À Rurutu, la santé avant le Tiurai

Tahiti, le 3 juillet 2020 – Comme dans bien d'autres îles de la Polynésie française, Rurutu a pris la décision en pleine période de confinement de ne pas organiser de Tiurai cette année. Une décision qui a privilégié l'aspect sanitaire à l'économique.

En cette pleine période "hivernale" aux Australes, le Tiurai ne viendra pas réchauffer les cœurs des habitants de Rurutu suite à la décision prise à la mi-mai par le comité organisateur en consultation avec la commune. Cette décision, unique dans l'histoire du Tiurai, s'est justifiée à l'époque par la crise de la Covid-19, comme le rappelle Nuupure Riveta, trésorière de l’association et directrice de l’école primaire de l’île : « Pour moi, il faut penser aux enfants d’abord. Je veux voir tout le monde sain et sauf ici à l’école pour la rentrée ». Avec les nombreux visiteurs de Tahiti et d'ailleurs qui se rendent à Rurutu pendant les longues vacances, il a été jugé plus prudent d’éviter l'organisation d'un grand rassemblement, même si aucun cas n'a été déclaré sur l'île depuis le début de la crise. De ce fait, certaines associations sont soucieuses de l’impact économique et social de l’annulation de cet événement incontournable à Rurutu.

Les mama de Rurutu comme de Rimatara sont reconnues pour la qualité de leurs vanneries. Des nombreuses familles au revenu modeste dépendent de cette activité mais, après le confinement, les artisans n’arrivent plus à écouler leurs marchandises, les clients manquent. « Certains ont choisi de baisser leurs prix donc, du coup, tout le monde est obligé de suivre », explique Ponia Paparai, président de la Fédération Va’ine Rima’i no Rurutu tu noa. « Le Tiurai représente normalement un moment de vente très fort pour nous, mais cette année il n’y en aura pas ». Et même si le salon des Australes, programmé en fin d’année à Papeete, est toujours prévu, les subventions qui permettent aux mamas de se déplacer à Tahiti ne sont plus assurées. Pour essayer de combler ce manque à gagner, une exposition de tressage se tiendra à la mairie de Moerai, du 10 au 17 juillet, organisée par la fédération et animée par des ventes de plats et autres activités, comme un concours de préparation de poi taro, organisé par l’association Te Aru Ora. Il faut espérer que le public soit au rendez-vous.

Les forains, eux aussi, normalement fidèles à leurs barraques sur la place Arioi, reconnaissent que cette année sera bien exceptionnelle, rappelant la perte financière que cette annulation engendre. Cependant, ils ne remettent pas en cause cette décision, mais s'interrogent sur ce qui va se passer dès que les restrictions de la quarantaine seront levées pour les voyageurs internationaux en mi- juillet à Tahiti. « C’était la bonne décision, il faut éviter de propager cette maladie et de toute façon nous serons de retour l’année prochaine », déclare le forain Marcel Chong.
 
Des festivités, seule la fête du 14 juillet a été maintenue, dont la course de cheval à cru sur la plage de Avera, un incontournable, grâce à l’association Taatiraa Equestre no Rurutu, qui a reprogrammé la course d’avril pour remplacer celle du Tiurai. « Il faut bien que la vie continue. Les festivités et petits prix du Tiurai manqueront aux jeunes de l’île. Ils ont besoin d'un moment pour s’amuser et cette course peut se dérouler dans le respect de la distanciation sociale », souligne le bureau organisateur.
L’amicale des retraités de Rurutu a aussi eu l'idée de programmer un événement en juillet : un diner-bal, le samedi 24. Un moyen de fêter le Tiurai et aussi de remplacer les festins du grand umua’i (mariage traditionnel), qui devait avoir lieu en fin de mois et qui a été repoussé en 2021, si la Covid-19 le permet...