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Défiscalisation : Pierre Frébault s’attaque aux effets d’aubaine


Défiscalisation : Pierre Frébault s’attaque aux effets d’aubaine
PAPEETE, vendredi 15 mars 2013. Le dispositif de défiscalisation locale a été révisé par les élus de l’assemblée territoriale. Les modifications sur les incitations fiscales du dispositif demandées par le ministre des finances Pierre Frébault visent à réduire les crédits d’impôts et à inciter les investisseurs et les banques à participer plus activement au financement des projets. Evidemment l’examen de ce texte de révision –à la baisse- du dispositif de défiscalisation locale a provoqué le débat au sein de l’hémicycle territorial. En commission déjà, les élus avaient fait part au ministre en charge de l’économie de leurs préoccupations quant à l’impact de cette mesure sur le financement des futurs grands projets d’investissement en Polynésie française. A cinq semaines du premier tour des élections territoriales le sujet est extrêmement sensible.

Mais Pierre Frébault, qui a sous ses yeux chaque jour l’état des finances du Pays,
a justifié sa démarche par la réalité des chiffres. Depuis le début des années 2000, un total de 220 milliards de Fcfp de crédits d’impôts a été versé par ce dispositif de défiscalisation locale. Dans les belles années cela pouvait atteindre les 10 milliards de Fcfp/an. En 2013 le montant budgété de crédit d’impôt dépasse à peine les 4,5 milliards. «On doit tenir compte de la situation financière du pays. Le crédit d’impôt pour les entreprises ce sont des recettes fiscales en moins dans les caisses du pays» n’a cessé de marteler le ministre, qui veut mettre en place de nouvelles règles du jeu bien moins alléchantes que celles en vigueur jusqu’ici. Car le premier constat à charge sur la défiscalisation est que les fonds propres des promoteurs et des organismes bancaires ont toujours été la portion congrue du système. «Par le crédit d’impôt, le Pays apportait jusqu’à 65% de l’investissement de certains projets, le Pays est devenu la banque, le premier guichet vers lequel on se tourne quand on prévoit d’investir».

Si le dispositif de défiscalisation peut provoquer un appel d’air pour les investisseurs et les promoteurs, les effets d’aubaine restent malheureusement à sens unique selon Pierre Frébault. «Il n’est plus question que le Pays apporte en financement deux à trois plus que ce qu’apporte le promoteur lui-même. La règle sera que le Pays ne sera pas autorisé à apporter plus de 50% du financement sauf pour l’agriculture. Si le projet est éligible à la défiscalisation nationale, type Girardin sur 30% alors il restera à partager à égalité entre le pays et le promoteur les 70% restants». Et le ministre d’insister pour que les banques reviennent «à leur métier de base. Leur métier c’est de financer les investissements sans le faire sur le dos du Pays» ordonne-t-il en admettant toutefois que le taux de fiscalité à 55% qui pèse sur les activités bancaires devra nécessairement être revu.

Au-delà des finances du pays qui ne sont plus autant disponibles que dans les bonnes années
pour accompagner cette défiscalisation, on sent bien que Pierre Frébault est sérieusement agacé par la quasi absence généralisée de résultat pour le Pays de ces efforts colossaux. «On a tous espéré un retour de ces crédits d’impôts, mais bon nombre d’entreprises ayant disposé de la défiscalisation n’ont bizarrement jamais fait de bénéfices, n’ont jamais payé d’impôt ! Le retour sur cet investissement du pays ? C’est le déficit, donc pas d’impôt, pas de recettes pour le Pays. Ces entreprises savent utiliser le Code fiscal pour se tenir juste au niveau du déficit et ne jamais payer d’impôt. Il y a de grands groupes hôteliers qui sont en place depuis 15 ans et qui sont systématiquement au résultat zéro, c’est fort quand même». Ce texte a été adopté par 31 voix pour, 9 voix contre et 2 abstentions.


Quelques assouplissements pour d'autres

Des modifications dans le dispositif de défiscalisation locale ont été apportées également afin de favoriser l’éligibilité de petits projets. Ainsi pour l’achat de bateaux assurant le transport inter-îles, le seuil passe de 100 à 20 millions de Fcfp pour les projets situés sur une autre île que Tahiti, ce qui permettra de favoriser le renouvellement des flottes privées. De même dans le secteur de la pêche, l’agrément fiscal pour un navire neuf de pêche professionnelle en haute mer baisse de 20 m à 17 m en ce qui concerne la taille, et de 100 à 80 millions de Fcfp pour ce qui est du montant d’investissement. Autre nouveauté, sont désormais éligibles les projets de rénovation de cabine dans le transport aérien. «C’est un peu téléphoné non cette histoire. Avec ce dispositif Air Tahiti Nui va pouvoir défiscaliser la rénovation de ses avions. Voilà un texte orienté en faveur d’une entreprise» notait Jean-Claude Bouissou du groupe Tahoeraa.

Rédigé par Mireille Loubet le Vendredi 15 Mars 2013 à 16:57 | Lu 2443 fois