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Didier Pani, le Super(bar)man de Polynésie


RAIATEA, le 10 juin 2020 - La rencontre avec Didier Pani commence par une confidence qui ne manque pas de sel... il ne boit pas d'alcool. Né en 1969 à Uturoa, il fait ses études au lycée de l'île jusqu'à la troisième, avant de partir pour Tahiti à l'école hôtelière afin d'y passer le brevet technicien hôtellerie (BTH) à l'âge de17 ans. Son cursus l'envoie ensuite en 1987 en métropole. Didier y décroche, un BTS Technicien hôtellerie. À l'issue de cette période et par manque de moyen financier, il est obligé de rentrer au fenua où il retrouvera un poste d'agent commercial à UTA. Il n'exercera que quelques années avant de rejoindre l'Armée, toujours dans l'aviation, en tant que volontaire au service long pendant 18 mois. De l'air, il n'en verra pas beaucoup la couleur à Rochefort (Charente Maritime), puisque c'est au sol qu'il est affecté en tant que chef de bar. Il serait le premier Polynésien à obtenir ce poste dans une école de prestige militaire. Rapidement, ses aptitudes se révèlent et il devient la coqueluche au mess des officiers où il est apprécié par l'état-major. C'est donc au hasard d'une affectation que naît sa vocation pour la préparation des fameuses boissons colorées et gustatives, hautement appréciées en métropole, car synonyme d'exotisme. Cette période de sa vie prend fin en 1991 pour raisons familiales, la santé de sa mère à Raiatea l'obligeant à rentrer. Didier ne chôme pas pour autant, puisqu'il est rapidement engagé au Bali Hai, qui fut le fleuron de l'île durant une longue période. Malheureusement, quelques mois après son arrivée, un incendie dévaste l'unité hôtelière. Ses qualités et ses compétences lui permettent de rebondir. Le directeur lui trouve aussitôt une place dans un prestigieux hôtel de Moorea pour quelque mois. Il est d'ailleurs le seul du staff à avoir bénéficié de cette faveur. Cette parenthèse sur l'île sœur prend rapidement fin, car son île natale lui manque. Dès son arrivée, sa réputation l'ayant précédé, il trouve une place de barman au restaurant Jade Garden à Uturoa. En 1994, la nouvelle direction du Bali Hai, devenu entre-temps le Hawaiki Nui, vient dîner au restaurant où il oeuvre en salle et au bar. Après l'avoir vu servir, une discussion s'engage. En quelques instants il est engagé dans son ancien hôtel remis à neuf, non sans avoir à effectuer une formation de trois semaines en Italie. Au cours des cinq années qui vont suivre, il se présente trois fois au concours de meilleur barman du territoire... qu'il remporte autant de fois. Finalement, en raison d'une mésentente avec la direction, il change de trajectoire professionnelle pour devenir vendeur dans une bijouterie de Uturoa. Un court intermède dans le tourisme mis à mal par les attentats du 11 septembre 2001. Sans emploi, il ne le restera pas très longtemps puisque le Hawaiki Nui change de direction et le réembauche, cette fois pour une longue durée comme chef barman et assistant de direction, rien de moins. Il y restera jusqu'en 2011. Didier met à profit cette période pour préparer le concours d'entrée pour enseigner dans le privé. Grâce aussi à ce que l'on appelle administrativement la VAE : validation des acquis de l'expérience. Diplômé, il quitte définitivement le monde de l'hôtellerie pour intégrer le lycée professionnel protestant de Uturoa, où il y exerce jusqu'à ce jour de manière très professionnelle. Toujours enquête de mieux, Didier est parti, quelques jours en mars dernier, en métropole pour passer son diplôme d'enseignant du second degré. Le but étant d'exercer à un niveau supérieur dans tous les établissements publics français. Seul Polynésien de sa promotion, il en est sorti major. La cinquantaine passée, les projets ne manquent pourtant pas puisqu'il a décidé de préparer son Capetet l'année suivante l'agrégation. Connu et reconnu à Raiatea, Didier Pani présente, toutes les semaines (en dehors de la période de confinement), ses préparations servies par ses élèves aux clients qui viennent déguster les bons petits plats de la section cuisine. Il a su transmettre sa passion à ses élèves qui sont maintenant sollicités par les mairies et les administrations. L'État et le Territoire le sollicitent souvent pour organiser les cocktails dînatoires en soirée.

Rédigé par Vesco le Mercredi 10 Juin 2020 à 17:11 | Lu 4828 fois