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Le "champ d'intervention obligatoire" du haut conseil devra être requalifié


PARIS, 11 mars 2015 – Par un avis rendu ce mardi, le Conseil d’Etat déclare "entaché d’incompétence" l’arrêté 560 CM relatif à la qualité et aux attributions du haut conseil de la Polynésie française.

Le Conseil d’Etat déclare que "l’étendue du champ d’intervention obligatoire" attribué au haut conseil de la Polynésie française par l’arrêté 560 CM du 3 avril 2014 portant modification de l'arrêté n° 1398 CM du 17 octobre 2013 "doit être regardé comme affectant l’équilibre des institutions de la Polynésie française". Dans un avis rendu ce mardi, à la demande du tribunal administratif de la Polynésie française, la haute juridiction déclare cet arrêté "entaché d’incompétence".

Il revient dorénavant au Tribunal administratif de tirer les conséquences de cet avis demandé au Conseil d’Etat, en censurant tout ou partie des dispositions mises en cause. Une audience collégiale est programmée le 24 mars prochain à Papeete dans le cadre de cette procédure.
La décision interviendra dans les 15 jours, mi avril. Dans tous les cas, le dernier mot reviendra au gouvernement qui devra prendre en compte de toutes ces précisions juridiques pour modifier, s'il le souhaite, l'arrêté litigieux.

Le Tribunal administratif avait le 9 décembre dernier décidé de surseoir à statuer sur plusieurs recours visant le haut conseil de la Polynésie française et avait saisi le Conseil d'Etat. Deux autres questions étaient posées à la haute juridiction par la cour administrative de Papeete.

"Tout ça pour ça !"

En premier lieu : le président du haut conseil pouvait-il être recruté par le Pays, par voie de détachement, parmi les magistrats de l’ordre administratif en activité ou les membres du conseil d’Etat, sans que la Polynésie française n’intervienne dans une matière relevant des compétences de l’Etat ?

Ce point était soulevé par un recours engagé par le haut-commissaire de la République. A cette question, le Conseil d’Etat répond que la délibération du 14 mars 2014 (n°2014-27 APF), dont les dispositions contestées "ont pour seul objet de fixer le cadre à l’intérieur duquel doit être exercé, par l’autorité compétente, le choix de la personne nommée à la présidence du haut conseil de la Polynésie française" et "pas pour effet d’imposer une quelconque obligation (…). La mesure édictée par ces dispositions ne saurait, dès lors, être regardée comme relevant du statut de la fonction publique de l’Etat". Dans cette mesure, le Pays peut, s'ils sont détachés et volontaires, recruter de tels magistrats

Une autre question posée au Conseil d’Etat concernait plus particulièrement la fixation du régime indemnitaire des membres du haut conseil de la Polynésie française. Celle-ci relevait-elle d’une délibération complétée d’un arrêté, comme cela a été fait, ou bien devait-elle faire l’objet d’une loi du Pays ? Le recours visant cette disposition de la délibération du 14 mars 2014 soutenait que le régime indemnitaire des membres du haut conseil devait relever d’une loi du pays, dès lors qu’il ferait partie du domaine législatif, au titre des "garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires" de la Polynésie française.

En réponse, le Conseil d’Etat dit que, si "de telles garanties ne peuvent être déterminées que par la voie d’une loi du pays (…) ne figurent pas au nombre de ces garanties les modalités de rémunération et d’indemnisation des agents publics que sont (…) les membres du haut conseil". Le régime indemnitaire des membres du haut conseil pouvait donc être fixé sans que cela relève d'une loi du Pays.

"L’interminable contentieux conjointement lancé depuis 2013 par les autorités déconcentrées de l’Etat (…) et par le Grand Timonier des indépendantistes arrive donc presque à son terme. Il conduit à ce résultat - un peu paradoxal - d’un organe consultatif conforté dans son existence, mais contraint de voir réduire ses attributions théoriques - sans toutefois que ces modifications n’aient une incidence prévisible sur son activité réelle … Tout ça pour ça !", a commenté mercredi Stéphane Diemert, le président du Haut conseil de la Polynésie française, en réaction à l’avis rendu la veille par le Conseil d’Etat.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mercredi 11 Mars 2015 à 11:40 | Lu 1324 fois