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Bras de fer orange à Moorea-Maiao, en vue des sénatoriales


John Toromona et Teriitepaiatua Maihi
John Toromona et Teriitepaiatua Maihi
TEAVARO (Moorea), 24 mars 2015 – L’élection des délégués communaux de Moorea-Maiao s’est tenue mardi matin sur fond de vives tensions au sein du Tahoera'a. Les pro-Flosse l’emportent d’une voix et raflent 33 grands électeurs sur les 48 de l'île.

S’il y a une commune où les tensions entre pro-Flosse et pro-Fritch auront été poussées jusqu’à leur paroxysme, pour l’élection des grands électeurs, c’est bien sur l’île sœur. Infructueuse vendredi, faute d’entente au sein d’un conseil municipal totalement orange, la désignation des 48 délégués communaux de Moorea-Maiao avait dû être reportée de trois jours. Elle s’est jouée à la majorité relative, mardi matin mairie de Teavao, en présence de 31 conseillers municipaux.

A l'issue de ce scrutin, le partage des forces en présence donne 33 voix en faveur des pro-Flosse et 15 pour les pro-Fritch.

Evans Haumani, maire de Moorea-Maiao, et les élus proches de l’influent Teriitepaiatua Maihi, maire délégué de Teavaro, lui-même aujourd’hui dévoué à la cause de Gaston Flosse, l’ont emporté par 16 voix contre les 15 exprimées par les conseillers affiliés à John Toromona, un fidèle d’Edouard Fritch.

Déjà lundi soir, sachant que le scrutin se jouerait à une voix, Evans Haumani avait affrété un hélicoptère sur l’île de Maiao pour convaincre son maire délégué, Henri Brothers. L’élu de la petite section de commune a été soumis à une pression telle qu’il a fait un malaise. Mais après avoir passé une nuit à l'isolement au domicile de Teriitepaiatua Maihi, à Teavaro, et alors que vendredi encore il donnait procuration à son frère, proche de John Toromona, sa voix fut le suffrage qui aura fait la différence, mardi.

"Ils ont obtenu la voix du maire de Maiao en allant la chercher en hélicoptère", s'est indigné John Toromona après l’échec de son action. "Qui paiera la facture ? J’ai posé la question en conseil municipal. On m’a juste répondu que ça ne me regarde pas", rapporte-t-il. Il menace d'adresser un courrier à l'administrateur des îles du Vent pour dénoncer la manœuvre.

Sa contrariété est d’autant plus vive que vendredi dernier, les forces étaient inversées ; mais le conseil municipal n’avait pu se tenir faute de quorum. John Toromona comptait alors 16 élus derrière lui tandis qu’Evans Haumani n’en dénombrait que 15, en l’absence d’Henri Brothers. A la demande du maire de Moorea-Maiao, le report du scrutin pour la désignation de 48 délégués communaux avait été refusé par les pro-Fritch ; mais il a été forcé par le départ des 15 pro-Flosse, privant l’assemblée de quorum.

Le départ, mardi matin, d’une élue de Pao Pao qui était encore vendredi du côté de John Toromona, conjugué à la voix nouvelle d’Henri Brothers en faveur des pro-Flosse, aura fait la différence.

Teriitepaiatua Maihi

La commune de Moorea-Maiao présente un cas unique en Polynésie française, du point de vue de la donne électorale pour la désignation des grands électeurs aux sénatoriales. Le conseil municipal de l’île sœur compte 33 élus mais doit désigner 48 délégués municipaux pour le scrutin du 3 mai, c'est-à-dire plus que dans n’importe quelle autre commune du Pays. Il se trouve en effet que 7,4% des grands électeurs convoqués pour les sénatoriales partielles viendront de Moorea.

Cette curiosité est le fruit d’un effet de loupe provoqué sur l'effectif des délégués par la conjugaison de deux mécaniques électorales : la commune compte 17234 habitants, dont plusieurs communes associées de plus de 3500 âmes mais comporte surtout une section de commune de moins de 1000 habitants, Maiao (335 personnes).

Moorea-Maiao est un fief orange depuis les élections municipales de mars 2014. "Ca a toujours été un panier de crabes", confie cependant un observateur de la politique locale. On a aujourd’hui une illustration de cette réalité à la lueur du combat à couteaux tirés que se sont livrées depuis vendredi les phalanges fratricides du Tahoera’a, sur fond de désignation des grands électeurs. Evans Haumani avait été élu maire de Moorea le 10 avril 2014 à l'issue d'une confrontation du même ordre. Déjà, il avait raflé la mise à John Toromona.

A la manœuvre, Teriitepaiatua Maihi tirait déjà les ficelles. L'ancien président de la fédération orange de Moorea était de retour à la gouverne après avoir un temps rejoint le mouvement A Tia Porinetia en 2013, pour les territoriales, mécontent d'un positionnement sur la liste du Tahoera’a qui ne convenait pas à ses ambitions.

Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts depuis et Teriitepaiatua Maihi s'est vu aménager un belle place au bercail orange. Président du Syndicat mixte ouvert, collaborateur du groupe Tahoera’a à l’assemblée de la Polynésie française, l’avenir des grâces accordées à l’élu de la commune associée de Teavaro par le parti dépendait de l’influence qu’il saurait démontrer dans le combat qui se livre au sein du conseil municipal de l’île sœur. Il n'a pas démérité.

Ultime commune à devoir se prononcer en Polynésie française, Moorea-Maiao l’aura fait dans des conditions extrêmes, à la veille de la date limite de signification des procès-verbaux de l'élection des délégués et suppléants qui doivent être transmis par tout moyen au Haut-commissariat de la République, au plus tard le mercredi 25 mars 2015 à 12 heures.

La liste définitive des grands électeurs convoqués au scrutin du 3 mai devrait être connue vendredi 27 mars prochain. Elle permettra à tout le monde d’y voir un peu plus clair sur ses chances de succès aux sénatoriales partielles. Il faudra surtout attendre la date limite de dépôt des candidatures, le 17 avril, pour voir quelles sont les listes en concurrence.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 24 Mars 2015 à 14:03 | Lu 1621 fois