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Mission en Nouvelle-Calédonie du Groupe Mélanésien Fer de Lance : reportée jusqu’à nouvel ordre


Mission en Nouvelle-Calédonie du Groupe Mélanésien Fer de Lance : reportée jusqu’à nouvel ordre
SUVA, mardi 26 juin 2012 (Flash d’Océanie) – Une mission ministérielle en Nouvelle-Calédonie du Groupe Mélanésien Fer de Lance (GMFL), prévue pour avoir lieu du 1er au 6 juillet 2012 pour « observer et évaluer la mise en œuvre de l’Accord de Nouméa » dans cette collectivité française du Pacifique, a finalement été « reportée à une date ultérieure » par cette organisation subrégionale, qui invoque notamment les récentes « évolutions politiques » en Nouvelle-Calédonie.
Cette mission ministérielle avait été évoquée depuis plusieurs semaines, à la suite du dernier sommet des dirigeants de ce groupement subrégional, à Suva (Fidji), fin mars 2012, sous la Présidence des îles Fidji.

Cette mission devait être dirigée par le Contre-amiral Premier ministre fidjien Franck Bainimarama, rappelle mardi le quotidien Fiji Sun.
Ratu Inoke Kubuabola, ministre fidjien des affaires étrangères, s’exprimant au nom du pays assurant toujours la présidence du GMFL, a expliqué à la presse locale que cette décision de reporter cette mission avait été prise par cette organisation dans un esprit de « non-ingérence dans les affaires intérieurs de tout pays ».
« Le GMFL adhère pleinement au principe de non-ingérence dans les affaires intérieures de tout pays. Nous nous devons de prendre acte des évolutions politiques en cours en Nouvelle-Calédonie. Par conséquent, nous ne souhaitons pas donner l’impression de nous ingérer ans les questions de souveraineté et d’intégrité territoriale », a précisé M. Kubuabola.

Désormais, la nouvelle date de cette mission n’a pas été annoncée mais devrait intervenir à un moment « plus opportun », du point de vue du groupe Fer de Lance.
« Cette visite ministérielle en Nouvelle-Calédonie comporte un ensemble d’objectifs clairs que nous voulons atteindre. À cet égard, il ne serait pas prudent de vouloir maintenir (cette visite) si elle ne devait pas servir l’objectif de faire avancer le processus de décolonisation en Nouvelle-Calédonie, de manière effective et holistique », a exprimé le chef de la diplomatie fidjienne.
Ce dernier, qui cite aussi le comité des Nations-Unies pour la Décolonisation, estime néanmoins que le GMFL « demeure déterminé dans son engagement en faveur du droit à l’autodétermination du peuple de la Nouvelle-Calédonie, conformément à l’Accord de Nouméa ».

De telles visites d’observation avaient eu lieu ces dernières années, de la part du GMFL, (une première fois en 2010) mais aussi du Forum des Îles du Pacifique (FIP), en vue de se rendre compte sur place de l’état d’avancement des dispositions de l’Accord de Nouméa, signé en 1998 entre partis néo-calédoniens favorables ou opposés à l’indépendance, ainsi que l’État français.
Parmi ces dispositions : un processus progressif de transfert de compétences de l’État français aux autorités locales ainsi qu’un référendum d’autodétermination dans une fenêtre située entre 2014 et 2018.
Le Groupe Mélanésien Fer de Lance, formé à la fin des années 1980 en solidarité avec le mouvement indépendantiste de Nouvelle-Calédonie, regroupe quatre États (Fidji, îles Salomon, Vanuatu, Papouasie-Nouvelle-Guinée) et le Front de Libération Nationale Kanak Socialiste (FLNKS) de Nouvelle-Calédonie.
Les dirigeants mélanésiens, lors de leur dernier sommet de Suva, ont aussi décidé que le prochain sommet du GMFL se tiendrait en Nouvelle-Calédonie, en 2013, dans un cadre et un format restant à définir.
Le secrétariat du GMFL précise aussi jeudi que cette mission ministérielle serait conduite par le Contre-amiral Franck Bainimarama, qui dirige Fidji depuis son putsch du 5 décembre 2006 et inclurait aussi « des ministres, des Hauts-commissaires (ambassadeurs) et des hauts-responsables gouvernementaux de Fidji, de Papouasie-Nouvelle-Guinée, des îles Salomon et de Vanuatu », ainsi que des membres du Secrétariat du GMFL.

Vives réactions en Nouvelle-Calédonie

La perspective d’une visite en Nouvelle-Calédonie du Contre-amiral Bainimarama, qui annonce un retour à la démocratie pour le dernier trimestre 2014 à l’occasion d’élections législatives, a déjà suscité de vives réactions en Nouvelle-Calédonie, notamment de la part de deux figures politiques locales favorables au maintien de cette collectivité dans l’ensemble français : Philippe Gomès, chef de file du parti Calédonie Ensemble (qui vient d’être élu député à l’issue des législatives françaises) et Simon Loueckhote (LMD, Le Mouvement de la Diversité).
Dès avril 2012, ils déclaraient avoir saisi le ministre français des Affaires étrangères et européennes, alors Alain Juppé, afin d’obtenir que le Premier ministre Contre-amiral fidjien, Frank Bainimarama, « ne soit pas autorisé à pénétrer sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie ».

Le FLNKS a depuis affirmé sa volonté de consulter le gouvernement français sur cette question.

Paraphrasant une déclaration faite en 2007 par Mme Rama Yade, alors secrétaire d’État française aux droits de l’homme, au sujet de la visite en France du Colonel Kadhafi, MM. Gomès et Loueckhote avaient affirmé que « la Nouvelle-Calédonie n’est pas un paillasson sur lequel M. Bainimarama peut venir s’essuyer les pieds » et réaffirmé leur « attachement très fort au respect des libertés fondamentales, des droits de l’Homme et de la démocratie, qui est au cœur des projets politiques que nous portons pour le pays ».

« Nous sommes totalement opposés à ce que le chef de la junte militaire au pouvoir à Fidji vienne en Nouvelle-Calédonie. Nous pensons que la Nouvelle-Calédonie, qui fait partie intégrante du territoire de la République française, n’a pas vocation à accueillir le seul dictateur de la Mélanésie, à fortiori si sa visite a pour objet ‘d’évaluer l’avancée de l’Accord de Nouméa’ ».

Polémique déjà lancée

Lors d’une visite en mars 2012 à Fidji, dans le cadre d’une politique de rapprochement avec les Parlements de la proche région, l’indépendantiste (FLNKS) Roch Wamytan, Président du Congrès de la Nouvelle-Calédonie, avait aussi suscité de vives réactions en Nouvelle-Calédonie en se déclarant en substance confiant du retour de Fidji sur le chemin d’une démocratie parlementaire et du respect d calendrier annoncé par Suva.

Les deux politiques néo-calédoniens avaient estimé que ce « soutien au régime fidjien » était « en contradiction avec celle de l’ensemble de la communauté internationale, aussi bien du secrétariat général des Nations-Unies, du Conseil de l’Union européenne et du Commonwealth que du Forum des Îles du Pacifique, qui avait unanimement condamné le coup d’État en 2006 et le durcissement du régime en 2009 ».

« Surtout, nous avions condamné une nouvelle violation de l’Accord de Nouméa et de la loi statutaire, ces textes fondamentaux ne conférant aucune compétence propre au président du congrès en matière de relation internationale », avaient-ils alors poursuivi.

Rédigé par PAD le Lundi 25 Juin 2012 à 19:34 | Lu 810 fois