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Financement libyen: Nicolas Sarkozy de nouveau devant les juges


Paris, France | AFP | mardi 06/10/2020 - Nouveau rendez-vous judiciaire pour Nicolas Sarkozy : moins de quinze jours après une décision cruciale de la cour d'appel de Paris qui a validé l'enquête sur les soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007, l'ex-chef de l'Etat était entendu mardi par les juges chargés de l'enquête.

Une source judiciaire a confirmé à l'AFP l'information de Mediapart selon laquelle M. Sarkozy était entendu en milieu de journée par les juges anticorruption du tribunal de Paris, pour la première fois depuis juin 2019.

A l'époque, M. Sarkozy avait dit être "totalement innocent dans cette affaire", dénoncé un "complot", puis refusé de répondre aux questions des magistrats instructeurs, le temps de l'examen de recours visant à faire annuler l'enquête.

Dans ce dossier, où les juges d'instruction Aude Buresi et Marc Sommerer ont succédé à Serge Tournaire, M. Sarkozy a été mis en examen en mars 2018 pour "corruption passive", "recel de détournement de fonds publics" et "financement illégal de campagne". Il est également placé sous contrôle judiciaire.

Les magistrats pourraient interroger ce mardi M. Sarkozy sur des versements en liquide en provenance du régime libyen qui auraient été réalisés via un de ses anciens collaborateurs, Thierry Gaubert, mis en examen le 31 janvier pour "association de malfaiteurs".

Les enquêteurs se demandent si un tel transfert a pu servir in fine à alimenter en cash le budget de la campagne victorieuse de M. Sarkozy.

Contacté, l'entourage de l'ancien président n'a pas répondu aux sollicitations de l'AFP.

Cet interrogatoire intervient après le rejet le 24 septembre par la cour d'appel de Paris de l'essentiel des pourvois déposés par le camp Sarkozy contre ces investigations.

La chambre de l'instruction avait été saisie par l'ex-chef de l'Etat et ses anciens ministres Claude Guéant, Eric Woerth et Brice Hortefeux, ainsi que l'homme d'affaires Alexandre Djouhri sur toute une série de nullités : M. Sarkozy invoquait notamment son immunité présidentielle, reprochait aux juges d'être sortis du périmètre autorisé de l'enquête ou avançait que le détournement de fonds publics d'un pays étranger, qui lui est reproché, est un délit qui n'existe pas dans la loi française.

Mais cette chambre de la cour d'appel, qui étudie les recours contre les actes d'instruction, a largement validé les investigations lancées il y a huit ans dans cette affaire aux multiples ramifications, permettant aux juges de poursuivre l'enquête.

M. Sarkozy s'est pourvu en cassation contre cette décision le 28 septembre, tout comme MM. Woerth, Guéant, Djouhri, a indiqué une source judiciaire à l'AFP.

Deux procès à venir

L'enquête avait été ouverte après la publication par Mediapart en 2012, dans l'entre-deux tours de la présidentielle, d'un document censé prouver que la campagne victorieuse de Nicolas Sarkozy avait été financée par le régime de Mouammar Kadhafi. 

Témoignages de dignitaires libyens, notes des services secrets de Tripoli, accusations d'un intermédiaire... En sept ans de travail, les magistrats ont réuni une somme d'indices troublants qui ont donné corps à cette thèse.

Toutefois, aucune preuve matérielle indiscutable n'a pour l'heure été retrouvée, même si des mouvements de fonds suspects ont conduit à neuf mises en examen à ce jour.

En novembre 2016, l'homme d'affaires Ziad Takieddine - un des mis en examen dans cette affaire et en fuite depuis sa condamnation en juin dans le volet financier de l'affaire Karachi - avait affirmé avoir remis entre fin 2006 et début 2007 cinq millions d'euros à M. Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, et à son directeur de cabinet Claude Guéant.

Outre ce dossier, dans lequel les investigations sont encore en cours, l'ex-chef de l’État doit être jugé du 23 novembre au 10 décembre pour "corruption" dans l'affaire dite des "écoutes" : il est soupçonné d'avoir tenté, avec son avocat Thierry Herzog, d'obtenir d'un haut magistrat, Gilbert Azibert, des informations couvertes par le secret dans une procédure judiciaire. 

M. Sarkozy doit également être jugé du 17 mars au 15 avril 2021 pour le financement illégal de son autre campagne présidentielle, celle de 2012, dans le cadre de l'affaire Bygmalion : il lui est reproché le dépassement du plafond de dépenses de campagne.

le Mardi 6 Octobre 2020 à 08:02 | Lu 468 fois