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Economie : La crise de 2012 est encore là


Pierre-Yves Le Bihan, directeur de l'IEOM.
Pierre-Yves Le Bihan, directeur de l'IEOM.
PAPEETE, lundi 17 janvier 2013. L’IEOM (Institut d’émission d’outre-mer) vient de publier son rapport annuel 2012 avec toutes les évaluations de l’économie locale. Cette quatrième année de crise économique consécutive en Polynésie française se traduit par un ralentissement de l’activité des banques, ce qui ne s’était encore jamais vu. L’avant-propos du rapport 2012 de l’IEOM sur la Polynésie française place le décor. «En 2012, l’économie polynésienne n’est toujours pas parvenue à sortir de la crise économique qui dure depuis quatre ans. Ni la consommation des ménages, ni la commande publique, ni l’investissement des entreprises n’ont redémarré» écrit Pierre-Yves Le Bihan, le directeur de l’IEOM à Papeete.

L’année 2012 marque le pas aussi dans l’activité bancaire du territoire qui avec retard finit
par ressentir également la crise. L’emploi se dégrade, la consommation des ménages recule et se réduit de plus en plus à l’essentiel, à savoir les dépenses liées à l’alimentation et l’entretien de la maison. Le climat des affaires a continué à se dégrader. «Il y a eu un phénomène d’attentisme fort au cours des six derniers mois de l’année 2012 et qui s’est poursuivi en 2013 en raison de la campagne électorale. Il y a certainement eu des reports d’investissements» analyse Pierre-Yves Le Bihan qui espère que la stabilité politique annoncée pour les cinq prochaines années permettra de redonner confiance aux entrepreneurs. Mais si le directeur de l’IEOM croit aux atouts de la Polynésie française, il reconnaît aussi que la reprise économique «doit passer par un plan de redressement avec une baisse des dépenses et une hausse des recettes». Une vérité de La Palice qui n’est pas si aisée à mettre en pratique en Polynésie française. D’autant que, «après quatre ans de crise économique, la capacité de résistance des entreprises et des ménages constitue un enjeu majeur pour 2013». L’urgence d’une reprise de l’économie est donc palpable désormais.


Les banques connaissent aussi la crise

L’inertie des systèmes bancaires est telle que les banques de Polynésie ne ressentent véritablement la crise économique générale que depuis 2011. Mais en 2012 selon les indicateurs analysés par l’IEOM, «la crise se ressent dans le secteur bancaire local». Cela se traduit par une baisse des dépôts et des encours de crédit (-3% pour les crédits d’exploitation de l’entreprise et -7% pour les crédits à la consommation des particuliers). Conséquence «on arrive à un point où la production de nouveaux crédits ne couvre pas le remboursement des précédents emprunts». Le déficit des crédits en 2012 est évalué par l’IEOM à 18 milliards de Fcfp, «c’est un gros coup d’arrêt» analyse Pierre-Yves Le Bihan. Aussi les conditions d’exploitation des banques se dégradent et les marges se resserrent depuis deux ans. «Les banques sont prises en étau par deux phénomènes croisés : la baisse du chiffre d’affaires qui va perdurer et une hausse des risques avec une augmentation nette du taux de créances douteuses». Il y aurait en 2012 eu un total de 60 milliards de Fcfp de créances douteuses avec de forts risques d’impayés. Sur les ménages ce taux de créances douteuses pèse 8%, c’est quatre fois plus qu’en métropole. «L’activité bancaire est déprimée dans tous les segments du marché, pour les entreprises et les ménages. Pour les particuliers, on le voit nettement avec la baisse des crédits à l’habitat qui sont les marchés phares des banques» poursuit le directeur de l’IEOM. Une situation qui perdure au premier trimestre 2013.

Mais si la situation des banques est délicate (ce qui ne va pas inciter à la baisse des frais bancaires) en revanche leur solvabilité est ferme (assurée par de grands groupes nationaux). Aussi «les banques locales sont en capacité d’accompagner la reprise d’activité. Les banques ont des contraintes d’exploitation qu’elles n’avaient pas avant, mais n’ont aucun problème de solvabilité» concluait Pierre-Yves Le Bihan. Il faut donc s’attendre à ce que les banques soient encore plus sélectives sur leurs exigences pour accepter de faire crédit aussi bien aux entreprises qu’aux ménages.

LE DECLIN DE L'EMPLOI

Economie : La crise de 2012 est encore là
L’IEOM fixe à 1900 le nombre d’emplois perdus au cours de l’année 2012. Les secteurs les plus touchés sont la construction (-371 emplois, soit -4,1 % en glissement annuel) et l’industrie (-242 emplois, soit -4,9 %). L’indice de l’emploi salarié enregistre une baisse significative pour sa quatrième année consécutive (- 2,5 % en moyenne annuelle en 2012, après -2,9 % en 2011). Sur les quatre années de crise (2009, 2010, 2011, 2012), au total 7 000 emplois auraient été perdus en Polynésie. Le déclin de l’emploi est d’autant plus important qu’il a forcément des conséquences sur la consommation des ménages. Dans le même temps, l’IEOM qui est le coordonnateur local de la Commission sur le surendettement des ménages, mise en place depuis l’an dernier, note que la moitié des dossiers des ménages surendettés existent en raison de la perte d’emploi du chef de famille.

LE TOURISME SE REPREND

Economie : La crise de 2012 est encore là
Ce ne sont pas encore les chiffres record des années 2000, mais en 2012 le nombre de touristes est reparti à la hausse. Avec 168 978 touristes accueillis en 2012 c’est mieux qu’en 2011, 2010, 2009. La courbe établie repart clairement à la hausse et c’est une bonne chose. Si le marché intérieur polynésien est toujours très déprimé, en revanche les marchés extérieurs montrent une activité croissante. C’est le cas en 2012 du tourisme, mais aussi de la pêche (+62% de poissons exportés). La perle et la vanille également ont de bons résultats en 2012.

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 17 Juin 2013 à 15:27 | Lu 1900 fois