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À la quête des oranges de Tamanu


Les oranges du plateau de Maretia sont réputées pour être les plus belles et les plus savoureuses.
Les oranges du plateau de Maretia sont réputées pour être les plus belles et les plus savoureuses.
PUNAAUIA, le 20 juin 2019 - La cueillette des oranges sur le plateau de Tamanu à Punaauia a débuté hier. Plus d'une centaine de personnes ont participé à la cueillette de cette année. Rencontre avec ces "'aito" qui prennent tous les risques pour ramener le précieux agrume.

Il est 8 heures du matin ce jeudi lorsque Guillaume Mamae, vice-président de l'association Protection de la vallée de la Punaruu, donne le départ de la cueillette des oranges du plateau de Tamanu, malgré la pluie. Ils sont une centaine de personnes cette année à participer à cette opération. Armés de leurs sacs à dos, d'un couteau et de leur "rau", ils sont prêts à se lancer pour deux heures de marche.



CHEMIN BOUEUX ET VERSANTS ESCARPES

Direction les plateaux de Maretia, Rata ou Puharuru… La majorité a opté pour le plateau de Maretia, connu pour offrir les plus belles oranges et les plus sucrées. Mais pour obtenir les précieux fruits, les porteurs d'orange ont dû s'attaquer à un chemin très escarpé et très glissant dû aux fortes pluies qui se sont abattues dans la nuit de mercredi à jeudi dans la vallée.
 
Des cordes ont été installées sur les versants les plus escarpés et les plus sinueux pour permettre l'ascension vers le plateau de Maretia. "Pour monter sur ces plateaux, il faut nécessairement une bonne condition physique, et beaucoup de cardio. Il faut savoir aussi où placer ses pieds pour éviter tout accident", confie Coco Teuira, 68 ans, le doyen des porteurs d'oranges.
 
Après deux heures d'efforts, le parfum des oranges de Maretia embaume sur les 200 derniers mètres à parcourir. Sur place, Tehaunui et Roihau sont déjà à pied d'œuvre. Ils ont déjà cueilli près de 100 kg d'oranges. Désormais, le plus dur reste à faire pour eux. "On a essayé de ne pas trop se charger parce qu'il va falloir descendre toutes ces oranges. Le terrain est glissant et il va falloir redoubler de vigilance". Les deux compères ont prévu une nouvelle virée sur les plateaux, dans les jours à venir, pour cueillir le maximum d'oranges.
 
Les porteurs descendront aujourd'hui avec sur leur dos des tonnes d'oranges. Ces derniers défileront ensuite samedi à la mairie de Punaauia. Ce sera l'occasion de rendre hommage à ces "aito" du plateau de Tamanu.
Le chemin vers le plateau de Tamanu est difficile et dangereux avec la pluie.
Le chemin vers le plateau de Tamanu est difficile et dangereux avec la pluie.

PAROLE A

Coco Teuira, le plus ancien des porteurs d'oranges
"Les plants qui se trouvent un peu plus en hauteur se meurent"

"Avant, cette traditionnelle opération était bien différente de celle d'aujourd'hui. Auparavant, les orangers donnaient beaucoup de fruits. Tout reposait dans la façon de cueillir des porteurs. Nos anciens le faisaient proprement, et ils respectaient la nature. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas.

Je voudrai remercier Noella, c'est elle qui est à l'origine de cette reforestation. Au départ, je ne faisais pas partie des personnes qui devaient replanter des orangers, mais Noella est venue me demander de les aider, parce qu'elle voyait que le nombre d'orangers diminuait. C'est comme cela que je me suis lancé dans cette opération.

Aujourd'hui, c'est important de replanter des orangers. Il faudrait quatre champs comme celui-ci, parce que les plants qui se trouvent un peu plus en hauteur se meurent. Et il ne faut plus les replanter trop en hauteur, parce que les jeunes ne sont pas aussi motivés que les anciens.

En tant que porteur d'oranges, je m'inquiète de l'avenir de la cueillette d'oranges à Punaauia. J'ai peur que cela disparaisse. C'est la raison pour laquelle, nous devons continuer cette opération, c'est l'emblème de Punaauia. Il faut que l'on fasse en sorte que cela perdure.

Message aux jeunes : qu'ils restent solidaires et qu'ils continuent dans cette voie. Nous, nous n'avons pas de travail, nous vivons de cela. Que les jeunes en fassent de même, qu'ils n'abandonnent pas."

Roihau Ah-Sin, 38 ans
"C'est assez compliqué et il faut penser à sa propre sécurité aussi"
 
"Ça fait 25 ans que je viens sur le plateau. Je le faisais avec des amis et petit à petit, c'est devenu une passion. Tous les ans, on revient. Ce n'est pas facile de venir jusqu'ici, il faut faire beaucoup d'efforts, mais le plaisir de se retrouver avec la nature et les copains, nous attire. Nous sommes devenus une famille aujourd'hui.
Là, on a réussi à avoir à peu près 60 kg, ce qui représente huit glanes.
Je n'ai fait qu'un seul arbre pour l'instant, et je pense que cela me suffit, vu le temps et le chemin à parcourir pour la descente. C'est assez compliqué et il faut penser à sa propre sécurité aussi. C'est une tradition de la commune et l'orange, c'est l'emblème de Punaauia. On est fier de venir cueillir les oranges, c'est un privilège pour nous"

Teahonui, 30 ans
"C'est une fierté pour les natifs de Punaauia"
 
"J'ai commencé la cueillette, lorsque j'avais 7 ans. Je suivais mon père, mais c'est avec mon oncle que je me suis vraiment lancé dans cette aventure.
Je viens sur le plateau, pour m'occuper, parce que je n'ai rien d'autre à faire chez moi. J'espère qu'on pourra descendre vendredi, avec la pluie.
Je suis venu avec mon beau-père et mes cousins. C'est une fierté pour les natifs de Punaauia et ça nous occupe".



Rédigé par Désiré Teivao le Jeudi 20 Juin 2019 à 19:05 | Lu 2833 fois