Paris, France | AFP | jeudi 04/03/2021 - Plus de 25 ans après la campagne présidentielle malheureuse d'Edouard Balladur, la Cour de justice de la République a relaxé jeudi l'ancien Premier ministre d'accusations de financement occulte, mais a condamné à du sursis son ex-ministre de la Défense François Léotard dans ce volet de la tentaculaire affaire Karachi.
La justice "reconnaît enfin mon innocence", a réagi l'ancien Premier ministre, dans un communiqué exprimant sa "satisfaction", après "un quart de siècle de calomnies".
M. Balladur, aujourd'hui âgé de 91 ans, était absent au délibéré, comme son ancien ministre de la Défense, 78 ans.
La Cour de justice de la République - juridiction controversée et seule habilitée à juger des membres du gouvernement pour des infractions commises lors de leur mandat - a estimé que "la preuve" n'était pas "rapportée" de la participation de l'ex-Premier ministre à un système de rétrocommissions illégales versées en marge d'importants contrats d'armement.
L'accusation estimait qu'en outre une partie de l'argent de ces rétrocommissions avait servi à alimenter son compte de campagne. Elle avait requis un an d'emprisonnement avec sursis et 50.000 euros d'amende à l'encontre de M. Balladur pour "complicité" et "recel" d'abus de biens sociaux.
Mais la Cour a conclu que l'origine de 10,25 millions de francs ayant abondé le compte du candidat Balladur - "frauduleuse" selon le ministère public - n'avait pu être établie.
La CJR, composée de trois magistrats professionnels et douze parlementaires, a suivi en revanche en tous points les réquisitions pour condamner François Léotard à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 100.000 euros d'amende. Il a été reconnu coupable de "complicité" d'abus de biens sociaux.
Deux entités détenues par l'Etat négociaient la vente de sous-marins et de frégates à l'Arabie saoudite et au Pakistan. Or, selon la Cour, l'ancien ministre de la Défense a "joué un rôle central et moteur" dans l'imposition d'un réseau d'intermédiaires "inutiles" aux commissions "pharaoniques", alors que les contrats d'armement étaient quasiment finalisés.
François Léotard a réagi à sa condamnation en écrivant, dans un communiqué: "J'ai honte pour la justice française et ses dérives dangereuses. Je défendrai toujours la liberté de la décision politique".
Les arrêts de la CJR ne sont pas susceptibles d'appel. Mais M. Léotard a annoncé qu'il se pourvoirait en cassation.
Dans le volet non gouvernemental de la même affaire, le tribunal correctionnel de Paris avait infligé en juin 2020 de sévères condamnations à l'encontre de six protagonistes, dont l'homme d'affaires Ziad Takieddine, l'un des intermédiaires, ainsi qu'à l'ancien directeur de cabinet de M. Balladur, Nicolas Bazire. Tous ont fait appel.
"Sans lien" avec Karachi
"S'il est établi que M. Balladur a nécessairement eu connaissance des contrats d'armement, (...) il n'est pas démontré qu'il ait adressé une instruction" à son directeur de cabinet, afin d'"approuver les avantages consentis au réseau K", le réseau d'intermédiaires, affirme la CJR dans sa décision.
Pour la Cour, "il apparaît que (l'ex-Premier ministre) était moins au fait de l'activité du réseau K que ne l'ont été tant son directeur de cabinet que le ministre de la Défense".
Selon le ministère public, une portion des "550 millions de francs" (soit "117 millions d'euros") effectivement versés au réseau d'intermédiaires avait alimenté en partie le compte de campagne du candidat Balladur, alors engagé dans une guerre fratricide à droite avec Jacques Chirac.
Le dépôt en espèces et sans justificatif de 10,25 millions de francs (1,5 million d'euros) sur le compte du candidat, trois jours après sa défaite au premier tour, était au coeur des accusations.
Si le compte, que l'ancien locataire de Matignon (1993-95) savait déficitaire, a été "très opportunément" abondé, une "origine frauduleuse" des fonds n'a pu être démontrée, a considéré la Cour.
Le procureur général François Molins avait, lui, fait le "lien" entre cette somme et un retrait similaire en espèces quelques jours plus tôt à Genève par les intermédiaires "inutiles".
En réponse, les avocats d'Edouard Balladur avaient fustigé des "théories délirantes". L'ancien Premier ministre avait réaffirmé que les fonds provenaient de dons de militants et de la vente de gadgets aux meetings.
Les soupçons de financement occulte de la campagne Balladur avaient émergé en 2010, au fil de l'enquête sur l'attentat de Karachi commis le 8 mai 2002, qui avait coûté la vie à onze Français travaillant à la construction de sous-marins.
Toujours en cours, l'enquête sur cet attentat a au départ privilégié la piste d'Al-Qaïda, puis exploré celle - non confirmée à ce jour - de représailles pakistanaises après l'arrêt du versement des commissions, une fois Jacques Chirac élu président.
Edouard Balladur a déclaré après sa relaxe: "Il est en tout cas établi que cette affaire est sans lien avec l'attentat de Karachi".
La justice "reconnaît enfin mon innocence", a réagi l'ancien Premier ministre, dans un communiqué exprimant sa "satisfaction", après "un quart de siècle de calomnies".
M. Balladur, aujourd'hui âgé de 91 ans, était absent au délibéré, comme son ancien ministre de la Défense, 78 ans.
La Cour de justice de la République - juridiction controversée et seule habilitée à juger des membres du gouvernement pour des infractions commises lors de leur mandat - a estimé que "la preuve" n'était pas "rapportée" de la participation de l'ex-Premier ministre à un système de rétrocommissions illégales versées en marge d'importants contrats d'armement.
L'accusation estimait qu'en outre une partie de l'argent de ces rétrocommissions avait servi à alimenter son compte de campagne. Elle avait requis un an d'emprisonnement avec sursis et 50.000 euros d'amende à l'encontre de M. Balladur pour "complicité" et "recel" d'abus de biens sociaux.
Mais la Cour a conclu que l'origine de 10,25 millions de francs ayant abondé le compte du candidat Balladur - "frauduleuse" selon le ministère public - n'avait pu être établie.
La CJR, composée de trois magistrats professionnels et douze parlementaires, a suivi en revanche en tous points les réquisitions pour condamner François Léotard à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 100.000 euros d'amende. Il a été reconnu coupable de "complicité" d'abus de biens sociaux.
Deux entités détenues par l'Etat négociaient la vente de sous-marins et de frégates à l'Arabie saoudite et au Pakistan. Or, selon la Cour, l'ancien ministre de la Défense a "joué un rôle central et moteur" dans l'imposition d'un réseau d'intermédiaires "inutiles" aux commissions "pharaoniques", alors que les contrats d'armement étaient quasiment finalisés.
François Léotard a réagi à sa condamnation en écrivant, dans un communiqué: "J'ai honte pour la justice française et ses dérives dangereuses. Je défendrai toujours la liberté de la décision politique".
Les arrêts de la CJR ne sont pas susceptibles d'appel. Mais M. Léotard a annoncé qu'il se pourvoirait en cassation.
Dans le volet non gouvernemental de la même affaire, le tribunal correctionnel de Paris avait infligé en juin 2020 de sévères condamnations à l'encontre de six protagonistes, dont l'homme d'affaires Ziad Takieddine, l'un des intermédiaires, ainsi qu'à l'ancien directeur de cabinet de M. Balladur, Nicolas Bazire. Tous ont fait appel.
"Sans lien" avec Karachi
"S'il est établi que M. Balladur a nécessairement eu connaissance des contrats d'armement, (...) il n'est pas démontré qu'il ait adressé une instruction" à son directeur de cabinet, afin d'"approuver les avantages consentis au réseau K", le réseau d'intermédiaires, affirme la CJR dans sa décision.
Pour la Cour, "il apparaît que (l'ex-Premier ministre) était moins au fait de l'activité du réseau K que ne l'ont été tant son directeur de cabinet que le ministre de la Défense".
Selon le ministère public, une portion des "550 millions de francs" (soit "117 millions d'euros") effectivement versés au réseau d'intermédiaires avait alimenté en partie le compte de campagne du candidat Balladur, alors engagé dans une guerre fratricide à droite avec Jacques Chirac.
Le dépôt en espèces et sans justificatif de 10,25 millions de francs (1,5 million d'euros) sur le compte du candidat, trois jours après sa défaite au premier tour, était au coeur des accusations.
Si le compte, que l'ancien locataire de Matignon (1993-95) savait déficitaire, a été "très opportunément" abondé, une "origine frauduleuse" des fonds n'a pu être démontrée, a considéré la Cour.
Le procureur général François Molins avait, lui, fait le "lien" entre cette somme et un retrait similaire en espèces quelques jours plus tôt à Genève par les intermédiaires "inutiles".
En réponse, les avocats d'Edouard Balladur avaient fustigé des "théories délirantes". L'ancien Premier ministre avait réaffirmé que les fonds provenaient de dons de militants et de la vente de gadgets aux meetings.
Les soupçons de financement occulte de la campagne Balladur avaient émergé en 2010, au fil de l'enquête sur l'attentat de Karachi commis le 8 mai 2002, qui avait coûté la vie à onze Français travaillant à la construction de sous-marins.
Toujours en cours, l'enquête sur cet attentat a au départ privilégié la piste d'Al-Qaïda, puis exploré celle - non confirmée à ce jour - de représailles pakistanaises après l'arrêt du versement des commissions, une fois Jacques Chirac élu président.
Edouard Balladur a déclaré après sa relaxe: "Il est en tout cas établi que cette affaire est sans lien avec l'attentat de Karachi".