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Brève rencontre entre chefs de diplomatie fidjienne et australienne


Brève rencontre mardi à Sydney entre Ratu Inoke Kubuabola et Julie Bishop, ministres des affaires étrangères respectivement de Fidji et d’Australie. (Source photo : Ministère fidjien de l’information)
Brève rencontre mardi à Sydney entre Ratu Inoke Kubuabola et Julie Bishop, ministres des affaires étrangères respectivement de Fidji et d’Australie. (Source photo : Ministère fidjien de l’information)
CANBERRA, jeudi 31 octobre 2013 (Flash d’Océanie) – Ratu Inoke Kubuabola et Julie Bishop, ministres des affaires étrangères respectivement de Fidji et d’Australie, se sont brièvement rencontrés mardi lors d’une escale de M. Kubuabola à Sydney, a annoncé le gouvernement fidjien dans un communiqué.
Au menu des entretiens : la question récurrente de l’éventuelle normalisation des relations entre les deux pays, particulièrement tendues depuis le putsch de décembre 2006 à Suva et l’avènement au pouvoir du Contre-amiral Franck Bainimarama.
« Les discussions entre les eux ministres se sont centrées autour des relations entre Fidji et l’Australie. Elles ont résonné d’un engagement ferme de la part de l’Australie pour une normalisation des relations bilatérales à la première occasion possible », peut-on lire dans un communiqué du gouvernement fidjien, assorti d’une photo immortalisant cette rencontre.
Néanmoins, côté australien, cette rencontre n’a pas fait l’objet de communication particulière.
Une première rencontre entre M. Kubuabola et Mme Bishop avait eu lieu fin septembre 2013, New York, en marge de l’Assemblée Générale des Nations-Unies.
Depuis l’alternance en Australie, à la suite des législatives du 7 septembre 2013 et le retour au pouvoir des conservateurs, Mme Bishop affirme sa volonté de renouer le dialogue avec Fidji, en commençant par la nomination d’un ambassadeur (Haut-commissaire) à Suva.
Canberra a aussi exprimé son souhait de pouvoir participer, sous forme d’aide technique ou financière, aux préparatifs des élections promises pour septembre 2014 à Fidji.

Vendredi 4 octobre 2013, Murray McCully, ministre néo-zélandais des affaires étrangères, a annoncé vendredi la nomination d’un nouveau Haut-commissaire (ambassadeur) à Fidji, dans le cadre d’un mouvement affiché de normalisation avec cet archipel, théâtre d’un coup d’État en décembre 2006 et qui annonce un retour à la démocratie, via des élections, en septembre 2014.
Mais une fois de plus, ce poste de chef de mission n’est attribué qu’à titre intérimaire.
Le choix de Wellington s’est porté sur Mark Ramsden, diplomate de carrière expérimenté en Océanie, avec à son actif, déjà, plusieurs postes à responsabilité dans la proche région, notamment à Port-Moresby –Papouasie-Nouvelle-Guinée, Port-Vila (Vanuatu) et Honiara (îles Salomon, ambassadeur).
« M. Ramsden aura un rôle important dans la gestion de nos relations avec Fidji, alors que ce pays revient vers un système démocratique », a commenté vendredi le chef de la diplomatie néo-zélandaise, qui souligne que « Fidji a pris récemment des mesures positives en vue de la tenue d’élections libres et justes : un enregistrement extensif des électeurs a eu lieu, quatre partis politiques ont été enregistrés, Fidji a répondu positivement à une mission de la Nouvelle-Zélande et de l’Union Européenne concernant l’évaluation des besoins en vue de la tenue des élections ».
M. Ramsden viendra prendre la relève de Phillip Taula, qui avait assuré ‘intérim à la tête de l’ambassade néo-zélandaise depuis mars 2010.
Une précédente chef par intérim de cette mission, Caroline McDonald, avait été expulsée de Fidji fin 2008, au motif d’ingérence dans les affaires internes du pays.

L’annonce de cette nomination intervenait dans la foulée d’une rencontre à Auckland entre Murray McCully et Julie Bishop, deux jours auparavant.
Ils avaient alors évoqué une nouvelle fois la question de Fidji.
Mme Bishop a notamment réitéré le point de vue exprimé avant les élections australiennes, selon lequel elle souhaitait désormais normaliser « le plus rapidement possible » les relations, particulièrement tendues ces dernières années, entre Suva et Canberra.
Le point de vue semble partagé par Wellington.

Première étape prévue : la mise en place d’ambassadeurs à Suva.
Le dernier choix annoncé fin 2012 par Canberra, en la personne de la diplomate de carrière Margaret Twomey, n’avait jamais été entériné par Suva.
Selon Mme Bishop, c’est pourtant Mme Twomey qui continue à recueillir les faveurs du nouveau gouvernement, malgré l’alternance travaillistes-conservateurs.
Un précédent Haut-commissaire (ambassadeur) australien, en poste à Suva, James Batley, avait été expulsé en 2009 de Fidji, qui invoquait alors une « ingérence » dans les affaires intérieures de l’archipel.
L’Australie et la Nouvelle-Zélande se sont positionnées, après le putsch fidjien du 5 décembre 2006, en fer de lance d’une posture visant à condamner et à appliquer des sanctions à l’encontre du régime mis en place par le Contre-amiral Franck Bainimarama.
Fidji pas pressé de se rabibocher avec les deux grands voisins régionaux

Néanmoins, du point de vue de Suva, les déclarations australiennes et néo-zélandaises sont considérées comme venant « un peu tard » et pas forcément sur une base « sincère », soulignait récemment le ministre des affaires étrangères Ratu Inoke Kubuabola.

Selon le chef de la diplomatie fidjienne, Suva aurait d’ores et déjà décidé de ne pas accepter la nomination d’ambassadeur australiens et néo-zélandais pleins avant la tenue de ses élections, en septembre 2014.

Fin septembre 2013, en marge de l’Assemblée Générale de l’ONU, M. Kubuabola a aussi rencontre les chefs de la diplomatie australienne et néo-zélandaise.
Les entretiens ont été qualifiés de « francs et fructueux », en vue de « maintenir des contacts réguliers » et de « normaliser » les relations.
Des propos similairement critiques à l’encontre de Canberra et de Wellington avaient été tenus par le Contre-amiral Premier ministre Bainimarama, notamment dans le cadre de son discours à la tribune de l’Assemblée Générale des Nations-Unies, fin septembre 2013.
http://www.fiji.gov.fj/Media-Center/Speeches/STATEMENT-BY-COMMODORE-JOSAlA-VOREQE-BAINIMARAMA-P.aspx?feed=news

M. Bainimarama avait peu ou prou tenu le même discours début septembre 2013 à l’occasion de la promulgation de la nouvelle Constitution fidjienne par le Président de la République, Ratu Epeli Nailatikau.
Il a notamment fustigé les pays figurant parmi les plus grands voisins de Fidji, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, pour avoir choisi, en imposant des sanctions, de « soutenir une forme de démocratie, de gouvernance et de justice qu’ils n’auraient jamais accepté chez eux ».

Suva rappelle aussi que, depuis le putsch de 2006, de nouvelles relations ont été soit établies, soit renforcées avec d’autres partenaires de développement, à commencer par ceux en Asie, Chine en tête, dans le cadre de la politique du « Regarder Vers le Nord (l’Asie) ».

Après les législatives australiennes (qui ont débouché, le 7 septembre 2013, sur le retour au pouvoir de la droite conservatrice, M. Bainimarama avait fait parvenir à Canberra un message de félicitations dans lequel l’homme fort de Suva, tout en transmettant ses « chaleureuses félicitations » au nouvel élu de Canberra (le Premier ministre Tony Abbott), il avait exprimé l’espoir d’une « phase nouvelle et positive » dans les relations australo-fidjiennes.

Ces dernières années, après le putsch de décembre 2006, mené par le Contre-amiral Franck Bainimarama (qui dirige depuis le gouvernement local tout en promettant des élections pour septembre 2014), les relations entre Fidji et l’Australie, déjà détériorées au cours des dernières années du Premier ministre de droit John Howard (remplacé par les travaillistes lors des législatives de novembre 2007) ne se sont jamais améliorées.

Cette ouverture apparente de la part de Fidji intervient aussi en réponse à de récentes déclarations faites par Mme Julie Bishop (désormais ministre des affaires étrangères au sein du gouvernement Abbott) qui, fin juillet 2013, dans le cadre de la campagne électorale, prônait une realpolitik et une normalisation des relations avec Fidji.

Mme Bishop, qui n’était encore alors que députée du parti libéral (opposition) australien, également en charge des affaires étrangères, avait alors promis un revirement radical de la posture vis-à-vis du régime post-putsch fidjien, en cas de victoire de l’opposition aux législatives.
Mme Bishop, qui s’exprimait dans le cadre des rencontre de la chambre d’expansion économique entre les deux pays, à Brisbane, et en présence du chef de la diplomatie fidjienne, Ratu Inoke Kubuabola, avait notamment estimé que « le temps est venu de reconstruire les ponts (…) Si notre gouvernement de coalition est élu cette année, je m’engage à faire en sorte que les relations entre l’Australie et Fidji soient normalisées, et ceci en priorité. Je suis consciente du fait qu’il y aura des défis à relever et des problèmes que nous devrons affronter, mais avec la volonté et l’engagement des deux parties, je suis persuadée que nous pouvons atteindre les objectifs que nous souhaitons atteindre. Bien sûr nous encourageons Fidji à tenir ces élections, comme l’a promis le Contre-amiral Bainimarama, en 2014. Nous applaudissons et encourageons cet engagement. Si notre coalition devait être élue, j’aimerais voir le rétablissement des pleines relations diplomatiques entre l’Australie et Fidji. J’aimerais voir Fidji réintégrer la Commonwealth, le Forum des Îles du Pacifique et d’autres forums à travers le monde », avait-elle alors déclaré, dans un discours radicalement opposé à la politique menée ces dernières années par le gouvernement travailliste australien, au pouvoir depuis novembre 2007.

Relations régionales

Lors du même forum australo-fidjien des affaires, lundi 29 juillet 2013, Ratu Inoke Kubuabola, ministre des affaires étrangères de l’archipel, au sein d’un gouvernement issu du putsch de décembre 2006, avait tiré le premier en lançant une attaque particulièrement virulente à l’encontre de l’Australie, pays auquel Suva reproche, en vrac, sa récente politique dure en matière d’immigration, mais aussi une attitude qualifiée d’ « arrogante ».

« L’Australie et la Nouvelle-Zélande nous ont tourné le dos »

Au plan des relations strictement australo-fidjiennes, M. Kubuabola s’était alors déclaré « profondément déçu » de l’attitude de Canberra, ces dernières années.
« Au lieu de s’engager de manière constructive, l’Australie a choisi de punir Fidji, alors que nous tentons de nous attaquer aux profondes divisions au sein de notre société, aux inégalités et à construire une véritable démocratie », avait lancé le ministre fidjien.
Le gouvernement fidjien, dirigé par le Contre-amiral Franck Bainimarama, annonce des élections législatives, censées marquer le retour à la démocratie, pour septembre 2014, avec pour principe directeur un système « une personne, une voix » et l’abolition de l’ancien système qui réservait des circonscriptions à l’un ou l’autre des principaux groupes ethniques de l’archipel (les Fidjiens indigènes et les citoyens d’origine indienne).
Une nouvelle Constitution a été entérinée vendredi 6 septembre 2013 par le Président de la République fidjienne, Ratu Epeli Nailatikau.

« Nous aurions imaginé que l’Australie et la Nouvelle-Zélande auraient au moins essayé de comprendre ce que nous tentions de réaliser (…) Au lieu de ça, ils nous ont tourné le dos », avait poursuivi le chef de la diplomatie fidjienne.
« Il n’est pas facile d’oublier les efforts déployés par l’Australie aux Nations-Unies pour tenter de mettre un terme à l’engagement de Fidji de trois décennies au sein des forces de maintien de la paix (…) Il n’est pas facile d’oublier que le gouvernement australien est parvenu à nous couper l’accès à des prêts de la Banque Mondiale ou de la Banque Asiatique de Développement (…) Il n’est pas facile d’oublier les interdictions de visas, qui sont toujours en place et qui ont entraîné de nombreux désagréments et (…) privé Fidji de la capacité à attirer des gens compétents pour faire tourner nos services », avait-il enchaîné.
Vendredi 6 septembre 2013, le Contre-amiral Bainimarama reprenait quasi à l’identique ces arguments, sans nommer cette fois-ci l’Australie.
L’essentiel de cet argumentaire était une nouvelle fois largement repris dans son discours prononcé fin septembre 2013 à l’Assemblée Générale de l’ONU ? à New York.

Selon le ministre Kubuabola, désormais, « Fidji ne considère plus l’Australie et la Nouvelle-Zélande comme (ses) alliés et protecteurs naturels ».
« Maintenant, nous regardons vers le monde (…) Vers le Nord et nous tissons des liens plus étroits avec la Chine, l’Inde, l’Indonésie et la Russie ».
Cette politique du « regard vers le Nord » se traduit, du point de vue de Fidji par un accent tout particulier sur l’Asie.
Depuis, Fidji a accueilli en août 2013 à Nadi un « Forum de Développement des îles du Pacifique », qui dont les formes embryonnaires ont réuni, les deux années précédentes, plusieurs États de la région.
La réunion de 2013 de ce qui est largement perçu comme la réponse de Suva à son exclusion du Forum des Îles du Pacifique (FIP), sous l’influence de ses deux membres les plus influents (l’Australie et la Nouvelle-Zélande), a reçu le soutien financier des gouvernements des Émirats Arabes Unis (370.000 dollars US) et du Koweït (100.000 dollars US) pour ce qui est perçu, dans la région, comme une sorte d’ « alter-Forum » (des Îles du Pacifique, dont Fidji est exclu depuis mai 2009, pour cause de non-retour rapide à la démocratie).

Statut diplomatique pour le « Forum de Développement des îles du Pacifique »

Le 26 octobre 2013, le gouvernement fidjien a annoncé l’octroi du statut diplomatique, dans le cadre de la convention de Vienne, au Forum de Développement des îles du Pacifique (PIDF, Pacific Island Development Forum), cette sorte d’ »Alter-Forum » qu’il a porté sur les fonds baptismaux et veut, dans un premier temps, héberger le siège à Suva.
Cette décision, concrétisée par la publication au journal officiel le même jour, « formalise le statut international du PIDF au regard des lois fidjiennes. Elle permet aussi de faire en sorte que lui soient accordés les mêmes privilèges diplomatiques que ceux dont bénéficie tout autre organisation internationale similaire établie à Fidji, comme les Nations-Unies, la Communauté du Pacifique ou le Forum des Îles du Pacifique », explique le communiqué.
Le siège provisoire du PIDF a déjà été identifié : il s’agira des anciens locaux des services de production audiovisuelle du gouvernement fidjien, désormais mis à disposition du secrétariat de la nouvelle organisation.
Dans un premier temps, Fidji devrait prendre en charge les frais de fonctionnement de cette cellule.
« Nous n’ambitionnons pas de créer une bureaucratie concurrente (à celle des autres organisations régionales) », déclarait en août 2013 le Contre-amiral fidjien aux dirigeants venus assister au PIDF.
« En fait, notre philosophie directrice sera l’antithèse de beaucoup de bureaucraties (…) Le Pacifique n’a pas besoin d’installations coûteuses, nous voulons des résultats. Le Pacifique n’a pas besoin d’une armée d’officiels surpayés. Nous voulons des personnes motivées et ayant à cœur le service public, des gens qui sachent utiliser des ressources maigres pour obtenir des effets maximaux », avait-il alors lancé.

pad

Rédigé par PAD le Jeudi 31 Octobre 2013 à 06:27 | Lu 296 fois