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Nucléaire : l'Eglise protestante envisage de poursuivre l'Etat devant l'ONU


Le nucléaire, le projet Ecoparc ou encore le patrimoine ancestral, l'Eglise protestante mā'ohi a fait connaître sa position au terme du 132e synode ce dimanche.
Le nucléaire, le projet Ecoparc ou encore le patrimoine ancestral, l'Eglise protestante mā'ohi a fait connaître sa position au terme du 132e synode ce dimanche.
PAPENOO, le 7 août 2016 - Le 132ème synode de l'église protestante mā'ohi s'est achevé ce dimanche matin à Papeno'o. L'occasion pour le conseil supérieur de rendre ses conclusions après une semaine de discussions. Le nucléaire, le projet Ecoparc ou encore les ressources aériennes, maritimes et terrestres, sont les sujets qui ressortent de ces réunions. Au sujet des essais, l'Eglise protestante mā'ohi dénonce ce qu'elle qualifie de "crimes contre l'humanité".

Plusieurs centaines de fidèles de l'Eglise protestante se sont retrouvés pour la fermeture du 132ème synode à Papeno'o. L'occasion pour le conseil supérieur de dresser le bilan de ses travaux, et les essais nucléaires étaient au centre des discussions. Qualifiés de "crimes contre l'humanité", le bureau directeur a exprimé son inquiétude face à "l'attitude de l'Etat français qui ne prête aucune attention réelle aux malheurs du peuple", précise le communiqué. De ce fait, le conseil supérieur envisage de poursuivre l'Etat devant l'Organisation des Nations Unies (ONU). Il préconise également de retenir la date du 2 juillet comme date "mémorielle pour que le peuple se souvienne du destin funeste que lui a réservé l'Etat".

Un discours qui ravit bien sûr le président du Tavini Huira'atira, Oscar Temaru : "C'est une décision historique et cela va dans le bon sens", clame-t-il. "Il y a eu la réinscription de notre pays en 2013 et ce n'est qu'à partir de ce moment-là que l'on a pu avancer. Parce qu'avant tout ça, nous avions été retirés en 1947. Donc la communauté internationale ne pouvait rien faire pour nous. Je pense que si on était restés sur la liste des pays à décoloniser, jamais la France n'aurait pu faire ses essais nucléaires chez nous."

De son côté, Gaston Flosse prône l'unité : "Je pense qu'il faudrait d'abord que tous les polynésiens soient d'accord. Si le président du gouvernement se rend à l'ONU au mois d'octobre pour soutenir le gouvernement français, au lieu de soutenir la décision de la population, nous allons exposer notre division à l'ONU. Je pense qu'il faut nous mettre tous d'accord et alors nous serons plus forts."

Dans ses conclusions, l'Eglise relève plusieurs dégâts importants causés par ces essais : "La terre, le ciel et la mer qui sont contaminés". Selon la CPS, 7 400 personnes seraient atteintes de cancers liés aux essais nucléaires. Sept victimes ont saisi la justice pour se faire indemniser, seules deux ont eu gain de cause. Autant de raisons qui pousse l'Eglise à agir en ce sens.

Présent, Edouard Fritch réserve sa réaction en conférence de presse demain lundi

Oscar Temaru qui dit d'ailleurs avoir a pris connaissance, il y a un mois, d'un cas très particulier : "Un cas a été reconnu par des spécialistes français. Celui d'une dame qui n'a jamais mis les pieds à Moruroa, qui est morte en 2004 et il y a eu une précision importante. Elle a été contaminée par les essais atmosphérique de 1972."

Si l'Eglise va jusqu'au bout de sa logique, il faudra se demander par quels moyens fera-t-elle parvenir sa plainte devant l'ONU. Puisque la Polynésie ne pourra pas la porter, n’étant pas un Etat. Dans une interview en mars dernier, la question a également été posée à Moetai Brotherson, conseiller spécial aux affaires internationales du Tavini, dont voici la réponse : "Nous sommes en contact avec des cabinets d’avocats internationaux, avec l’ensemble des Etats qui se sont déjà engagés dans ce type de démarche parce que victimes d’essais nucléaires des grandes puissances. Nous avons des échanges réguliers et constants avec leurs équipes de juristes. Nous sommes prudents, méthodiques mais déterminés."

En octobre, Oscar Temaru se rendra à New-York pour défendre le dossier polynésien dans sa démarche de souveraineté. Edouard Fritch, pour sa part, n'a pas souhaité commenter les décisions de l'Eglise protestante, préférant attendre sa conférence de presse de ce lundi après-midi.


NON au projet Ecoparc

Le conseil supérieur de l'Eglise protestante s'est prononcé contre le projet hôtelier dans la vallée de la Maroto. "Grâce à un œil vigilant qui voit au loin les dangers, Dieu ne ferme pas ses yeux face aux erreurs de son peuple. Que ton œil reste vigilant pour percevoir les projets des multinationales et des nations néfastes". Ceci dit, "le conseil supérieur exhorte la communauté à assumer la vocation de sentinelle vigilante tels que Dieu et la terre nous ont légués".

Que le mā'ohi gère ses propres ressources

Dans ses conclusions, le conseil supérieur félicite aussi la décision de l'ONU à restituer au peuple mā'ohi son patrimoine ancestral conformément à la charte des peuples autochtones. "Que ce patrimoine soit protégé de l'avidité des sociétés étrangères qui arrivent en incessantes vagues chez nous, sans ouvrir leur capital aux intérêts locaux, ou sans passer par des sociétés locales."

Plusieurs centaines de fidèles étaient présents, dimanche à Papenoo

Nucléaire : l'Eglise protestante envisage de poursuivre l'Etat devant l'ONU

le Dimanche 7 Août 2016 à 16:30 | Lu 5543 fois