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Santé : la télémédecine en remède à l'isolement géographique


Santé : la télémédecine en remède à l'isolement géographique
Papeete, 5 octobre 2012 : Une démonstration de consultation médicale en visio-conférence est faite par le ministre de la Santé, Charles Tetaria afin de présenter au chef du gouvernement, Oscar Temaru, et au vice-président, Antony Geros, le réseau de télémédecine que met en place le Service de la Santé et qui se trouve encore au stade expérimental. Deux consultations distantes sont simulées en duplexe avec Tubuai, dans l'archipel des Australes, à 640 kilomètres au sud de Tahiti, puis Rangiroa, archipel Tuamotu, à 350 km au nord est du centre administratif de Polynésie française.

Ce réseau polynésien de partage l'information et de l'expertise médicale s'appuie sur les infrastructures de communication existantes et les moyens modernes de transmission de l'information qu'offre internet, pour développer un service de télémédecine. Il promet d'offrir à moindres coûts une permanence médicale, même dans les îles les plus éloignées, ou faiblement peuplées. Il se ramifie à la faveur du développement du réseau internet sur le vaste territoire de 5 millions de km2 de la Polynésie française.

Le territoire bénéficie du haut débit par fibre optique, sur les îles de la Société, depuis la mise en place de réseau Honotua. Pour le reste, l’accès internet est possible par voie satellitaire mais n’est pas présent partout. Sur les 120 sites de la direction de la santé susceptibles de bénéficier de la télémédecine, une trentaine n’a pas d’accès internet voire pas d’accès téléphonique.

La solution technique s'appuie dans un premier temps sur le réseau internet public Mana ou utilise les moyens de communications satellitaires. Le principal écueil à l’utilisation de moyens de communication satellitaire est le coût financier de cette option. L'investissement est estimé à 100 millions Fcfp, pour le Ve Sat avec hot spot, et 450 millions Fcfp pour un équipement complet en valisettes. Le coût de transmission évalué à 52,2 millions Fcfp pour une estimation annuelle de 6.000 consultations à 8.700 Fcfp l'une, par le réseau satellite. Une négociation est en cours, à ce titre, avec l’Office des postes et télécommunications.

Parallèlement à ce réseau de télémédecine, et pour en assurer le pilotage, le service de la Santé met en place l’Institut de Régulation Sanitaire et Sociale, à Pirae, dans un bâtiment contigu au Centre hospitalier de Polynésie française (CHPF). Cet organisme est un groupement de coopération sanitaire réunissant des moyens de la direction de la santé (télémédecine, centre médical inter îles, cellule itinérante), du CHPF (SAMU CESU, cellule médecine de catastrophe, consultations médicales avancées), de la DAS (ligne verte sociale) et de la Caisse de prévoyance sociale (gestion des EVASAN programmées). L’objectif est de regrouper, en une même unité de lieu, tous les services intervenant dans la prise en charge (hors îles du vent) à des fins d’optimisation des moyens, de cohérence de prise en charge et de facilité de parcours de santé pour les patients des îles.

On sait aujourd'hui que la Durée Moyenne de Séjour (DMS) au CHPF est supérieure à la moyenne nationale des établissements de taille équivalente et que le tarif du prix de journée est 10 fois supérieur à celui des hôpitaux périphériques.

La Chambre territoriale des comptes a rapporté en janvier 2011 qu'en Polynésie, les évacuations sanitaires inter îles sont en progression exponentielle depuis 1989. Cet accroissement est lié à l’augmentation des demandes de consultations, examens spécialisés ou hospitalisations. Les patients de certaines îles n’ayant, à l’heure actuelle, pas d’autre choix.

En 2008, la moitié des habitants de l’archipel des Tuamotu Gambier a bénéficié d’une Evasan programmée, le chiffre est de 1/3 pour les habitants des Australes et d’environ un quart pour les autres archipels. Cette même année, le nombre des évacuations sanitaires programmées était de 25.452 (soit 70 par jour) pour un coût global de 1.077 Mds Fcfp.

Le réseau de télémédecine permet d'espérer à termes la mise en place d'un système affiné de régulation des évacuations sanitaires programmées alors que la pertinence de la demande d’évacuation sanitaire est, à l’heure actuelle, souvent rendue difficile à évaluer :
• par les difficultés d’accès à des renseignements fiables, d’ordre technique ou humain ;
• par manque de traitement des informations médicales, il n’existe aucun traitement des informations médicales recueillis ;
• par manque de coordination des demandes entraînant des évacuations multiples pour un même patient ;
• par manque de procédures dans les prises en charge spécialisées entraînant de grandes disparités et une multiplication des actes.

Une étude statistique menée sur les données de la subdivision des Tuamotu Gambier montre qu’environ 10 à 15 % des motifs d‘évacuation relèvent d’une simple consultation de médecine générale.

Une organisation sanitaire confrontée à l'extrême dispersion territoriale


Le vaste territoire de Polynésie Française est constituée de cinq archipels, 118 îles dispersées sur un espace océanique vaste comme l'Europe, pour une population d'environ 270 000 habitants dont 80% concentrée sur Tahiti et Moorea. Son centre administratif et sanitaire, Papeete, est distant de plus de 1500 km de certaines îles.

Ces caractéristiques géographiques et démographiques posent le problème d'une organisation coûteuse, conjuguées à l'exigence sanitaire qu'à le Pays d'offrir à la population une structure sanitaire ouverte en permanence, sur chaque île habitée. Cela impose un important secteur public, seul en charge des archipels éloignés alors que les offres de soin privées se concentrent sur l'agglomération urbaine de Papeete, à Tahiti, et sur Moorea.

Aussi, directement rattachées à la direction de la santé, 126 structures publiques de proximité sont-elles réparties dans 78 îles pour assurer des soins sur la plus grande partie du territoire : 4 hôpitaux périphériques, implantés à Taravao (presqu’île de Tahiti), Moorea, Uturoa (Raiatea, Îles Sous-le-Vent) et Nuku Hiva (Marquises) ; 7 centres de consultations spécialisées ; 20 centres dentaires ; 13 centres médicaux ; 17 dispensaires ; 22 infirmeries ; 43 postes de secours.

Des missions sont organisées par la direction de la santé pour les îles qui ne disposent pas d’une présence médicale permanente.

Pour compléter ces moyens un réseau inter-îles de médecins, géré par le Centre hospitalier de Polynésie française de Pirae, organise des consultations spécialisées ponctuelles auprès des patients éloignés.

Mais ce réseau ne permet pas de faire l’économie d’un dispositif d’évacuation sanitaire (EVASAN) coûteux, qui prend en charge le flux des patients transportés dans le cadre de l’urgence ou devant bénéficier d’examens spécialisés ou d’hospitalisations programmées, tant en Polynésie française qu’en métropole et en Nouvelle-Zélande, pour les cas les plus graves.


Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 5 Octobre 2012 à 11:58 | Lu 1702 fois