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Birmanie: la junte libère près de 6.000 prisonniers, dont plusieurs étrangers


STR / AFP
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Rangoun, Birmanie | AFP | jeudi 17/11/2022 - La junte au pouvoir en Birmanie a annoncé jeudi la libération de près de 6.000 prisonniers, dont une ancienne ambassadrice britannique, un journaliste japonais et un conseiller australien du gouvernement déchu d'Aung San Suu Kyi, qui ont quitté le pays dans la foulée.

Ces trois ressortissants étrangers "sont graciés et expulsés", a indiqué la junte dans un communiqué.

L'ex-diplomate Vicky Bowman, le conseiller économique australien Sean Turnell et le journaliste japonais Toru Kubota ont été "libérés pour marquer la fête nationale" (jeudi), a déclaré à l'AFP un officier supérieur.

Partis dans la foulée de Rangoun, ils sont arrivés à Bangkok par un vol commercial, vers 19H10 en heure locale (12H00 GMT), a constaté une journaliste de l'AFP.

Cette libération de prisonniers est un rare signe d'ouverture des militaires depuis leur arrivée au pouvoir lors du coup d'Etat du 1er février 2021. Des milliers de personnes ont été emprisonnées dans le cadre de la répression sanglante de toute dissidence qui a suivi.

Trois bus transportant des prisonniers graciés par la junte birmane ont quitté la prison Insein de Rangoun, peu après 15H00 locales (08H30 GMT) et sont passés devant une foule de 200 personnes, ont constaté des journalistes de l'AFP.  

L'amnistie concerne "au total, 5.774 prisonniers, dont quelque 600 femmes", a précisé un officier du régime.

Il n'a pas indiqué combien de personnes graciées avaient été arrêtées lors de la répression militaire contre la dissidence. 

Cette décision était réclamée depuis de longs mois par les organisations de défense des droits humains, qui pointaient du doigt des condamnations politiques par une junte accusée d'avoir fait plonger le pays dans un conflit sanglant depuis le putsch.

Sean Turnell "a fait des blagues" 

Mme Bowman, en poste entre 2002 et 2006, et son mari, l'artiste birman Htein Lin, ancien prisonnier politique, tous deux arrêtés en août pour avoir enfreint les lois d'immigration, avaient été condamnés à un an de prison. Tous les deux ont bénéficié de l'amnistie, a appris l'AFP.

Le chef de la diplomatie britannique James Cleverly s'est félicité sur Twitter de sa libération, en rappelant que "tous ceux qui sont injustement emprisonnés au Myanmar doivent être libérés."

M. Turnell, professeur d'économie australien, travaillait en tant que conseiller d'Aung San Suu Kyi lorsqu'il a été arrêté quelques jours après le coup d'Etat. Il avait été condamné à trois ans de prison pour violation de la loi sur les secrets officiels.

"Je viens de parler à Sean Turnell, qui a été libéré après 650 jours d'emprisonnement injustes (...) Il se porte bien", a déclaré aux journalistes le Premier ministre australien Anthony Albanese, depuis Bangkok où il se trouve pour le sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (Apec).

"Il faisait des blagues. Il est de mon électorat et s'est excusé de ne pas avoir voté à l'élection. Je lui assuré qu'il n'allait pas avoir à payer d'amende", a lancé le dirigeant qui a pris ses fonctions en mai dernier.

Quant à Toru Kubota, 26 ans, arrêté en juillet en marge d'une manifestation anti-junte à Rangoun, il avait été condamné à dix ans d'emprisonnement.

Il a été le cinquième journaliste étranger depuis le coup d'Etat à avoir été arrêté par la junte, après les Américains Danny Fenster et Nathan Maung, le Polonais Robert Bociaga et le Japonais Yuki Kitazumi, qui ont tous fini par être libérés et expulsés.

Le quatrième étranger libéré, Kyaw Htay Oo, est un Birman détenant un passeport américain, selon une source officielle. Lui aussi se trouvait dans l'avion qui a atterri à Bangkok. Il a déclaré à l'AFP qu'il était "très heureux".

Des familles s'étaient rassemblées devant la prison dès l'annonce de la junte.

"Période incroyablement sombre" 

Kyaw Htay, dont le fils a été condamné à trois ans de prison pour avoir partagé des messages anti-coup d'État sur les réseaux sociaux a dit espérer qu'il "soit libéré aujourd'hui".

Mais responsables comme experts mettent en garde sur une amnistie en trompe-l'oeil, face aux violences qui empirent en Birmanie malgré les nombreuses condamnations et sanctions de la communauté internationale qui appelle en vain à l'arrêt du conflit.

"C'est un point positif, dans ce qui reste une période incroyablement sombre", a nuancé le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken.

La junte "ne montre aucun signe de réforme et une amnistie de masse ne l'absout pas des atrocités commises depuis le coup d'Etat", a déclaré auprès de l'AFP l'analyste indépendant David Mathieson.

"Des milliers de personnes emprisonnées depuis le coup d'Etat (...) n'ont rien fait de mal et n'auraient jamais dû être emprisonnées au départ", a déclaré le porte-parole du bureau régional d'Amnesty.

Trois anciens ministres du gouvernement déchu d'Aung San Suu Kyi, qui reste incarcérée alors que son procès fleuve est en cours, ont aussi été libérés, a indiqué un officier supérieur de la junte.

Depuis le coup d'Etat, plus de 2.300 civils ont été tués par les forces de sécurité, selon le décompte d'une ONG locale. La junte accuse pour sa part l'opposition armée de la mort de plus de 3.900 civils.

le Jeudi 17 Novembre 2022 à 05:22 | Lu 308 fois