviendraient la propriété du Pays.
3. Une loi au service des puissants ?

Alors que le LP 82 permet aux grands établissements hôteliers de bloquer l’accès à leur plage, le LP 116 permet au conseil des ministres d’obliger les propriétaires à donner un libre accès à leur plage d’une largeur de 3 m sans qu’une indemnisation ne soit prévue dans la loi.




Je suis étonnée qu’une telle loi qui a pour conséquence de déposséder bon nombre de polynésiens de leurs terres émane d’un gouvernement qui a toujours prôné la restitution des terres aux polynésiens.

Je demande que cette Loi de Pays adoptée en commission législative ne soit pas inscrite en l’état à l’ordre du jour des travaux de notre assemblée."


Te Mana Toa, L’esprit du Guerrier




Rédigé par () le Mercredi 13 Juillet 2011 à 18:37 | Lu 3191 fois