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Journée mondiale sans tabac 2012 : initiatives diverses en Océanie insulaire


Journée mondiale sans tabac 2012 : initiatives diverses en Océanie insulaire
SUVA, lundi 4 juin 2012 (Flash d’Océanie) – Alors qu’au plan, mondial, la Journée sans tabac 2012 a été placée sous le thème de la lutte contre « l’ingérence » des industriels de ce secteur, plusieurs initiatives, dans le Pacifique insulaire, ont aussi marqué ce 31 mai 2012.
Aux îles Salomon, le gouvernement local a choisi la date du 1er juin pour marquer l’entrée en vigueur (avec une période de « grâce » d’un an) d’une nouvelle loi relative à de nouveaux contrôles dans le secteur du tabac, suscitant de vives réactions de la part du plus grand cigarettier du pays, la société Solomon Island Tobacco.

Cette dernière, qui reproche aux autorités de ne pas l’avoir consultée avant que de faire voter cette loi, a tout récemment menacé de fermer boutique, en agitant la perspective, pour le gouvernement d’une perte en revenus et impôts de l’ordre de quelque 17 millions de dollars US.
La société, qui estime que certaines dispositions de cette nouvelle loi sont « impraticables », demande notamment l’ouverture de consultations « publiques » sur ce sujet.

La nouvelle loi, portée par le ministre salomonais de la santé, Charles Sigoto, va dans le sens d’une interdiction progressive de fumer dans les lieux publics, ais aussi sur les lieux de travail, dans les écoles, les hôpitaux et dans les transports en commun.
M. Sigoto, en réponse aux menaces des industriels du tabac, a rétorqué en rappelant le coût des soins aux malades atteints de maladies liées à la tabagie, ainsi que les dernières statistiques officielles disponibles en la matière (de 2008), établies par le ministère de la santé et l’OMS, et qui révèlent que le taux de tabagie chez les jeunes Salomonais, y compris des écoliers, est plus élevé (de 2,5 pour cent) que le taux mondial pour la tranche des 13-15 ans : quatre adolescents Salomonais sur dix sont déjà des fumeurs.

Au royaume de Tonga, à l’occasion de cette journée mondiale, le gouvernement (ministères de la santé et de l’éducation), en collaboration avec plusieurs associations (dont la Croix Rouge) et églises (catholique, avec la participation remarquée de l’archevêque du Diocèse de Tonga et de Niue, Mgr Paini Mafi), a lancé un vaste projet de sensibilisation aux dangers de la tabagie en évoquant une « épidémie sociale ».
Dans un cadre plus général, le gouvernement de Tonga, tout comme de nombreux exécutifs de la région, a lancé en 2010 un vaste programme stratégique de sensibilisation aux maladies dites « non-transmissibles » et liées aux styles de vie (maladies cardiovasculaires, obésité, diabète, cancers), qui touchent particulièrement les habitants de ce royaume polynésien.
En 2011, le ministère tongien de la santé avait tenté de marquer les esprits en déclarant « non fumeurs » un village entier, le village de Kala'au (côte Ouest de l’île principale de Tongatapu), où résident un peu moins de 130 personnes.
À Tonga, en 2009, 74 personnes sont mortes du cancer et la moitié de ces cas étaient liés au tabac. La même année, 182 personnes sont mortes de maladies cardiovasculaires et 57 de cancers des poumons », rappelait en fin de semaine dernière le ministère de la santé qui estime que cette tendance n’a toujours pas été infléchie.

À Fidji, la journée mondiale sans tabac a été marquée par une série de cérémonies et d’annonces, dont celle de l’Université nationale (FNU, Fiji National University), qui a déclaré son campus non fumeurs, dans un mouvement coordonné avec le ministère de la santé et l’OMS.
Au plan communautaire, plusieurs villages fidjiens ont emboîté le pas, ces derniers mois, en se déclarant eux aussi sans tabac.
Ces initiatives concernent notamment les lieux publics (maison commune, hôpital) un village sur l’île polynésienne de Rotuma (Nord-ouest de l’archipel) et, sur l’île principale, dans les régions de Ba (Nord), Nabila (près de Sigatoka, Ouest) et Nabukaluka (centre, province de Naitasiri.
En 2010, au plan national, le gouvernement fidjien a pris un décret relatif au secteur du tabac, qui vient renforcer une loi de 1998 sur le contrôle de la tabagie.
Le gouvernement local prévoit pour janvier 2013 l’entrée en vigueur de mesures coercitives obligeant les industriels à faire figurer sur leurs paquets des images explicites montrant les effets de la tabagie, censée venir s’ajouter aux avertissements textuels, dans les trois langues les plus pratiquées dans le pays (Anglais, Fidjien et Hindoustani).
À partir de janvier 2013, la taille du texte de ces avertissements devra aussi être augmentée, précise le gouvernement.

Dans le Pacifique Nord-ouest, sur la petite île de Palau, mi-mars 2012, c’est le conseil national des chefs (le Rubekul Belau) qui annonçait unilatéralement que les produits tabagiques étaient désormais « illégaux ».
Cette mesure, qui n’a pas force de loi, mais s’appuie sur l’autorité morale des grands chefs, aurait pour principal objectif de marquer les esprits et d’ « inciter les commerçants et distributeurs à rechercher des marchandises alternatives au tabac ».
Les chefs ont aussi exhorté le gouvernement local à les suivre dans leur démarche en imposant un moratoire pour l’octroi de licences commerciales spécifiques aux produits du tabac.
Les chefs palauans ont aussi insisté sur le fait que la consommation du tabac « ne fait pas partie de la culture et des traditions », puisque le tabac a été introduit par les « occupants » Européens.
Facteur aggravant, ont rappelé les chefs coutumiers : la consommation du tabac, dans ce pays tout comme dans nombreux États insulaires de la Micronésie et de Mélanésie (Papouasie-Nouvelle-Guinée et îles Salomon), est fortement associée à celle de la noix de Bétel qui, elle, est chiquée.
Selon les dernières études disponibles pour Palau, plus de cinquante pour cent des mineurs soit consomment du tabac, soit de la Noix de Bétel, soit les deux à la fois.
« En tant que parents, nous devons à nos enfants de préserver leur bonne santé et de leur fournir un environnement pour qu’ils puissent vivre et grandir sainement », ont notamment déclaré les chefs.

Pour toute la région, le Secrétariat Général de la Communauté du Pacifique (CPS, basé à Nouméa, Nouvelle-Calédonie), dans un message livré à l’occasion de cette journée mondiale sans tabac, a tenu à renforcer la posture onusienne en soulignant les efforts des industriels du tabac à « saper les efforts mondiaux et nationaux en vue de réduire le nombre de morts et de maladies liées au tabac ».
Ces effort sont été qualifiés par Jeanie McKenzie, conseillère à la CPS pour les maladies non transmissibles, d’ « ingérence dans les droits des pays du Pacifique à déterminer des politiques fortes de santé publique et de législation relative au tabac ».
L'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a pour sa part appelé les gouvernements « du monde entier à se mobiliser contre les attaques de plus en plus agressives que lance l'industrie du tabac pour saper les politiques visant à protéger les populations des méfaits de la cigarette (…) Ces dernières années, les multinationales du secteur ont intenté sans vergogne des poursuites judiciaires contre les gouvernements qui se sont mis en première ligne de la guerre contre le tabac. L'industrie sort désormais de l'ombre et saisit les tribunaux », a dénoncé le 31 mai 2012 la Directrice générale de l'OMS, le Dr Margaret Chan.
Ban Ki-moon, Secrétaire général de l'ONU, s’est lui aussi fendu d’un message dans lequel il déclare qu’ « Alors même que les gouvernements et la communauté médicale internationale essaient d'appliquer des mesures efficaces pour limiter le tabagisme, leurs efforts sont volontairement mis à mal par un secteur dont les produits tuent (…)En réaction, l'industrie du tabac met toute son énergie à saper la Convention, y compris en poursuivant les gouvernements en justice, comme c'est actuellement le cas de l'Australie, de la Norvège ou encore de l'Uruguay (…)Dans certains pays, le tabagisme a diminué, parfois jusqu'à 25%, trois ans seulement après l'adoption des mesures strictes de lutte contre le tabagisme prévues dans la Convention-cadre ».

Le tabac tue presque la moitié de ses consommateurs, rappelle l'OMS, qui estime que « d'ici 2030, il tuera plus de 8 millions de personnes chaque année, avec quatre décès sur cinq survenant dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. C'est un facteur de risque majeur pour les maladies non transmissibles (MNT) comme le cancer, les maladies cardiovasculaires, le diabète et les pneumopathies chroniques, qui sont à l'origine de 63% des décès dans le monde. La Convention-cadre pour la lutte antitabac est le premier traité international négocié sous l'égide de l'OMS. Adoptée en 2003, elle compte désormais 175 États Parties. Lors de la Journée mondiale sans tabac de 2012 et pendant toute l'année qui suivra, l'OMS invitera instamment les pays à mettre la lutte contre l'ingérence de l'industrie du tabac au cœur de leurs efforts pour juguler l'épidémie mondiale de tabagisme. »

Rédigé par AFP le Lundi 4 Juin 2012 à 02:10 | Lu 773 fois