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Fritch : "On ne vient pas laver le linge sale polynésien" devant l'ONU


Edouard Fritch, mardi à New York, en compagnie de Vladimir Drobjnak, le président de la 4e commission de l’ONU.
Edouard Fritch, mardi à New York, en compagnie de Vladimir Drobjnak, le président de la 4e commission de l’ONU.
NEW YORK, 4 octobre 2016 - Edouard Fritch revient sur son intervention devant la 4e commission et déplore la démarche des souverainistes polynésiens, à New York devant l'Organisation des Nations unies : "On vient ici considérer cette Assemblée comme l'assemblée de Polynésie française où on vient déblatérer sur les problèmes sociaux, les problèmes institutionnels. Ce n'est pas le lieu".

Vous vous êtes exprimé pour la première fois devant la 4ème commission de l'ONU. Etait-ce utile ?

Edouard Fritch : Oui. Sur l'utilité, il n'y a aucun problème, il fallait que le représentant du gouvernement polynésien vienne recadrer certaines choses qui ont été dites et qui méritent qu'on dise la vérité sur ce qui se produit et comment fonctionne la Polynésie française. Trop de choses injustes ont été racontées. On vient ici considérer cette Assemblée comme l'assemblée de Polynésie française où on vient déblatérer sur les problèmes sociaux, les problèmes institutionnels. Ce n'est pas le lieu. Ce n'est pas un endroit où on vient laver le linge sale polynésien. La question essentielle est : est-ce que le statut d'autonomie de la Polynésie française peut être considéré comme un vrai statut d'autonomie ? Et c'est à cette question que j'ai souhaité apporter des précisions parce qu'ils ne connaissent pas. Ils ne savent pas ici comment fonctionne la Polynésie.

Vous étiez seul face à 18 pétitionnaires indépendantistes ou antinucléaires. Reviendrez-vous l'an prochain à plusieurs ?

Edouard Fritch : Non, ce n'est pas la peine de venir à plusieurs. On n'est pas dans un combat de quartier. Il faut être très prudent sur ce que l'on va dire de notre pays. Des questions ont été posées sur la santé de notre pays, trois ans après notre réinscription. Oscar Temaru n'a pas répondu parce que le Pays va bien. Mais c'est le fait qu'il y a trois ans on est venu ici raconter que notre Pays est en faillite parce qu'il n'y a pas de moralité dans ce pays. Mais on oublie de dire que la compétence du social est celle du Pays, que les finances du Pays sont de notre compétence. On a entendu un amalgame entre les compétences du Pays et celles de l'Etat pour dire que la France est un Etat colonial.

Les pétitionnaires ont tous insisté sur la question nucléaire. Est-ce utile de porter cette question sur le plan international dans votre rapport avec l'Etat pour améliorer la loi Morin ?

Edouard Fritch : Dans toutes mes rencontres avec les différents ambassadeurs, je leur ai expliqué effectivement qu'il y a un problème que personne ne nie, y compris le gouvernement français. Il y a des choses à régler sur les conséquences des essais nucléaires : l'environnement, la santé, l'économie de notre Pays. Mais je m'étonne que l'on soit obligé de venir chercher un arbitrage à New York alors que les discussions avec l'Etat français n'ont jamais été interrompues. L'Etat ne nous a jamais dit : stop, on n'en parle plus. Au contraire. Ce n'est que depuis 2010 que la loi existe, mais depuis 2010, les choses s'améliorent. Je vais à Paris pour continuer à en parler parce que je veux mettre le sujet dans nos accords de Papeete. Alors, pourquoi venir en parler ici. Quand on sait que l'Etat français a mal réagi suite à la réinscription, cela peut rendre nos discussions beaucoup plus compliquées que l'on vienne ici accuser la France de n'avoir rien fait.

Avez-vous eu une réponse de Marisol Touraine, la ministre de la Santé, suite à votre proposition de modifier son nouveau projet décret sur la loi Morin pour mieux indemniser les victimes ?

Edouard Fritch : Je vais en savoir un peu plus durant mon voyage à Paris. Mais le président de la République a été clair. Je lui ai donné l'exemple du salarié qui a travaillé à Moruroa durant les essais aériens et qui a un cancer aujourd'hui. On ne va pas lui demander s'il fume ou s'il boit. Ce vétéran doit être dédommagé...

Mais vous n'avez toujours pas de réponse de Marisol Touraine ?

Edouard Fritch : Pas encore. C'est un travail interministériel un peu compliqué. Il faut consulter la Défense, les Affaires sociales, l'Outre-mer. Ce qu'il faut saluer, c'est l'esprit en métropole de vouloir enfin faire évoluer les choses afin que ce caillou que l'on traîne dans notre chaussure disparaisse le plus rapidement possible.

Rédigé par Serge Massau, à New York le Mardi 4 Octobre 2016 à 14:20 | Lu 2490 fois