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Annoncer une maladie grave à un patient : où, quand, comment ?


Annoncer une maladie grave à un patient : où, quand, comment ?
PARIS, 2 juillet 2011 (AFP) - L'annonce d'une maladie grave - cancer, maladie neuro-dégénérative - est un début de parcours qu'il ne faut pas rater : des médecins plaident pour des annonces qui disent tout mais progressivement, un autre jour que le vendredi, en prenant son temps et en parlant de "l'après".

"Certaines annonces peuvent être faites de façon trop brutale, parfois entre deux portes", a relevé Michel Legmann, président du conseil de l'Ordre, lors d'un débat organisé à Paris sur le sujet.

En témoigne Marie-Blanche dont le compagnon est mort récemment de cancer, dans un hôpital d'Amiens. L'annonce a été brutale et incomplète : "c'est une tumeur maligne, il faut enlever le plancher buccal, on vous ôtera quelques dents".

En fait, sans prévenir selon elle, on les enlève toutes pour éviter une contamination. Après une opération et un scanner, le médecin traitant appelle : "il n'y a plus de traces !". Nouvelle donne au retour des vacances : il y a eu erreur, les résultats sont "très mauvais".

"Tout ça a été d'une grande violence", dit Marie-Blanche.

Alors, que dire, où le dire, à qui, comment ?

Sauf si le patient refuse de savoir, les médecins sont unanimes à penser qu'il faut tout lui dire, sans passer par des proches, et que le plus à même de le faire est le médecin qui a le diagnostic en main : soit le spécialiste, soit le médecin de famille, qui connaît la personne et son contexte.

"Pas dans un couloir, pas par téléphone"

"Trop souvent on délègue à une infirmière la tâche de dire une mauvaise nouvelle", note Jean-Yves Grall, directeur général de la santé et cardiologue.

Faute d'explication, les patients ont "un sentiment d'angoisse", dit Nicolas Brun, de l'Union nationale des associations familiales, qui plaide pour "la clarté, la transparence", qui aide les gens à prendre leurs responsabilités.

Le discours doit être positif, ne pas tuer l'espérance. "Il faut inclure la construction de l'après", dit le Dr André Deseur, un généraliste.

"Il y a une vie de l'après, c'est essentiel de mettre l'annonce en perspective", estime Dominique Maraninchi, professeur de cancérologie et nouveau directeur de l'Agence du médicament. Genre: "Je vous propose un programme personnalisé de soins qui va durer tant de temps". "Le médecin doit écouter, accompagner, assumer", souligne-t-il.

Il parle de la "sidération" des personnes à qui on annonce une maladie grave, et qui se répètent en boucle "qu'est ce qui m'arrive, qu'est-ce que je vais devenir ?". D'où l'importance qu'un proche soit présent à ce moment-là.

L'annonce doit être faite dans un lieu dédié, comme une salle de consultation. "Pas dans un couloir et pas par téléphone", insiste le Pr Maraninchi. Détail qui a son importance : pas le vendredi, car après, "on se retrouve tout seul, désespéré", dit-il.

Tous le disent : le médecin ne doit pas "être pressé" mais prendre le temps de l'information pour aider le patient à l'absorber, lui permettre de poser ses questions et dire ses craintes.

"Il y a d'excellents médecins qui sont d'excellents ingénieurs mais qui ont perdu la dimension humaine d'échange et de dialogue", souligne le Dr André Deseur, qui plaide pour que les médecins reçoivent une formation "non seulement scientifique, mais aussi humaniste", qui manque cruellement dans les facultés de médecine.

chc/jca/jmg

Rédigé par Par Christine COURCOL le Vendredi 1 Juillet 2011 à 22:45 | Lu 717 fois