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La lutte antidopage au point mort


Les tests utilisés par la Fédération tahitienne de va'a ne sont pas des "contrôles antidopage, mais bien de tests préventifs. Ces tests n’ont pas valeur de sanction administrative", précise la Direction de la jeunesse et des sports.
Les tests utilisés par la Fédération tahitienne de va'a ne sont pas des "contrôles antidopage, mais bien de tests préventifs. Ces tests n’ont pas valeur de sanction administrative", précise la Direction de la jeunesse et des sports.
Tahiti, le 6 juillet 2021 - Depuis le 1er janvier et la réforme du code mondial antidopage, le fenua doit se conformer à ces nouvelles dispositions en adoptant une nouvelle loi du Pays. Cependant, cette dernière ne devrait pas être présentée avant l'année prochaine. En attendant, le Pays ne peut plus organiser de contrôles antidopage. "Toutefois, les fédérations internationales peuvent toujours demander la tenue de contrôles antidopage lors de compétitions se déroulant au fenua", précise la Direction de la jeunesse et des sports.
 
Gros point noir dans la lutte antidopage au fenua. Depuis le 1er janvier et la réforme du code mondial antidopage, plus aucune disposition légale ne permet au Pays d'organiser de contrôles sur les manifestations sportives organisées localement. Une réforme pourtant annoncée par l'Agence mondiale antidopage (AMA) depuis 2019. Deux textes de novembre 2015 encadraient jusqu’à présent la lutte antidopage en Polynésie française : une loi du Pays relative à "la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage" et une seconde relative à la recherche et à la constatation des infractions en matière de dopage. Leur caducité depuis le début de l’année fait place à un vide règlementaire.
 
En métropole, le nouveau code mondial antidopage a été adopté par une ordonnance présentée en conseil des ministres en avril dernier. Mais au fenua, selon nos informations, il faudra vraisemblablement attendre 2022 pour qu'une nouvelle loi du Pays, conforme à ces nouvelles dispositions, soit présentée. "Un projet de travail règlementaire avec l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) est en cours à cet effet", indique-t-on du côté de la Direction de la jeunesse et des sports (DJS). Mais si aucun cadre législatif n'est en place pour le moment, la DJS précise néanmoins que "les fédérations internationales peuvent toujours demander la  tenue de contrôles antidopage lors de compétitions se déroulant au fenua, avec possibilité de sanctions fédérales."
 
Tests préventifs et contrôle antidopage pas dans le même panier
 
Quelle valeur ont donc les contrôles effectués lors de la dernière édition de la Vodafone Channel Race en juin ? Rappelons que trois équipages avaient été disqualifiés à cause de tests positifs réalisés à l'issue de la course. Les tests utilisés permettaient de détecter cinq substances, principalement des drogues comme le cannabis ou l'ice. Exit donc les stéroïdes et autres anabolisants.
 
Steeve Teihotaata, rameur de Pirae Va'a, l'une des équipes disqualifiées, avait d'ailleurs vivement critiqué ces contrôles. "Appeler ça comme vous voulez, mais ce ne sont pas des tests antidopage. Ce sont des petits tests qui ne valent rien quand on sait que dans le monde du sport il y a plus d'une centaine de substances qui sont interdites", a insisté le 'aito de Bora Bora.
 
"Il ne s’agit pas de contrôles antidopage, mais bien de tests préventifs", atteste pour sa part la DJS. "Aussi, du point de vue de l’administration, ces tests n’ont pas valeur de sanction administrative. Cependant, toute fédération sportive peut organiser des compétitions avec leur règlement de courses qui peut prévoir ses propres sanctions", ajoute le service du Pays. En attendant la nouvelle loi du Pays, les tricheurs peuvent donc échapper pour le moment à une suspension, à des amendes voire à des peines d'emprisonnement qui étaient également prévues dans loi de Pays de 2015.
 
Vers une agence locale de lutte antidopage
 
Les précédentes lois du Pays prévoyaient la création d'un conseil de prévention et de lutte contre le dopage. Ce dernier était composé de huit membres issus de la magistrature, du corps médical et du monde sportif. Ce conseil devait notamment rendre des avis sur les sanctions prononcées par le ministère des Sports. En 2017, ce conseil de prévention et de lutte contre le dopage avait acté une suspension de huit mois à l'encontre d'un cycliste polynésien, à la suite d'un contrôle positif réalisé sur une course en Nouvelle-Calédonie. "Mais en pratique, ce conseil a eu beaucoup de mal à fonctionner", glisse-t-on du côté de la cellule antidopage de la DJS.
 
Ainsi, dans la prochaine loi du Pays, la volonté de la DJS est de mettre en place une autorité administrative indépendante en charge de la lutte contre le dopage,  à l'image de l'Agence française antidopage (AFLD). "Mais on sait que c'est compliqué à mettre en place. Il faudra forcément mobiliser des financements pour la faire fonctionner", confie la cellule antidopage de la DJS. Affaire à suivre donc.

​160 euros minimum pour une analyse

Pour une analyse antidopage en bonne et due forme, il faut débourser au moins 160 euros (19 000 Fcfp) l'analyse. À ce prix-là, on comprend pourquoi bon nombre de fédérations sportives locales sont frileuses à l'idée d'organiser des tests antidopage sur leurs compétitions. "Il y a eu des éditions de la Hawaiki Nui Va'a où le Pays prenait en charge l'ensemble de ses analyses. Ça représente un coût très lourd pour les fédérations locales", confie une responsable de la cellule anti-dopage.

Rédigé par Désiré Teivao le Mercredi 7 Juillet 2021 à 17:07 | Lu 2145 fois