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Londres réclame un report de trois mois de la date du Brexit


Londres, Royaume-Uni | AFP | mercredi 20/03/2019 - A neuf jours de la date prévue du Brexit, la Première ministre britannique Theresa May a demandé mercredi aux dirigeants européens un report de trois mois, afin d'éviter à son pays, incapable de se rassembler autour d'un accord de divorce, une sortie sans filet.

"J'ai écrit ce matin au président du Conseil européen Donald Tusk pour l'informer que le Royaume-Uni souhaitait une extension de l'Article 50 (du Traité de Lisbonne qui régit la sortie d'un pays de l'UE, ndlr) jusqu'au 30 juin", a déclaré Theresa May devant les députés.
Pour être effectif, ce report devra être approuvé à l'unanimité des 27 autres Etats membres de l'UE, réunis en sommet à Bruxelles jeudi et vendredi, et validé par les deux chambres du Parlement britannique avant le 29 mars, jusqu'ici date théorique de la sortie.
L'Allemagne a salué le fait qu'"il y a à présent une demande claire" du Royaume-Uni, a déclaré le porte-parole de la chancelière Angela Merkel. Mais la France a prévenu qu'elle s'opposerait à ce report s'il n'était pas justifié par une stratégie "crédible".
"Une situation dans laquelle Mme May ne serait pas en mesure de présenter au Conseil européen des garanties suffisantes sur la crédibilité de la stratégie conduirait alors à écarter la demande d'extension et à préférer une sortie sans accord", a déclaré le chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian devant les députés.
En attendant la réponse de l'UE, le risque demeure donc d'un divorce brutal, sans accord et sans transition, entre Londres et l'UE, un scénario aux conséquences économiques redoutées d'un côté comme de l'autre.
Catherine McGuinness, une haute responsable de la place financière londonienne, a pressé l'UE d'accepter la requête britannique et appelé les responsables politiques des deux côtés de la Manche à "faire preuve de pragmatisme et coopérer afin de trouver une solution à long terme à l'impasse actuelle".
 

- Elections européennes "inacceptables" -

 
Bien que le traité de retrait de l'UE, péniblement conclu en novembre à l'issue d'un an et demi de négociations, ait été massivement rejeté à deux reprises par les députés britanniques, Theresa May a exprimé sa volonté de "présenter une nouvelle fois à la Chambre" ce texte et ce "aussi vite que possible".
Son adoption offrirait au Royaume-Uni une sortie ordonnée, quarante-six ans après avoir rejoint ce qui était alors la Communauté économique européenne.
Ces derniers jours, l'incertitude avait grandi à Westminster sur la durée du délai qui serait demandé par Theresa May. Un report au 30 juin permettrait au Royaume-Uni d'éviter de prendre part aux élections du nouveau parlement européen fin mai.
Devant les députés, Theresa May a affirmé qu'il serait "inacceptable" que le Royaume-Uni participe à ces élections, mille jours après le référendum ayant ouvert la voie au Brexit en juin 2016
L'option d'un court report limite cependant les possibilités côté britannique : si le gouvernement est empêché de présenter une troisième fois son traité de retrait au parlement, ou si le texte est une nouvelle fois rejeté, l'hypothèse d'une sortie sans accord se posera de nouveau. 
"Mais en tant que Première ministre, je ne suis pas disposée à repousser le Brexit au-delà du 30 juin", a prévenu Mme May.
 

- "Crise nationale" -

 
La Commission européenne a averti dans une note interne consultée par l'AFP qu'un report au 30 juin poserait "de graves risques juridiques et politiques".  Dans cette note présenté aux commissaires mercredi matin, l'exécutif européen plaide soit pour un report jusqu'au 23 mai, avant les élections européennes, soit jusqu'au moins fin 2019.
Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a estimé mercredi matin "qu'il n'y aura pas de décision cette semaine lors du Conseil européen"
"Nous devrons probablement nous voir de nouveau la semaine prochaine, parce que Mme May n'a d'accord sur rien au sein de son conseil des ministres et au parlement", a-t-il ajouté.
Le délai réclamé par Mme May a fait bondir dans les rangs de la majorité comme de l'opposition. "C'est une crise nationale", s'st insurgé le leader travailliste Jeremy Corbyn, partisan d'un report plus long, blâmant "l'incompétence, les échecs et l'intransigeance de la Première ministre et de son gouvernement".
Le député conservateur Peter Bone, opposé au report, y a vu une "trahison du peuple britannique", et a appelé la cheffe du gouvernement à revenir sur sa décision.
Un débat d'urgence sur la demande de report devait démarrer mercredi après-midi au Parlement britannique. Donald Tusk devait lui réagir en fin d'après-midi.

le Mercredi 20 Mars 2019 à 06:30 | Lu 226 fois