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Emplois fictifs : le rejet du pourvoi en cassation de Gaston Flosse est requis


Un rejet du dernier recours de Gaston Flosse dans l’affaire des emplois fictifs rendrait définitive la condamnation en appel du président de Polynésie française à trois ans d’inéligibilité, pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics. (Photo d’archives)
Un rejet du dernier recours de Gaston Flosse dans l’affaire des emplois fictifs rendrait définitive la condamnation en appel du président de Polynésie française à trois ans d’inéligibilité, pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics. (Photo d’archives)
PARIS, 25 juin 2014 - L'avocat général a préconisé mercredi le rejet par la Cour de cassation du pourvoi de Gaston Flosse contre la condamnation le privant notamment de ses droits civiques, dans l'affaire des emplois fictifs.

"Je requiers que les lois de la République soient appliquées sur tout le territoire de la République", a lancé Gilles Lacan à la fin de son intervention devant la haute juridiction. La Cour de cassation a mis son arrêt en délibéré au 23 juillet.

Le président de la Polynésie française a été condamné le 7 février 2013 en appel à quatre ans de prison avec sursis, 15 millions Fcfp d'amende et trois ans de privation de ses droits civiques, synonyme d'inéligibilité, pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics dans une vaste affaire d'emplois fictifs. Il s'était pourvu en cassation le 26 mars 2013.

Si la plus haute juridiction de l'ordre judiciaire suit les réquisitions du parquet général, Gaston Flosse sera privé de tous ses mandats, ce qui, à 83 ans, pourrait bien signifier la fin de sa longue carrière politique.

La justice lui reproche d'avoir recruté pendant une dizaine d'années, à compter de 1995, de nombreux agents en contrats de cabinet qui étaient mis à la disposition de communes, de syndicats ou d'associations. Pour l'accusation, ces agents auraient été embauchés en raison de leur proximité avec le parti de Gaston Flosse ou dans le but de les inciter à rallier sa formation.

"Le mécanisme frauduleux est établi", a jugé l'avocat général en citant le chiffre record de "626 collaborateurs à disposition du cabinet du président de la Polynésie". "C'est un peu comme si, rapporté à l'échelle de la République, le président Hollande avait 150.000 collaborateurs à Élysée", a-t-il glissé.

Les personnes "Vassalisées"

"Gaston Flosse avait fait de cette pratique un instrument de gouvernement en plaçant ses amis politiques à ces postes de cabinet", a estimé Gilles Lacan pour qui "cette affaire n'est pas celle d'une gestion relâchée mais d'une politique délibérée".

"Les personnes embauchées par la seule volonté du président, et qui pouvaient être rejetées quand il le voulait, se trouvaient vassalisées. Gaston Flosse a créé avec ce système une administration partisane qui lui était totalement dévouée", a-t-il ajouté.

L'avocat du sénateur, Mathieu Stoclet, a justifié le pourvoi de son client en reprochant notamment à la cour d'appel de ne pas avoir pris soin de caractériser l'intérêt personnel qu'il aurait retiré de la mise à disposition des emplois litigieux.

Il a également fait valoir qu'un arrêté d'août 1991 de la collectivité permettait la mise à disposition d'agents de l'administration auprès de syndicats. Mais cela ne concerne que cinq agents sur les 119 retenus dans la procédure.

Gaston Flosse est le Polynésien qui a exercé les plus hautes responsabilités nationales ayant été député, député européen, secrétaire d'État chargé du Pacifique et sénateur. Fondateur du parti autonomiste Tahoera'a Huira'atira, il a été le premier président du gouvernement de la Polynésie française de 1984 à 1987 et de 1991 à 2004, puis à plusieurs reprises lors des 13 changements de gouvernement entre 2004 et 2011, avant son retour triomphal du 17 mai 2013.

Mais ce grand ami de l'ex-président Jacques Chirac avec lequel il a cofondé le RPR et qui l'a toujours soutenu politiquement est aussi l'un des hommes politiques les plus poursuivis par la justice de la Ve République avec près d'une dizaine d'affaires jugées ou en cours.

Gaston Flosse se dit victime d'un acharnement judiciaire: "Je fais l'objet d'une rafale de procédures (...) avec pour seul but de m'abattre". Le sénateur attribue ses ennuis judiciaires à son combat politique pour l'autonomie de la Polynésie dans la République française.

En cas de rejet du pourvoi ?

Dans l'hypothèse d'un rejet du pourvoi, le 23 juillet prochain, l'arrêt d’appel devient définitif rendant applicable la peine d’inéligibilité prononcée contre Gaston Flosse pour trois ans. Mais la décision doit être signifiée. L'arrêt de la cour de cassation devra être communiqué au Procureur général du parquet de Papeete pour que ce dernier le transmette au Haut Commissaire et au président de l'Assemblée de Polynésie. Le président de l'APF a ensuite quelques jours pour démettre le condamné de son mandat de représentant et donc de Président de la Polynésie française.

En ce qui concerne le mandat de sénateur, l’éventuel rejet par la haute juridiction du pourvoi de Gaston Flosse devra être porté au Conseil Constitutionnel pour avis sur cette décision avant de la communiquer au président du Sénat. Celui-ci prononce alors la déchéance du mandat de sénateur du condamné. Cette deuxième procédure demande plusieurs semaines et pourrait ne pas être achevée le 28 septembre.

Rédigé par Pierre ROCHICCIOLI (AFP) le Mercredi 25 Juin 2014 à 05:42 | Lu 3551 fois