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Benalla en garde à vue, licencié par l'Elysée


Paris, France | AFP | vendredi 20/07/2018 - Coup de théâtre dans l'affaire Benalla: sous la pression politique et médiatique, l'Elysée a annoncé vendredi engager la procédure de licenciement d'Alexandre Benalla, filmé frappant un manifestant et placé en garde à vue vendredi.

Les sanctions prises jusque-là, une mise à pied de deux semaines avec suspension de salaire et un changement d'affectation, étaient un "dernier avertissement avant licenciement", avait prévenu jeudi le porte-parole de l'Elysée Bruno Roger-Petit.
Mais, arguant de "faits nouveaux constitutifs d'une faute commise" et faisant "l'objet d'une procédure judiciaire", l'Elysée a annoncé vendredi à l'AFP avoir "pris la décision d'engager la procédure de licenciement d'Alexandre Benalla", car celui- ci, "aux fins de prouver son innocence, (...) aurait été destinataire d'un document de la préfecture de police qu'il n'était pas autorisé à détenir".
De quel document s'agit-il ? Au même moment, une source proche du dossier indiquait à l'AFP que trois policiers - un contrôleur général, un commissaire et un commandant - étaient suspendus à titre conservatoire pour avoir extrait des images de vidéo-surveillance de la Ville de Paris et les avoir transmises à M. Benalla.
Des agissements que le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb "condamne lourdement", a-t-il dit. 
M. Benalla a été placé en garde à vue vendredi matin à Paris dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte la veille après la diffusion de la vidéo mercredi soir par Le Monde.
Il est visé pour des faits de violences en réunion par personne chargée d'une mission de service public, d'usurpation de fonctions, de port illégal d'insignes réservés à l'autorité publique et de complicité de détournement d'images issues d'un système de vidéo-protection.
Vincent Crase, un gendarme réserviste et agent d'accueil pour LREM qui était avec Alexandre Benalla le 1er mai, a également été placé en garde à vue vendredi.
 

- Réaction en chaîne -

 
La diffusion de vidéos montrant M. Benalla, chargé de mission auprès du chef de cabinet de la présidence de la République et chargé de la sécurité, coiffé d'un casque à visière, en train de frapper un jeune homme lors des manifestations du 1er-Mai, a suscité un flot de critiques et questions.
Pourquoi l'Elysée n'a-t-il pas pris de sanctions plus fortes ? Pourquoi n'a-t-il pas signalé les agissements de M. Benalla à la justice ? Pourquoi celui-ci a-t-il continué à travailler pour l'Elysée ? Que savaient Emmanuel Macron et le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb ?
Les réactions s'enchaînent: débats à l'Assemblée parasités par l'affaire, la commission des Lois de l'Assemblée nationale transformée en commission d'enquête sur les faits, saisie de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) par le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, audition prévue de M. Collomb en début de semaine prochaine par la commission des Lois du Sénat, proposition de motion de censure du gouvernement lancée par les députés de La France insoumise. 
Au coeur de la tourmente, Emmanuel Macron est resté stoïque et silencieux, refusant à de multiples reprises de répondre aux questions des journalistes alors qu'il était en déplacement en Dordogne jeudi, se bornant à affirmer que "la République est inaltérable".
C'est le porte-parole de l'Elysée, Bruno Roger-Petit, qui était monté au créneau jeudi matin pour tenter d'éteindre l'incendie en assurant que la sanction prise contre M. Benalla était "la plus grave jamais prononcée contre un chargé de mission".
L'affaire est désormais "aux mains de la justice, et c'est très bien ainsi", avait simplement réagi le Premier ministre Edouard Philippe, interpellé au Sénat.
 

- "Seule issue possible" -

 
Vu la pression politique et médiatique, le licenciement de M. Benalla "était évidemment la seule issue possible", a réagi vendredi le député LREM Matthieu Orphelin.
Au groupe LREM, "je pense que beaucoup attendaient que ce soit réglé dès hier", rapporte un "marcheur", tandis qu'à droite, Valérie Pécresse, à la tête du mouvement Libres !, déplore des faits "dissimulés" et "une réaction bien tardive de la présidence".
Ce licenciement "est le minimum que pouvait faire l'Elysée", a commenté l'eurodéputé RN (ex FN) Nicolas Bay sur franceinfo.
Dans une grande tension, des députés des oppositions accusent désormais Gérard Collomb de "mensonges", demandant que le ministre, voire le Premier ministre, vienne s'expliquer devant l'Assemblée, après de nouvelles informations de presse selon lesquelles M. Collomb était au courant dès le 2 mai.
Luc Carvounas (PS) a estimé qu'a minima "il y a eu un mensonge par omission" de M. Collomb car la police des polices avait déjà été saisie alors que le ministre avait laissé entendre jeudi que c'était nouveau.
"C'est le cœur de l'Etat qui est atteint. Nos travaux doivent cesser immédiatement, le Premier ministre doit venir s'expliquer devant l'Assemblée nationale", a tonné le chef de file des députés LR Christian Jacob.
Le bureau de la commission des Lois pourrait se réunir vendredi soir pour organiser les travaux d'enquête, à l'initiative de sa présidente Yaël Braun-Pivet.

le Vendredi 20 Juillet 2018 à 04:12 | Lu 1097 fois