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Tensions syndicales : la Fraap isolée et critiquée


Patrick Galenon a critiqué les méthodes de négociation de la Fraap qu'il a jugé de "non-respectueuse". Crédit photo : Thibault Segalard.
Patrick Galenon a critiqué les méthodes de négociation de la Fraap qu'il a jugé de "non-respectueuse". Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 22 janvier 2025 - Le vote de lundi, sur la revalorisation des salaires des agents de catégorie D, continue de cristalliser les tensions entre syndicats. Alors que la CSTP-FO et A tia i mua ont approuvé la proposition gouvernementale, la Fraap s'y oppose fermement, dénonçant une avancée insuffisante et réclamant même l'invalidation du vote. Un désaccord qui illustre un profond clivage stratégique. Dans une interview, le leader de la CSTP-FO a regretté, ce mercredi, les "ultimatums" et le manque de respect de la Fraap envers le gouvernement.
 
La Fraap trop dans l'ultimatum ? C'est du moins l'opinion du leader syndical de la CSTP-FO, Patrick Galenon. En effet, le bras de fer entre syndicats s’intensifie au sujet des augmentations salariales pour les catégories D de la fonction publique en Polynésie française. Alors que la proposition gouvernementale, approuvée lundi en Conseil supérieur de la Fonction publique, prévoit une revalorisation graduée de 10 à 12 points selon les échelons, la Fraap (Fédération de rassemblement des agents de l'administration de Polynésie) s’oppose farouchement à ce vote. Une position qualifiée d'incompréhensible par les autres organisations syndicales, notamment la CSTP-FO et A Tia i Mua, qui ont voté en faveur de l’accord.
 
Un vote qui divise
 
La proposition gouvernementale adoptée lundi accorde des augmentations progressives : 12 points pour le premier échelon des deux premiers grades, 11 points pour le premier échelon du troisième grade, et 10 points pour le dernier échelon des catégories D. Cela se traduit par une hausse pouvant aller jusqu'à 12 000 francs brut par mois pour les agents concernés, soit une enveloppe budgétaire totale de 266 millions de francs pour le Pays.
 
Opportuniste, Patrick Galenon, leader de la CSTP-FO, s’est félicité de cette avancée qu’il qualifie de pragmatique : “Tout le monde voudrait plus, mais il faut savoir se satisfaire des progrès obtenus. Nous avons obtenu 12 points supplémentaires, ce qui est significatif.”
 
À l’inverse, la Fraap, qui avait initialement proposé une augmentation de 524 millions de francs, a voté contre cette mesure, dénonçant une progression insuffisante. Pourtant, le syndicat, qui revendique être à l’origine des négociations et de cette proposition du gouvernement, se retrouve aujourd’hui isolée. Pire, il a demandé l’invalidation du vote. Et cela provoque l'incompréhension de Patrick Galenon : “Ils ont voté contre. Ils n’ont rien obtenu du tout [...] Ils veulent annuler le vote ? Nous sommes en démocratie, ce sera difficile”, a-t-il ironisé mercredi, lors d'une interview accordée à la presse.
 
La Fraap “trop dans l'ultimatum”
 
L'inflexibilité de la Fraap est perçue comme un ultimatum par ses homologues syndicaux. Patrick Galenon n’a pas mâché ses mots, qualifiant leur position “d'inatteignable” et leurs méthodes de “non respectueuses”.On a du mal à les suivre. C'est incompréhensible... Ils ont promis la lune aux agents dans les services.”
 
Selon lui, les négociations auraient dû se faire dans un cadre plus constructif et respectueux : “Il faut respecter celui qui paye. Là c'est le gouvernement qui paie, c’est une question de négociation. Ce n'est pas de savoir si les 266 millions mis sur la table par le gouvernement sont raisonnables ou pas. Si on pensait qu'il pouvait mettre plus, on aurait suivi le mouvement. Maintenant, il faut prendre ce que l'on peut.” Le leader de la CSTP-FO a également évoqué les provocations des leaders syndicaux de la Fraap : “J’ai entendu des insultes et des remarques désobligeantes de leur part. Ce n’est pas une manière de négocier."
 
Quant à l'avis des principaux intéressés, les agents de catégorie D, ceux-ci seraient divisés, selon Joséphine Mateha, agent de la Direction de l'équipement et représentante syndicale de la CSTP-FO. “Ils ne comprennent pas tous qui touchera quoi”, explique-t-elle
 
Un bloc syndical fragilisé
 
Reste qu'au-delà des divergences sur le fond, cette situation met en lumière les fractures au sein du bloc syndical polynésien. Tandis que la Fraap souhaite conforter sa position en s'attribuant les mérites de ce vote, CSTP-FO et A tia i mua restent perplexe face aux méthodes employées. “La Fraap prétend être majoritaire, mais ils n’ont que 900 voix, bien loin des 3.500 nécessaires pour être représentatifs au niveau du Pays. Ils parlent de grève générale, mais ils n’en ont même pas les moyens.” Pour l’heure, la Fraap n’a pas encore officiellement déposé de contentieux pour contester le vote de lundi, mais son opposition continue à semer le trouble.
 

Rédigé par Thibault Segalard le Mercredi 22 Janvier 2025 à 16:06 | Lu 3225 fois