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Gaston Flosse, le "vieux lion" désormais presque à terre


Gaston Flosse, le "vieux lion" désormais presque à terre
Portrait de Gaston Flosse réalisé par l'Agence France Presse

PARIS, 5 octobre 2011 (AFP) - Homme fort de la Polynésie française pendant une trentaine d'années, l'ancien compagnon de route de Jacques Chirac Gaston Flosse, 80 ans, a été largement rattrapé par la justice, qui l'a condamné dans trois affaires différentes à des peines de plus en plus lourdes.

Toujours sénateur (DVD, ex-UMP) et élu de l'Assemblée de Polynésie, où ses partisans comptent 10 élus sur 57, l'homme à l'éternel collier de fleurs, lunettes cerclées, visage rond, a été condamné mardi à quatre ans de prison ferme dans une affaire d'emplois fictifs.

M. Flosse, qui fut premier président du gouvernement de Polynésie française en 1984 et eut le pouvoir à Papeete à quatre reprises (1984-1987, 1991-2004, octobre 2004-février 2005, février-avril 2008), compte faire appel du jugement -- ce qui le suspend. Son avocat a dénoncé "un procès politique".

Traînant depuis longtemps une réputation sulfureuse, le "vieux lion" a souvent échappé à la justice: amnistié en 2002 alors qu'il était poursuivi pour "faux et usage de faux", relaxé en appel du délit de corruption passive en 2001.

Mais la Cour de cassation a rendu dernièrement deux condamnations du sénateur définitives, en 2010 pour "détournement de fonds publics", et il y a deux semaines pour "obstacle à l'exercice des pouvoirs attribués aux magistrats et rapporteurs de la Chambre territoriale des comptes (CTC)".

M. Flosse a déjà été incarcéré deux fois en 2009, dans une affaire de corruption toujours en cours, dite de l'OPT.

Né le 24 juin 1931 à Rikitéa, dans l'archipel des Gambier, d'un père lorrain et d'une mère polynésienne, il ne parle que la langue de son île natale, Mangareva, lorsqu'il arrive à Tahiti pour continuer ses études.

D'abord instituteur puis agent d'assurances, ce "demi" (métis), comme on dit en Polynésie, se lance en politique et devient en 1965 maire de Pirae (Tahiti) après avoir rejoint le mouvement gaulliste en 1958.

Déjà président de l'Assemblée territoriale, il se déplace en 1976 à Egletons, en Corrèze, où Jacques Chirac prépare sa prise de contrôle du RPR, aujourd'hui UMP.

Il est député RPR de Polynésie (1978-1982, 1993-1997) avant d'être élu sénateur en 1998.

Ardent défenseur de l'autonomie de la Polynésie, qu'il considère alors comme "le meilleur rempart contre l'indépendance", il obtient un statut d'autonomie interne en 1984, car le ministre de la Défense Charles Hernu, de gauche mais franc-maçon comme M. Flosse, est en faveur d'une stabilité politique dans ce territoire que la France utilise pour expérimenter ses bombes nucléaires.

Secrétaire d'Etat chargé du Pacifique sud entre 1986 et 1988, M. Flosse défend les essais nucléaires à Mururoa (archipel des Tuamotu).

Il en fait autant sept ans plus tard, lorsque Jacques Chirac élu président décide de les reprendre.

Une partie de Papeete est alors détruite par des émeutes à la fin de l'été 1995, mais il obtient en janvier 1996 que la métropole verse 150 millions d'euros par an à la Polynésie au titre de la "dette nucléaire", une somme depuis pérennisée.

M. Flosse obtient de Paris en 2004 un nouveau changement de statut pour le territoire, qui lui donne encore plus de pouvoir personnel.

Mais la modification de la loi électorale qu'il avait réclamée se retourne contre lui, et la coalition de son adversaire indépendantiste Oscar Temaru remporte les élections territoriales.

Malgré une cuisante défaite électorale dans les urnes, il est revenu une dernière fois aux commandes entre février et avril 2008, infligeant un camouflet à l'UMP et au gouvernement Fillon grâce à une alliance spectaculaire avec son rival de toujours, M. Temaru.

Rédigé par Par Eric Bassi et Guillaume DAUDIN le Mercredi 5 Octobre 2011 à 05:29 | Lu 2336 fois