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Audiovisuel : un film office d’ici deux ans ?


(De gauche à droite) Denis Pinson, vice-président de la Fédération polynésienne de l’audiovisuelle et du cinéma, CLaire Schwob, présidente et Jean-Baptiste Dupont, co-auteur de l'étude du secteur.
(De gauche à droite) Denis Pinson, vice-président de la Fédération polynésienne de l’audiovisuelle et du cinéma, CLaire Schwob, présidente et Jean-Baptiste Dupont, co-auteur de l'étude du secteur.
TAHITI, le 13 février 2022 - Vendredi matin, la Fédération polynésienne de l’audiovisuel et du cinéma a officiellement présenté son “livre blanc”. Sur les 27 leviers recensés par l’étude du secteur, 15 ont été retenus. Parmi eux, cinq sont considérés comme prioritaires dont la création d’un film office, ou bureau d’accueil de tournages.

Denis Pinson, vice-président de la toute nouvelle Fédération polynésienne de l’audiovisuelle et du cinéma –elle est née le 9 novembre 2021– a énuméré les cinq axes prioritaires de développement du secteur de l’audiovisuel vendredi matin dans le cadre du Fifo : “Nous allons continuer à nous fédérer en appelant tous les professionnels à nous rejoindre, mettre en place des formations et accompagnement sur les aspects techniques, mais également administratif, financier, juridique… Nous espérons la création d’un bureau d’accueil de tournage, l’établissement d’incitation fiscale et enfin la création de liens avec l’Océanie”.

Cette annonce a été faite dans le cadre de la présentation officielle du livre blanc de l’audiovisuel (lire aussi cet article rédigé sur la base d’une vaste étude menée par Jean-Baptiste Dupont et Anne-Sophie Lefeubvre. Si certains de ces axes sont des travaux de longues haleines, comme les incitations fiscales, d’autres pourraient se concrétiser dans les mois à venir. Et notamment, la création d’un bureau d’accueil de tournage (film office). Jean-Baptiste Dupont confirme : “Sur ce point, les planètes sont alignées”.

Un film office a existé en Polynésie dans les années 2000 mais n’a pas duré dans le temps en raison d’un manque de cohésion du secteur. Ce dernier est désormais fédéré et forts de données chiffrées. Par exemple, entre 2003 et 2022, le secteur de l’audiovisuel est passé d’une quinzaine de professionnels à 200. Preuve s’il en fallait de sa dynamique. Ils sont dotés de compétences. Manea Mazet, producteur, affirme avoir toujours trouvé localement les professionnels dont il avait besoin. Les tournages locaux, comme les tournages internationaux, ont des retombées économiques directes conséquentes (chiffrées à 1,19 milliard de Fcfp) et indirectes encore mal estimées mais existantes.

Ces données sont autant d’arguments à mettre en avant pour consolider le secteur, solliciter des aides, mesures, incitations fiscales afin de maintenir la production locale et renforcer l’attractivité du territoire. La demande de contenu grandit, portée par le décollage des plateformes de vidéo à la demande. Ce que les autres pays du Pacifique ont bien compris. “Une guerre des incitatifs”, comme la nomment les auteurs de l’étude du secteur, est en cours.

L’étude suivie de la naissance de la fédération sont un point de départ. La feuille de route est prête. Sur l’ensemble des 27 leviers identifiés par l’étude du secteur, 15 ont finalement été retenus. Ils seront actionnés petit à petit, sur impulsion des membres de la fédération.

Approfondir les connaissances

Pour développer les compétences locales, le producteur Manea Mazet (Lucid Dream) insiste sur le besoin d’approfondissement. “Nous sommes dans des domaines où l’on peut apprendre seul, être autodidacte, mais un approfondissement de nos compétences reste nécessaire.” Reste à savoir comment. Sur le territoire, de nombreux professionnels sont multitâches en raison des besoins limités et ponctuels de certaines spécialités. Dans ce contexte, former des spécialistes dans chaque secteur de l’audiovisuel ne paraît opportun. Toutefois des combinaisons cohérentes sont possibles. Un état des lieux des compétences (à faire) permettrait d’orienter l’offre de formations. Elle devra se mettre en place tout en confortant l’attractivité polynésienne de tournages extérieurs afin d’offrir, en plus des formations, de l’expérience. Cette dernière est indispensable pour monter en compétence.

Construire des ponts dans le Pacifique

Matahi Tutavae, réalisateur, confirme la nécessité de construire des ponts entre professionnels du Pacifique, de Nouvelle-Zélande, Hawaii voire des Samoa, Tonga ou encore du Japon. Avant la crise liée au Covid, il échangeait déjà des images avec, par exemple, la ‘Ōiwi television, basée à Hawaii. “Il s’agissait de contenu pour les news dans le cadre du tour du monde Hokule’a. Mais cela pourrait s’étendre à la réalisation de documentaires.” La pandémie a conforté l’intérêt de ce genre d’initiative. “J’avais des tournages prévus en Nouvelle-Zélande que je n’ai toujours pas pu faire. J’ai contacté une amie maori sur place pour qu’elle me fasse des séquences.”

Les liens pourraient se concrétiser avec la mise en place de partenariats, des co-productions “ce qui permettrait d’élargir le marché de la diffusion, mais aussi d’approfondir nos connaissances et expertises”. Matahi Tutavae constate l’émergence, partout dans le monde, de communautés qui créent leur propre structure, “des boîtes de natives”, pour raconter leur histoire. Ce qui n’existe pas encore en Polynésie, ou pas assez. “C’est important pour protéger notre langue et dire notre culture”.


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Rédigé par Delphine Barrais le Dimanche 13 Février 2022 à 14:43 | Lu 991 fois