Tahiti Infos

Papouasie: démission du Premier ministre, doutes sur un contrat gazier


Port Moresby, Papouasie-Nouvelle-Guinée | AFP | mercredi 28/05/2019 - Le Premier ministre de Papouasie-Nouvelle-Guinée  a officiellement démissionné mercredi,  geste d'apaisement dans une crise politique provoquée en particulier par un contrat à plusieurs milliards de dollars avec des groupes français et américain.

Au pouvoir depuis 2011 et menacé d'un vote de confiance qu'il semblait sûr de perdre, Peter O'Neill a annoncé au Parlement qu'il avait présenté sa lettre de démission au gouverneur général.
"Par la présente, je démissionne de mes fonctions de Premier ministre de l'Etat indépendant de Papouasie-Nouvelle-Guinée avec effet immédiat", dit cette lettre obtenue par l'AFP. Le Premier ministre a pris sa décision "dans l'intérêt du maintien de la stabilité de notre pays".
Durant son long règne sur l'archipel multiethnique où l'on parle plus de 800 langues, il avait été critiqué pour la corruption endémique et le sous-développement chronique qui affligent ce pays parmi les plus pauvres du monde, théâtre également de la rivalité entre la Chine et les Etats-Unis.
L'achat de 40 Maserati pour transporter les officiels à Port-Moresby l'année dernière lors du sommet de l'Apec avait été critiqué par l'opposition.
Mais la grogne s'est cristallisée autour du contrat gazier à 13 milliards de dollars conclu avec le français Total et l’américain ExxonMobil. Les leaders tribaux et régionaux estiment être lésés dans le partage des bénéfices. 
Le ministre des Finances James Marape fut le premier à claquer la porte du gouvernement en déclarant que ces investissements ne profiteraient pas aux huit millions d'habitants, aux entreprises locales ou aux régions.
Un programme gazier similaire est en vigueur depuis quelques années mais n'a guère insufflé de croissance à un pays où 70% de la population n'a pas d'accès fiable à l'électricité. 
M. O'Neill avait fait traîner sa démission en longueur, intentant une action en justice pour rester au pouvoir, ce qui avait suscité des débats houleux au Parlement. 
Un vote parlementaire pour lui trouver un successeur est attendu dès jeudi. L'opposition divisée semble pour l'heure s'être entendue sur Patrick Pruaitch, chef du Parti de l'alliance nationale.
D'après certains spécialistes, ce départ pourrait remettre en cause les gigantesques projets d'infrastructures qui ont seulement bénéficié selon leurs détracteurs à la capitale et à l'élite.
"Le départ de M. O'Neill peut potentiellement marquer un changement de politique du gouvernement papouasien", estime Jonathan Ritchie, de l'Université Deakin de Melbourne. "Mais certains observateurs papouasiens bien informés soupçonnent qu'il s'agit d'un changement cosmétique".
Le nouveau gouvernement devrait réexaminer le partage des bénéfices découlant du projet de gaz naturel liquéfié qui vise à doubler quasiment les exportations gazières de la Papouasie.
"Le point de contentieux c'est l'accord de partage avec les propriétaires fonciers locaux", explique Radul Islam, analyste chez Rystad Energy, qui souligne cependant que tout retard porterait atteinte aux intérêts de l'archipel.
La Papouasie "est en concurrence avec d'autres pays producteurs de GNL", a-t-il dit à l'AFP. "Tous les participants à ce projet savent qu'il s'agit d'une course". Tout "retard augmentera les coûts et la compétitivité des exportations de GNL de la Papouasie".

le Mercredi 29 Mai 2019 à 06:10 | Lu 462 fois