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Droits d'auteur : "la pompe est réamorcée" assure la Sacem


Droits d'auteur : "la pompe est réamorcée" assure la Sacem
Tout est à rebâtir, en Polynésie française, sur les ruines de l’écosystème du droit à la propriété artistique laissées par la Spacem, la société polynésienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique.
Près de vingt ans d’une gestion clientéliste et douteuse, ça laisse des traces. Heureusement qu'ici on est "musicien dans l'âme". Mais il faudra encore quelques mois de patience aux artistes locaux pour pouvoir enfin percevoir les rémunérations qui leurs sont dues au titre de l'exploitation de leurs oeuvres à Tahiti et dans le monde. C'est tout l'enjeu des missions de sensibilisation et d'information qu'effectue la Sacem, en Polynésie, depuis janvier 2011. Vaste chantier, mais noble cause : permettre aux artistes de vivre de leur art.

Aujourd’hui en Polynésie la problématique est double : percevoir des droits, en contrepartie de l’exploitation de musiques, par les radios, dans les hôtels, les commerces et manifestations publiques, partout où la musique est jouée, alors que la Spacem n’a pratiquement plus aucune légitimité à le faire, faute d’accord de représentation et abandonnée par toujours plus de sociétaires, las de son mode de fonctionnement ; et aprés perception, redistribuer aux artistes polynésiens des droits, en vertu et à mesure de l’exploitation d’œuvres dont ils sont propriétaires. Les dispositions légales du code de la propriété intellectuelle sont applicables en Polynésie française.

C’est dans ce cadre législatif, pour palier à la défaillance de la Spacem, dans cette mission de premier ordre pour les artistes, que la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) organisait cette semaine sa quatrième mission d’information depuis janvier 2011.
La Sacem, établissement qui fêtera ses 163 ans en février prochain, était représentée par deux de ses cadres dirigeants, spécialement missionnés, la directrice du département des affaires internationales, Laurence Bony et le nouveau directeur des sociétaires, Louis Diringer.

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En janvier 2011, la Sacem a mis un terme à l’accord de représentation réciproque qui la liait depuis 1978 avec la Spacem, pour la gestion et la protection des droits d’auteurs en Polynésie française. Il s’agit maintenant pour la maison mère de restaurer une situation de droit, dans le pays. Il s'agit d’œuvrer dans l’intérêt de ses sociétaires ou des catalogues qu'elle représente. La Sacem, c’est un répertoire de 40 millions d’œuvres musicales, 137.000 sociétaires et des accords de représentation avec 112 sociétés d’auteurs à travers le monde.

Au plan local, depuis 2011 près d’une centaine d’artistes ont quitté la Spacem pour confier la protection de leurs droits à la Sacem. L’opportunité pour ces artistes de percevoir de nouveau des rémunérations après plusieurs années de défaillance "Spacem". Aujourd’hui l’essentiel de la musique polynésienne est protégé par la Sacem, qui dispose d’un relai, à Papeete, en la personne de Virginie Bruant (tél. : 778 180 ou par mail) .

Nous avons rencontré Laurence Bony et Louis Diringer pour faire le bilan de leur mission en Polynésie française.

Laurence Bony
Laurence Bony
Vous effectuez votre 4e mission à Tahiti depuis janvier 2011 et la rupture de l’accord de représentation réciproque que vous aviez avec la Spacem. Où en est la perception des droits d’auteurs, aujourd’hui en Polynésie française ?

Laurence Bony : Les droits d’auteurs de sources purement polynésienne, s’agissant évidemment du répertoire représenté par la Sacem, progressent puisqu’un certain nombre de contrats ont été signés avec des usagés locaux, essentiellement des radios. Nous avons signé des contrats avec NRJ Tahiti, Rires et Chansons, Taui FM, Radio Maria no te Hau, Radio Te Vevo, Radio Te Hoku Nui aux Marquises et puis plus récemment avec Radio 1 et Tiare FM. Des droits ont commencé à être perçus et une première répartition aura lieu en janvier 2013.

Vous êtes en discussion avec la chaîne TNTV, sur cette question.

Laurence Bony : Oui, les discussions se poursuivent.

Comment votre démarche est-elle perçue par les utilisateurs de musique ?

Laurence Bony : Elle est d’un côté attendue avec impatience par les sociétaires polynésiens, qui nous ont alerté sur la nécessité de pouvoir recréer un cercle vertueux de perception et de répartition des droits d’auteur en Polynésie. Parce qu’ils étaient dans une situation où ils ne pouvaient plus vivre de leurs créations et se trouvaient parfois dans une situation financière et sociale très difficile. Du côté des artistes polynésiens, beaucoup ont choisi de nous rejoindre. Et pour ceux-là, nous sentons qu’ils soutiennent fortement notre action, parce qu’enfin ils ont de la transparence dans la gestion des droits qu’ils nous ont confiés et commencent à percevoir de nouveau des droits d’auteur.

Combien d’artistes polynésiens ont choisi de quitter la Spacem pour rejoindre la Sacem, depuis janvier 2011 ?

Laurence Bony : On compte aujourd’hui une centaine d’auteurs, compositeurs et éditeurs polynésiens qui ont décidé de rejoindre la Sacem, parmi lesquels des grands noms du répertoire polynésien. La part est très significative du marché de la musique local.

Louis Diringer : Ce sont les sociétaires parmi les plus actifs qui ont rejoint la Sacem. Ce qui peut se comprendre, puisqu’en nous confiant leurs droits, ont est à la fois capable de gérer leur répertoire, pour son exploitation en Polynésie, mais pour ceux qui ont le bonheur d’être exploités au-delà de la Polynésie, de leur faire bénéficier des accords de réciprocité que nous avons avec des sociétés locales à travers le monde, avec un retour de droits effectué vers la Sacem permettant de verser à ces ayants-droits la juste rémunération pour l’exploitation de leurs œuvres.

Louis Diringer, directeur des sociétaires de la Sacem
Louis Diringer, directeur des sociétaires de la Sacem
Vous avez organisé une réunion d’information, ce lundi à l’attention des artistes locaux. Quelles avancées estimez-vous avoir accompli à cette occasion ?

Laurence Bony : Déjà des avancées par rapport aux sociétaires qui ont choisi de rejoindre la Sacem, nous avons engagé un travail de mise à jour du catalogue de ces grands auteurs. Je pense qu’ils ont compris qu’en adhérant à la Sacem ils avaient accès à un niveau de service qui leur donnait énormément d’informations sur leur catalogue et sur la gestion de leurs droits et qui leur offrait la présence de leur catalogue dans toutes les bases de données internationales.

Louis Diringer : Ce point est fondamental. Les artistes locaux n’avaient plus de visibilité sur le catalogue de leurs œuvres. Ils ont adhéré à notre société : la Sacem, c’est un répertoire de près de 4,8 millions d’œuvres ayant fait l'objet d'une exploitation récente, indexées et consultables en ligne. Des services sont disponibles, notamment grâce à l’application pour mobile "Les Oeuvres" qui permet très rapidement à un artiste, de constater le statut et l’état d’exploitation de ses œuvres. (…) Tout d’un coup les choses deviennent lumineuses et il y a de la transparence.
Les artistes qui ont confié la protection de leurs œuvres à la Sacem ont la certitude que leur catalogue sera protégé, diffusé à travers le monde dans les bases de données internationales, de manière immédiate. Ils ont la certitude que chaque fois que des contrats seront signés avec notre société, ils auront des retours sur droits, des feuillets de répartition circonstanciant dans le détail l’exploitation de leurs œuvres en Polynésie et dans le monde.
Pour les artistes, comprendre cela et apprendre que nous effectueront une répartition dès le 5 janvier, c’est du concret : la réalité de l’exploitation de leurs œuvres, la réalité des droits qu’ils touchent. Les montants de répartition seront plus ou moins importants, mais au moins la pompe est réamorcée.
Au-delà des réponses techniques que nous avons apportées, cette réunion d’information nous a permis de préciser que nous sommes là, dans une réalité de terrain et que celle-ci doit nous permettre, non seulement de communiquer, mais de rendre compte de notre travail.


A propos des droits d’auteurs en Polynésie française, un collectif s’est rassemblé récemment, le Comité Territorial pour la musique de Polynésie française qui était présent à cette réunion d’information, lundi. Un communiqué a été publié mercredi à l’initiative du CTMPF laissant entendre un possible partenariat avec la Sacem. Quelles sont vos relations avec cette association ?

Louis Diringer : Nous avons reçu le bureau de cette association, en présence de certains de nos sociétaires. Nous sommes à l’écoute. Mais on ne peut pas parler de partenariat : ce comité est très récent ; son action s’inscrit plus sur le futur que sur le présent. Maintenant, nous avons été très surpris de la publication de l’article dans les colonnes du quotidien La Dépêche de Tahiti, mercredi. Je ne suis pas certain que de publier cet article sans nous avoir informé soit le meilleur moyen de créer un lien de confiance avec la Sacem : la méthode n’est pas très loyale. Cela ne donne en aucun cas une quelconque caution, ou légitimité de représentation au CTMPF pour parler au nom de la Sacem.

La Sacem a-t-elle le projet à terme d’installer une antenne en Polynésie française, après l’échec de la Spacem ?

Laurence Bony : Ce serait utile. Cela nous est demandé. Nous sommes dans une phase de réflexion.

Louis Diringer : La situation serait différente de celle que nous avons connue avec la Spacem, qui était une société qui nous représentait localement, dans la mesure où cette antenne aurait un lien de dépendance avec le siège et serait contrainte de rendre des comptes régulièrement. Mais cela est prématuré, même si la réflexion est en cours et sera probablement présentée en conseil d’administration de la Sacem, dans les prochains mois.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 7 Décembre 2012 à 15:28 | Lu 31354 fois