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Vie précaire dans l'ombre d'un volcan en Indonésie


Berastagi, Indonésie | AFP | mardi 23/06/2015 -Elif Dalimunthe a encore dû fuir son village, pour la troisième fois ces dernières années, à la suite d'une nouvelle éruption volcanique dans l'ouest de l'Indonésie, témoignant de la vie précaire de milliers d'habitants à proximité des nombreux volcans de l'archipel.

"J'ai entendu un grand boom et vu d'épais nuages de cendres se dégager" du volcan, raconte à l'AFP cette cultivatrice de 30 ans, en décrivant les violentes éruptions du mont Sinabung au début du mois, qui l'ont obligée à partir vite: rassembler sa famille, s'engouffrer dans un bus et se précipiter sur des motocyclettes pour aller vers un refuge temporaire.

Ces habitants figurent parmi les 10.000 personnes évacuées de leurs maisons après les éruptions au mont Sinabung sur l'île de Sumatra, un volcan qui dormait depuis 400 ans avant de se réveiller brusquement en 2010.

Culminant à près de 2.500 mètres d'altitude, le Sinabung est l'un des 129 volcans actifs de ce pays qui en totalise le plus grand nombre au monde. L'Indonésie est située sur la "ceinture de feu du Pacifique", un alignement de volcans qui bordent l'océan Pacifique en suivant un ensemble de limites de plaques tectoniques et de failles sismiques.

Des millions de pauvres vivent sur des collines montagneuses où les sols volcaniques sont très fertiles pour l'agriculture. A chaque éruption, des habitants refusent de quitter leur domicile tandis que d'autres insistent pour retourner rapidement dans leur village, en dépit du danger.

Installée à quelques kilomètres seulement du mont Sinabung, Dalimunthe a fui son petit village pour la première fois en 2010 à la suite d'une éruption, puis à nouveau en septembre 2013, pour plus d'un an.

Et l'an passé, alors qu'elle vivait dans un refuge, sa maison en bois a été détruite par un épais nuage de cendres brûlantes provenant d'une nouvelle éruption, qui a provoqué la mort de 16 personnes.

"Je déménagerai quand les enfants seront plus grands", dit-elle, assise sur un paillasson dans un hall exigu abritant environ 500 personnes à Berastagi, ville où nombre d'habitants ont trouvé refuge.

- "Qui veut acheter nos maisons? -

En dépit du danger provoqué par le dégagement de nuages de cendres brûlantes lors de la dernière éruption, les autorités se sont heurtées à nouveau à la résistance de villageois refusant de quitter leurs maisons et leurs terres où ils font pousser des légumes.

D'autres ont insisté pour retourner chez eux malgré les risques, afin de récolter le piment, les tomates et pommes de terre nourrissant la famille.

Syafitri Sitepu, vendeuse de légumes, a fui son village près du mont Sinabung à la mi-juin, alors que son mari y est retourné par la suite pour s'occuper des récoltes: "Il est le gagne-pain de la famille. S'il ne travaillait pas, comment pourrions-nous vivre et acheter du lait pour notre enfant?", interroge cette femme de 30 ans.

Les autorités ont pourtant mis en garde contre le risque de nouvelles éruptions violentes après le soudain regain d'activités, des quantités de cendres brûlantes, de fumée et de pierres s'étant échappées jusqu'à trois kilomètres de distance.

Outre les évacuations, les autorités doivent rapidement s'occuper de trouver des tentes, des couvertures, de l'eau potable et des vêtements pour les milliers d'habitants contraints de quitter leurs maisons.

Sur le plan économique, les éruptions du Sinabung pèsent lourd: les dégâts causés en 2013-2014 ont coûté plus de 100 millions de dollars, selon des estimations officielles.

Alors de nombreux habitants sont réticents à quitter leur village, d'autres ne veulent pas y retourner en raison du danger. Mais ils n'ont souvent pas le choix, les communes n'ayant pas les moyens de proposer des solutions alternatives, telle la construction de nouvelles maisons en lieu sûr.

Rosalinda, une femme de 55 ans évacuée récemment, serait prête à vivre plus loin du volcan Sinabung, dans un lieu plus sûr. Le problème, c'est qu'"il faut de l'argent pour déménager, ce qui veut dire vendre d'abord la maison, dit-elle. Mais qui veut acheter nos maisons?"

Rédigé par () le Mardi 23 Juin 2015 à 06:33 | Lu 595 fois