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Le maire de Mahina a demandé la dissolution de la Sem Haapape


Patrice Jamet et Gilles Lorphelin en conférence de presse.
Patrice Jamet et Gilles Lorphelin en conférence de presse.
Après 18 mois à la tête de la commune de Mahina, Patrice Jamet a reçu la presse, ce jeudi après-midi, pour présenter l’état des finances de sa ville. Si les dettes accumulées au fil des années précédentes, soit un total de 830 millions de Fcfp commencent à être réglées, le retour à l’équilibre financier n’est pas attendu avant fin 2014, voire même au-delà, selon l’échéancier prévu avec l’accord de la Chambre territoriale des comptes (CTC). Car, au moment où la nouvelle équipe municipale faisait le constat du gouffre financier réel de la commune, l’économie générale du Pays allait en se dégradant. Conséquence : les dotations du FIP (fonds intercommunal de péréquation) accordées aux communes polynésiennes sont en chute libre ; dans le même temps les DGF (dotation globale de fonctionnement), versées elles directement par l’Etat, à toutes les communes de France, vont aussi en diminuant progressivement.

Toutefois, pour se défaire rapidement d’une branche particulièrement malade, qui pèse lourdement sur les finances de la commune, Patrice Jamet a posé une requête, il y a quelques mois, devant le tribunal de commerce demandant la dissolution anticipée de la Sem Haapape. Il suit en cela ses promesses électorales, puisque il a fait notamment campagne en assurant que la Sem Haapape serait dissoute et que la commune reprendrait la main sur la gestion de l’eau. C’est aussi l’une des solutions listées par la Chambre territoriale des comptes, dans son rapport d’observations définitives sur la Sem Haapape, expédié à la commune de Mahina le 3 juillet dernier, et rendu public en août (voir en pièce jointe). Il est mentionné la possibilité d’une «dissolution organisée d’un commun accord entre les partenaires publics et les partenaires privés, dans la recherche de la préservation des intérêts de chacune des parties. Cette dissolution peut prendre soit la forme d’une dissolution sans liquidation par la réunion en une seule main de toutes les actions de la société, soit celle d’une dissolution procédant d’une décision des associés à la majorité des deux tiers». Une demande de dissolution que le maire de Mahina a fait seul, sans délibération à ce sujet du Conseil municipal, «en vertu du pouvoir de délégation qui lui a été accordé par les élus» précisait Gilles Lorphelin, directeur général des services (DGS) de la mairie de Mahina qui a mené, cet après-midi la plus grande partie de l’exposé sur l’état des finances de la commune et des projets en cours depuis 18 mois.

Qu’est-ce qui motive cette demande de dissolution ?
Depuis 2009, les résultats de la Sem Haapape ne sont équilibrés que grâce au versement d’une subvention communale. Le rapport de la CTC le note noir sur blanc : «l’équilibre d’exploitation n’était atteint qu’au moyen d’une subvention d’exploitation plus importante que celle prévue. Cette situation ambiguë résulte de plusieurs causes. L’une a trait à la mauvaise maîtrise des charges d’exploitation, notamment les dépenses d’électricité. Une autre tient à l’insuffisante croissance des recettes d’exploitation depuis 2009. Des problèmes de trésorerie sont ainsi apparus en 2009 et 2010, aggravés par les relations financières avec la commune (…) Dès l’année 2009, la subvention communale a été supérieure aux prévisions, afin de limiter le déficit de la Sem. Pour l’exercice 2010, cette subvention a atteint 46,9 millions de Fcfp contre 22 millions Fcfp prévus, afin de couvrir les charges d’exploitation de la Sem qui n’avaient pas baissé». Dans les chiffres livrés, lors de la conférence de presse de ce jeudi après-midi, par le directeur général des services de la mairie de Mahina, on peut retenir que le pompage dans la nappe phréatique et le relevage de l’eau, pour les quartiers situés sur les hauteurs, est énergétivore. A tel point que la seule facture d’électricité de la Sem pour la production de l’eau est de 110 millions de Fcfp/an alors que les redevances payées par les usagers, ne font entrer que 105 millions de Fcfp de recettes. « Or, il reste ensuite encore à payer les techniciens, la chloration de l’eau, les réparations sur les fuites etc.» détaille Gilles Lorphelin.

Pour l’instant, on ne sait pas ce que va devenir cette requête en dissolution déposée devant le tribunal de commerce. Ni ce que coûtera à la commune cette procédure. Les relations entre les actionnaires principaux de la Sem : la commune de Mahina (65% du capital) et la Sedep, l’actionnaire privé le plus important (34 ,95% du capital) ont été tendues depuis la création de la Sem en 2007. Mais les deux parties principales pourraient se retrouver sur une proposition de sortie rapide. La CTC le note également dans son rapport : «Les divergences qui sont apparues entre l’actionnaire majoritaire, la commune, et les actionnaires minoritaires, dont le principal est la Sedep, représentée par son P-dg, M. Dominique Auroy, sont importantes. Ces éléments ont motivé l’ouverture de la procédure d’alerte par le commissaire aux comptes, en septembre 2011. M. Auroy a, d’ailleurs, écrit le 9 septembre 2011 au maire, M. Patrice Jamet, pour demander un retour au modèle de management qui avait été initialement prévu. A défaut, il serait prêt à se retirer de la gestion de la Sem et à vendre ses actions. Dans sa réponse, M. Auroy a indiqué également que la SEDEP est favorable à une sortie amiable tout en précisant que celle-ci ne peut toutefois pas être différée indéfiniment». Cette sortie sera-t-elle effective avant la fin de l’année 2012 ? A suivre…
pfr201208.pdf PFR201208.pdf  (2.04 Mo)

Quelle gestion de l’eau après la Sem ?

Depuis 2007, la gestion de l’eau sur Mahina a été concédée par la commune à la Sem Haapape. Si la dissolution de la Sem était prononcée que se passerait-il ? «La commune reprendrait dans un premier temps la compétence sur l’eau, d’abord sous la forme d’une régie municipale, le but étant d’assurer la continuité du service aux usagers» explique Gilles Lorphelin, DGS de la mairie de Mahina. Tout dépendra ensuite du schéma directeur de l’eau qui en fonction des contraintes locales évoquera l’équilibre financier de tarification, les besoins d’investissements à réaliser sur de nouveaux réservoirs de stockage, le renouvellement des canalisations entre autres. «Différentes options juridiques peuvent être adoptées : régie municipale, contrat d’affermage à un prestataire privé, on ne peut présumer pour l’instant de la forme juridique de demain» détaillait Gilles Lorphelin. Dans le même temps, la mairie de Mahina poursuit ses démarches pour améliorer les rendements du réseau de l’eau : des rénovations des canalisations ont été réalisées à la Pointe Vénus et «cela va aller de pair avec la pose des compteurs d’eau». Un appel d’offres sera lancé dans les prochains mois pour la généralisation de la pose des compteurs individuels pour tous les administrés (2 500 environ). Actuellement en effet, seuls les habitants des hauteurs de Mahina, dans les nouvelles constructions, ou plus récemment de la Pointe Vénus sont équipés de compteurs d’eau et paient selon leur consommation réelle et non pas un forfait annuel, très clairement sous-estimé. «Une situation discriminatoire au sujet de laquelle le tribunal administratif n’a rien trouvé à redire» précisait encore Gilles Lorphelin.


Rédigé par Mireille Loubet le Jeudi 13 Septembre 2012 à 17:26 | Lu 2316 fois