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Le trafic de paka pour “nourrir les enfants”


Photo d'illustration.
Photo d'illustration.
Tahiti, le 19 mars 2024 – Le tribunal correctionnel a condamné, mardi, une mère de famille qui était poursuivie pour avoir planté et vendu du paka. La quadragénaire, qui a expliqué à la barre qu'elle s'était lancée dans le trafic pour assurer les besoins de sa famille, a écopé d'un an de prison avec sursis. 18 mois de sursis avaient été requis à son encontre. 
 
Une mère de famille, jusque-là uniquement connue de la justice pour des conduites en état d'ivresse, a comparu devant le tribunal correctionnel mardi pour répondre d'un trafic de stupéfiants. En septembre 2022, c'est la voisine de la prévenue qui avait alerté les forces de l'ordre alors qu'une forte odeur de cannabis émanait de la maison de cette dernière. Sur place, les gendarmes avaient découvert 146 pieds de paka. Alors qu'elle devait être jugée en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), la mère de famille avait de nouveau été interpellée après que de nouveaux pieds de paka pas encore à maturité ont été de nouveau découverts dans son jardin. Deux procédures jointes qui lui ont donc valu son passage devant le tribunal correctionnel mardi matin. 
 
À la barre, cette mère de trois enfants a intégralement reconnu avoir planté et dealé du paka durant plusieurs mois pour “ramener des sous” et “nourrir” ses enfants alors qu'elle n'avait ni emploi, ni pension alimentaire. Expliquant qu'elle avait un “BTS agricole” et donc, quelques connaissances en la matière, elle a avoué devant le tribunal qu'elle avait choisi le paka car elle avait entendu dire que cela se “vend bien et vite”. “D'accord, madame, mais vous auriez aussi pu choisir de cultiver du taro” lui a ensuite opposé le président du tribunal avant de rappeler que l'intéressée avait reconnu durant l'enquête que sa clientèle s'était développée grâce au “bouche à oreille”. Elle avait, de son propre aveu, empoché 1,5 million de francs dans le cadre de son trafic. 
 
Pas d'état de “nécessité”
 
Afin d'en “finir avec le mythe” selon lequelle le cannabis est une “drogue douce”, le procureur de la République est longuement revenu durant ses réquisitions sur les “effets désastreux” de cette substance sur la “santé publique”. Le représentant du ministère public a cependant assuré que la société – “et le parquet qui la représente” – n'étaient “ni sourds, ni aveugles” face aux “difficultés sociales, à la difficulté d'être une mère célibataire à la recherche d'un emploi”. “Comment une mère de famille peut-elle en arriver là ? C'est une vraie interrogation. Cela consiste à se tirer une balle dans le pied.” Assurant que la prévenue se trouvait à l'époque dans une “situation compliquée mais pas dans un état de nécessité”, le procureur de la République a finalement requis 18 mois de sursis probatoire pendant deux ans. 
 
Plutôt “d'accord” avec certains propos tenus par le procureur de la République, Me Karina Chouinni a dépeint la prévenue comme une femme qui “assume les actes d'une mère qui a fait des choix pour nourrir ses enfants”. Elle s'est aussi ouvertement interrogée sur le fait, “qu'encore aujourd'hui en Polynésie”, certaines personnes puissent vivre dans de “telles conditions précaires” avec seulement “26 000 francs” par mois pour trois enfants.
 
Après en avoir délibéré, le tribunal correctionnel a finalement condamné la quadragénaire à un an de prison avec sursis probatoire pendant deux ans assortis de l'exécution provisoire. Elle devra trouver un travail ou suivre une formation et devra aussi participer à un stage portant sur les dangers de la consommation de stupéfiants. 
 

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 19 Mars 2024 à 16:14 | Lu 4850 fois