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​La Polynésie moins sensible à Omicron


Tahiti, le 2 février 2022 – “On serait moins exposé à des formes graves que dans d'autres pays, c'est l'hypothèse”, confirme l'épidémiologiste Henri-Pierre Mallet, qui explique que le fort taux de vaccination (78,2% des plus de 12 ans) et la proximité de la dernière vague Delta ont pu immuniser collectivement la population, non pas contre les contaminations mais contre les formes graves.
 
Flambée des contaminations, mais calme plat sur les hospitalisations. Les semaines passent et le constat demeure sur l'épidémie de variant Omicron qui sévit actuellement au fenua. Mercredi après-midi, la plateforme Covid-19 du Pays a tenu un nouveau point presse destiné à commenter les derniers chiffres du bilan épidémiologique hebdomadaire de l'épidémie. Le constat est implacable. En une semaine, le nombre de nouveaux cas découverts a encore doublé, passant de 425 à 881. Parmi eux, 799 cas locaux majoritairement diagnostiqués à Tahiti. “La circulation s'intensifie à Tahiti et dans plusieurs îles par cluster”, précise le bulletin hebdomadaire.
 
Des chiffres qu'il faut pourtant manier avec précaution, insiste la plateforme Covid-19. “La surveillance des cas incidents de Covid Omicron sous-estime très probablement et de façon importante la circulation réelle du virus. En effet, le nombre de tests réalisés augmente peu alors que le taux de positivité a doublé. La fréquence des formes asymptomatiques et l’absence de formes graves en population n’incite pas la population au dépistage”, détaille le rapport épidémiologique. La plateforme recommande donc à l'avenir de suivre “d’autres indicateurs que les nouveaux cas incidents”, tels que les arrêts de travail, l'absentéisme scolaire et bien sûr la fréquence des hospitalisations et des formes graves.
 
Sur ce dernier point justement, les chiffres confirment que “les taux d’hospitalisation et de décès sont ainsi pour l’instant très inférieurs à ceux constatés lors des vagues précédentes”. Deux patients ont ainsi été hospitalisés durant la semaine passée, en service conventionnel. “Il s’agissait de personnes âgées, porteurs de comorbidités, dont l’évolution a été favorable”. À côté de ces chiffres, l'épidémie de grippe a déjà causé près de 160 hospitalisations et une demi-douzaine de décès depuis le mois de décembre…
 
Immunité
 
L'hypothèse élaborée ces dernières semaines par l'épidémiologiste de la Direction de la santé, le Dr Henri-Pierre Mallet, semble aujourd'hui fortement se confirmer. Selon le médecin, la récente et tragique vague Delta a vraisemblablement contaminé et immunisé une immense partie de la population. Ajoutée à la couverture vaccinale (double dose) de 78,2% de la population des plus de 12 ans, l'immunité collective semble jouer une protection significative contre les formes graves du variant Delta au fenua. “On a des taux de vaccination maintenant qui sont satisfaisants, très satisfaisants. Et on a eu cet épisode de vague Delta récente, qui a certainement également procuré une immunité, en partie, à la population. Donc avec tous ces éléments-là, on pense qu'effectivement on limite terriblement les formes graves de la maladie. Pour autant, on ne limite pas la transmission qui est très présente”, explique le Dr Mallet.
 
“Cette histoire immunitaire n'arrête pas Omicron, mais elle le rend encore plus bénin qu'il ne l'est naturellement. C'est-à-dire qu'Omicron est moins pathogène, ça on l'a montré. Mais Omicron sur une population antérieurement protégée l'est encore moins. C'est l'hypothèse actuelle.” Et le médecin de citer en exemple le cas d'autres pays qui ont connu également une très forte et récente vague Delta, pour se retrouver quasiment protégés d'Omicron. “On serait moins exposé à des formes graves que dans d'autres pays, c'est l'hypothèse. C'est ce qu'a constaté l'Afrique du Sud. Il y a eu une grosse vague de cas, mais ils ont eu peu de conséquences en termes d'hospitalisations et de décès, en arguant du fait de leur immunité préalable. En l'occurrence, plus au Delta qu'à la vaccination. Ça reste une hypothèse. Mais qui reste entendable.”
 
Alléger les mesures oui, la vaccination non
 
Face à cette épidémie pourtant bien présente, le Dr Mallet recommande de “garder des réflexes de bon sens”. Ne pas emmener les enfants malades à l'école, éviter les contacts si l'on est soi-même malade, continuer à porter le masque avec des gens qu'on ne connaît pas… “L'allègement des mesures, on y réfléchit déjà”, confirme l'épidémiologiste. Pour autant, il ne semble pas vraiment question de toucher aux mesures d'incitation à la vaccination. “Le pass vaccinal, sans se mentir, a un double intérêt. Ça a toujours l'intérêt de protéger les gens, mais un peu moins de la transmission. Et de façon importante, c'est pour encourager la vaccination.”
 
À ceux qui attendraient aujourd'hui la levée de l'obligation vaccinale ou du pass, le médecin renvoie sur ce point à une question de santé publique nationale. “C'est une politique nationale qui a été prise, qui appartient purement à l'État, qui a été reprise ici par le haut-commissariat et on n'a absolument pas la main là-dessus”, balaie le Dr Mallet. “Par contre, effectivement, on pourra réfléchir à l'intérêt de la combinaison d'un pass vaccinal et d'une obligation vaccinale telle qu'elle est dans notre loi locale. Pour, peut-être, adapter les choses. C'est quelque chose sur lequel nous réfléchissons. Le contexte épidémiologique change un peu. Le pass vaccinal est instauré. Il est possible, non pas qu'on annule, mais qu'on re-réfléchisse aux populations pour lesquelles il serait le plus important qu'elles soient vaccinées via cette loi.”
 
Antoine Samoyeau



Rédigé par Antoine Samoyeau le Mercredi 2 Février 2022 à 20:36 | Lu 3036 fois