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La chirurgie esthétique risque une opération fiscale


La chirurgie esthétique risque une opération fiscale
PARIS, 7 juin 2012 (AFP) - Seins refaits, nez redressés, liposuccion des cuisses ... La chirurgie esthétique, épargnée jusqu'ici par la TVA, pourrait bien être taxée à 19,6% et générer une source non négligeable de revenus pour l'Etat.

Les spécialistes de la chirurgie esthétique remodelaient jusqu'ici les visages et les corps sans que leurs actes, très rémunérateurs, ne soient soumis à la TVA, dont le principal taux en France est de 19,6%.

L'administration fiscale a mis un certain temps à réaliser qu'en 2003 la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) avait rendu une décision selon laquelle ne peuvent être exonérés de TVA que les actes de chirurgie esthétique "poursuivant une finalité thérapeutique".

Or la plupart de ces actes, par exemple le remodelage des seins, le comblement des rides, la liposuccion ou l'épilation au laser, ne visent qu'à rendre plus beau et/ou plus jeune et ne doivent pas être confondus avec la chirurgie réparatrice, remboursée elle par la sécurité sociale.

L'attention du fisc a été attirée en 2007, de façon toute à fait fortuite, par une femme médecin du Vaucluse qui a déclaré ses actes aux impôts sur les conseils de son comptable.

"C'est elle qui a déclenché l'affaire sans le vouloir", raconte à l'AFP le docteur François Turmel, président de la Fédération syndicale des médecins esthétiques et anti-âge (FSMEA).

"Au bout d'un an ou deux, elle s'est rendue compte qu'elle était la seule en France à payer la TVA et a pris un avocat fiscaliste. De fil en aiguille, c'est arrivé jusqu'à Bercy qui lui a répondu, en janvier 2012, que tout est normal et que ses actes sont bien imposables", poursuit le docteur Turmel qui a déclenché la contre-attaque de la profession par un recours pour abus de pouvoir auprès de la justice administrative.

préjudice psychologique ou social

Mais l'opération fiscale semble bien engagée. Le 10 avril, la puissante Direction générale des Finances publiques (DGFiP) a publié un rescrit. Ce terme désigne une réponse de l'administration fiscale à portée générale ayant pour origine une réponse apportée à un contribuable.

Le texte est formel: "les actes à visée purement esthétique, qui ne peuvent être considérés comme poursuivant un tel but (une finalité thérapeutique, ndlr) doivent être soumis à la TVA". En d'autres termes, la praticienne provençale ne va pas rester longtemps la seule assujettie à la TVA.

Bercy est dans l'attente des conclusions d'un groupe de travail, piloté par la direction de la législation fiscale et qui comprend des "organisations représentatives du secteur de la santé". Il doit déterminer, dans les mois qui viennent, les actes qui seraient exonérés de TVA.

Le rescrit évoque ainsi "certains actes de chirurgie esthétique justifiés par un risque pour la santé du patient ou liés à la reconnaissance d'un grave préjudice psychologique ou social".

Ces actes sont parfois d'ailleurs remboursés par l'assurance maladie qui prend en charge par exemple les opérations pour réajuster des oreilles décollées ou pour diminuer le volume de seins trop lourds ... S'ils dépassent chacun les 300 grammes.

"Il va être difficile pour nous d'apprécier les préjudices psychologiques ou sociaux de nos clients, pour ensuite les justifier devant l'administration fiscale, c'est mission impossible", s'emporte le docteur Turmel.

S'il est encore difficile d'estimer les recettes supplémentaires pour l'Etat d'une TVA sur la chirurgie esthétique, il est plus aisé de déterminer le coût supplémentaire pour les consommateurs: ainsi un comblement des rides pourrait passer de 300 à 360 euros et une pose de prothèses mammaires de 3.000 à 3.600 euros.

hel/db/cld

Rédigé par Par Hervé LIONNET le Jeudi 7 Juin 2012 à 05:53 | Lu 834 fois